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Munafa ebook

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Read Ebook: La dernière Aldini: Simon by Sand George

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Ebook has 428 lines and 34279 words, and 9 pages

R?pondre, promettre, jurer, remercier, et remettre ? la belle Lila le plus ampoul? des billets d'amour, ce fut l'affaire de peu d'instants. Mais quand je voulus glisser une pi?ce d'or dans la main de la messag?re, j'en fus emp?ch? par un regard plein de tristesse et de dignit?. Elle avait c?d? par d?vouement ? la fantaisie de sa ma?tresse; mais il ?tait ?vident que sa conscience lui reprochait cet acte de faiblesse, et que lui en offrir le paiement, c'e?t ?t? la ch?tier et l'humilier cruellement. Je me reprochais beaucoup en cet instant le baiser que j'avais os? lui d?rober pour railler sa ma?tresse, et j'essayai de r?parer ma faute en la reconduisant jusqu'au bout du jardin avec autant de respect et de courtoisie que j'en eusse t?moign? ? une grande dame.

Je fus tr?s-agit? tout le reste du jour. La Checchina s'aper?ut de ma pr?occupation. <> Je r?pondis par un sourire. <

--Si j'ai besoin de toi, je te le dirai, r?pondis-je; et, quant ? te faire savoir si je suis enchant? ou d?sesp?r?, je puis t'assurer que je ne suis encore ni l'un ni l'autre.

--Eh bien! eh bien! prends garde ? l'un comme ? l'autre; car, dans les deux cas, il n'y aurait pas lieu ? de si grandes ?motions.

--Et qu'en sais-tu?

--Mon cher L?lio, reprit-elle d'un ton sentencieux, supposons que tu sois enchant?. Qu'est-ce qu'une femme facile de plus ou de moins dans la vie d'un homme de th??tre: le th??tre, o? les femmes sont si belles, si ?tincelantes d'esprit? Vas-tu donc t'enivrer d'une bonne fortune du grand monde? Vanit?! vanit?! Les femmes du monde sont aussi inf?rieures ? nous sous tous les rapports que la vanit? est inf?rieure ? la gloire.

--Voil? qui est modeste, je t'en f?licite, r?pondis-je; mais ne pourrait-on pas retourner l'aphorisme, et dire que c'est la vanit?, et non l'amour, qui attire les hommes du monde aux pieds des femmes de th??tre?

--Oh! quelle diff?rence! s'?cria la Checchina. Une belle et grande actrice est un ?tre privil?gi? de la nature et relev? par le prestige de l'art; livr?e aux regards des hommes dans tout l'?clat de sa beaut?, de son talent et de sa c?l?brit?, n'est-il pas naturel qu'elle excite l'admiration et qu'elle allume les d?sirs? Pourquoi donc, vous autres, qui subjuguez la plupart d'entre nous avant les grands seigneurs; vous, qui nous ?pousez quand nous avons l'humeur s?dentaire, et qui pr?levez vos droits sur nous quand nous avons l'?me ardente; vous qui laissez jouer ? d'autres le r?le d'amants magnifiques, et qui toujours ?tes l'amant pr?f?r?, ou tout au moins l'ami du coeur; pourquoi tourneriez-vous vos pens?es vers ces patriciennes qui vous sourient du bout des l?vres, et vous applaudissent du bout des doigts? Ah! L?lio! L?lio! je crains qu'ici ton bon sens ne soit fourvoy? dans quelque sotte aventure. A ta place, plut?t que d'?tre flatt? des oeillades de quelque marquise sur le retour, je ferais attention ? une belle choriste, ? la Torquata ou ? la Gargani, par exemple... Eh oui! eh oui! s'?cria-t-elle en s'animant ? mesure que je souriais; ces filles-l? sont plus hardies en apparence, et je soutiens qu'elles sont moins corrompues en r?alit? que tes Cidalises de salon. Tu ne serais pas forc? de jouer aupr?s d'elles une longue com?die de sentiment, ou de livrer une mis?rable guerre de bel esprit... Mais voil? comme vous ?tes! L'?cusson d'un carrosse, la livr?e d'un laquais, c'en est assez pour embellir ? vos yeux le premier laideron titr? qui laisse tomber sur vous un regard de protection...

--L?lio! s'?cria la Checchina en ?clatant de rire, tu es le fat le plus insupportable que j'aie jamais rencontr?.

--Si je suis fat, belle princesse, m'?criai-je, il y a un peu de votre faute, ? ce qu'on pr?tend.

--Eh bien! dit-elle, si tu ne mens pas, si ta ma?tresse est digne par sa beaut? des folies que tu vas faire pour elle, prends bien garde ? une chose, c'est qu'avant huit jours tu seras d?sesp?r?.

--Mais qu'avez-vous donc aujourd'hui, signora Checchina, pour me dire des choses si d?sobligeantes?

--L?lio, ne rions plus, dit-elle en posant sa main sur la mienne avec amiti?. Je te connais mieux que tu ne te connais toi-m?me. Tu es s?rieusement amoureux, et tu vas souffrir...

--Allons! allons, Checca, sur tes vieux jours tu te retireras ? Malamocco, et tu y diras la bonne ou la mauvaise aventure aux bateliers des lagunes; en attendant, laisse-moi, belle sorci?re, affronter la mienne sans l?ches pressentiments.

--Non! non! Je ne me tairai pas que je n'aie tir? ton horoscope. S'il s'agissait d'une femme faite pour toi, je ne voudrais pas t'inqui?ter; mais une noble, une femme du monde, marquise ou bourgeoise, il m'importe, je leur en veux! Quand je vois cet imb?cile de Nasi me n?gliger pour une cr?ature qui ne me va pas, je parie, au genou, je me dis que tous les hommes sont vains et sots. Ainsi, je te pr?dis que tu ne seras point aim?, parce qu'une femme du monde ne peut pas aimer un com?dien; et, si par hasard tu es aim?, tu n'en seras que plus mis?rable; car tu seras humili?.

--Humili?! Checchina, qu'est-ce que vous dites donc l??

--A quoi conna?t-on l'amour, L?lio? au plaisir qu'on donne ou ? celui qu'on ?prouve?...

--Pardieu! ? l'un et ? l'autre! O? veux-tu en venir?

--N'en est-il pas du d?vouement comme du plaisir? Ne faut-il pas qu'il soit r?ciproque?

--Sans doute; apr?s?

--Quel d?vouement esp?res-tu rencontrer chez ta ma?tresse? quelques nuits de plaisir? Tu sembles embarrass? de r?pondre.

--Je le suis, en effet; je t'ai dit qu'elle a quinze ans, et je suis un honn?te homme.

--Esp?res-tu l'?pouser?

--?pouser, moi! une fille riche et de grande maison! Dieu m'en pr?serve! Ah ??! tu crois donc que je suis d?vor? comme toi de la matrimoniomanie?

--Mais je suppose, moi, que tu aies envie de l'?pouser; tu crois qu'elle y consentira? tu en es s?r?

--Mais je te r?p?te que pour rien au monde je ne veux ?pouser personne.

--Si c'est parce que tu serais mal venu ? en avoir la pr?tention, ton r?le est triste, mon bon L?lio!

--C'est bien mon intention, cher ami de mon ?me. Or donc, tu ne songes point ? ?pouser, parce que ce serait une impertinente fantaisie de ta part, et que tu es un homme d'esprit. Tu ne songes point ? s?duire, parce que ce serait un crime, et que tu es un homme de coeur. Dis-moi, est-ce que ce sera bien amusant, ton roman?

--Mais, cr?ature ?paisse et positive que tu es, tu n'entends rien au sentiment. Si je veux faire une pastorale, qui m'en emp?chera?

--Une pastorale, c'est joli en musique. En amour, ce doit ?tre bien fade.

--Mais ce n'est ni criminel ni humiliant.

--Et pourquoi es-tu si agit?? Pourquoi es-tu triste, L?lio?

--Et qui te dit que tu n'y viendras pas?

--Alors il sera temps de me pr?cher.

--Il sera trop tard, tu souffriras!

--Ah! Cassandra, laisse-moi vivre!>>

La signora ?tait envelopp?e d'un grand voile noir, et ses mains le retinrent crois? sur son visage pendant quelques instants. Elle ne me parlait point, elle courbait sa belle t?te, comme si elle f?t venue ? l'?glise pour prier; mais, malgr? tous ses efforts pour me para?tre calme, je vis que son sein ?tait oppress?, et qu'au milieu de son audace elle ?tait frapp?e d'?pouvante. Je n'osais la rassurer par des paroles tendres; car je la savais prompte ? la repartie ironique, et je ne pr?voyais pas quel ton elle prendrait avec moi en cette circonstance d?licate. Je comprenais seulement que plus elle s'exposait avec moi, plus je devais me montrer respectueux et soumis. Avec un caract?re comme le sien, l'impudence e?t ?t? promptement repouss?e par le m?pris. Enfin, je vis qu'il fallait le premier rompre le silence, et je la remerciai assez gauchement de la faveur de cette entrevue. Ma timidit? sembla lui rendre le courage. Elle souleva doucement le coin de son voile, appuya son bras avec plus d'aisance sur le bois du confessionnal, et me dit d'un ton demi-railleur, demi-attendri:

<

--D'avoir compt? sur ma soumission, Madame, r?pondis-je; de n'avoir pas dout? de l'empressement avec lequel je viendrais recevoir vos ordres.

--Ainsi, reprit-elle en raillant tout ? fait, votre pr?sence ici est un acte de pure soumission?

--Je n'oserais pas me permettre de rien penser sur ma situation pr?sente, sinon que je suis votre esclave, et qu'ayant une volont? souveraine ? me manifester, vous m'avez command? de venir m'agenouiller ici.

--Vous ?tes un homme parfaitement ?lev?,>> r?pondit-elle en d?pliant lentement son ?ventail devant son visage et en remontant sa mitaine noire sur son bras arrondi, avec autant d'aisance que si elle e?t parl? ? son cousin.

Elle continua sur ce ton, et, en tr?s-peu d'instants, je fus obs?d? et presque attrist? de son babil fantastique et mutin. <>

Elle s'aper?ut de ma pr?occupation, et me dit d'un ton brusque:

<>

J'allais r?pondre, lorsqu'un petit bruit nous fit tourner la t?te par un mouvement spontan?. Derri?re nous s'ouvrit la coulisse de bois qui ferme la lucarne grill?e par laquelle le pr?tre re?oit les confessions, et une t?te jaune et rid?e, au regard p?n?trant et s?v?re, nous apparut comme un mauvais r?ve. Je me d?tournai pr?cipitamment avant que ce tiers malencontreux e?t le temps d'examiner mes traits. Mais je n'osai m'?loigner, de peur d'attirer l'attention des personnes environnantes. J'entendis donc ces paroles adress?es ? l'oreille de ma complice:

<>

La lucarne se referma aussit?t, et nous demeur?mes quelques instants immobiles, craignant de nous trahir par un mouvement. Alors Lila, s'approchant tout pr?s de nous, dit ? voix basse ? sa ma?tresse:

<

--Je le crois bien; car il m'a parl?, r?pondit la signora, dont le noir sourcil s'?tait fronc? durant le discours de l'abb? avec une expression de bravade. Mais peu m'importe.

--Je dois me retirer, signora, dis-je en me levant; en restant une minute de plus, j'ach?verais de vous perdre. Puisque vous connaissez ma demeure, vous me ferez savoir vos volont?s...

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