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Read Ebook: Expéditions autour de ma tente: Boutades militaires by Chartrand Joseph Damase
Font size: Background color: Text color: Add to tbrJar First Page Next PageEbook has 2206 lines and 53955 words, and 45 pagesrdonnance. Il y a quelque chose de fatal dans son regard avide, obstin?ment fix? sur un objet appuy? contre les baraques du g?nie. Sauv?! m'?criai-je... mais comment m'en emparer?... Le g?nie ne rend jamais son bien... Ce morceau de bois sera ? moi, affirmai-je en rugissant. Et d?s cet instant, le g?nie dut trembler. Il fait nuit. L'orage, second? par de noirs nuages, fait entendre, dans l'immensit? du lointain, le glas fun?bre de son approche. Le vide noir enveloppe la terre et l'espace de son linceul de nuit. Quelques grosses gouttes de pluie, tombant m?thodiquement, font g?mir les feuilles affol?es. La ville est d?serte, ses habitants renferm?s. Seul, un homme aux allures myst?rieuses et portant ? la bouche le sinistre rictus des criminels, marche ? pas lents, dans le sentier du mal. Arriv? pr?s du mur o? doit se commettre le crime, un sourire sardonique illumine son visage, ? la vue de l'isolement que l'entoure, et... cinq minutes apr?s, il rentrait dans la chambre Q pour huit hommes: la pi?ce de bois ?tait conquise. Le lendemain, le menuisier la coupe en trois longueurs. Deux, mesurant un m?tre, servent de piliers et portent des tenons ? leurs extr?mit?s sup?rieures. La traverse, mortais?e aux deux bouts, relie les montants, et ma tente avait des supports. Il me semble superflu de suivre ma tente dans ses nombreuses p?r?grinations. Lanc?e dans une campagne aventureuse, elle visita maints endroits et dut se d?placer souvent. Les paysages qui lui donn?rent l'hospitalit? pr?sentent peu de vari?t?s. Tant?t, fich?e au sol, dans quelque endroit sablonneux, elle devait faire d'h?ro?ques efforts pour r?sister aux vents en furie; tant?t, accroch?e aux flancs d'une montagne ? pic, elle prenait les airs pench?s tr?s-int?ressants ? analyser. L'alfa et le thym lui firent souvent un entourage ?pais et odorif?rant; par contre, le salp?tre des schotts lui t?moignait bien peu de sympathie. Elle eut maintes fois ? maugr?er contre les rochers qui se refusaient obstin?ment ? lui accorder droit de demeure, et elle ne se trouva r?ellement solide au poste qu'au lieu o? elle vient d'?lire domicile pour trois mois. En cela, elle rivalise de satisfaction avec son propri?taire, qui souvent fut tr?s-ennuy? d'avoir ? l'arracher au g?te ? des heures indues. Ma tente se pr?sente donc au lecteur avec une installation de trois mois. J'en profite pour livrer ? la post?rit? un voyage d'exploration descriptive dans ses parages ext?rieurs et int?rieurs. Une installation de trois mois n?cessite quelques difficult?s dans le choix du terrain. Aussi n'est-ce qu'? la suite de profondes ?tudes qu'un r?sultat satisfaisant put ?tre obtenu. La porte est au sud, ce qui est assez dire que la face oppos? est au nord. Croyant alors qu'il est inutile d'orienter les autres c?t?s, j'ajouterai que le terrain, au sud, s'affaisse lentement vers une riante et boueuse rivi?re qui coule ? cent pas d'ici. L'AUTEUR Pas n'est besoin, comme vous le voyez, d'avoir recours ? M. de la Palisse pour trouver ces graves v?rit?s. Mais, grand Dieu! ce tribut pay? ? d'honn?tes maximes ne me permet pourtant pas de faire ici le portrait de mon voisin. Il faut bien, pour la clart? des ?v?nements de ce voyage, que je me pr?sente au public, et, au risque d'ennuyer Balzac, je parlerai un peu de moi dans ce chapitre. Aussi, m'y voil?. Je suis n? comme tout le monde d'un p?re et d'une m?re. Ils n'?taient ni riches ni pauvres, et de plus r?sidaient ? Saint-Vincent de Paul. Aucun ?v?nement remarquable ne signala mon entr?e en cette vie, si ce n'est le grand chol?ra de 1852. Je n'en fus probablement pas cause. Mon enfance ne se distingua par aucune qualit? caract?ristique, sauf un go?t prononc? pour la p?che ? la ligne, et une passion pour le latin. Des nuits enti?res je fus la terreur des barbues et anguilles de l'anse ? Bleury, et ? quinze ans j'?tais en rh?torique. L? s'arr?t?rent mes succ?s de coll?ge, et apr?s quelques autres triomphes ? la ligne, je songeai ? me cr?er une position. J'y ai bien r?ussi: je suis soldat. Quant ? mon physique, sachez donc tous que j'ai vingt-huit ans et cinq pieds dix pouces. Je porte moustache et barbe au menton. J'ai l'oeil brun le soir et gris le jour. Je n'ai ni taches de rousseur, ni grains de beaut? nulle part. Je monte m?diocrement ? cheval, je tire mal de l'?p?e et tr?s bien au pistolet. Je suis robuste et je ne sais pas danser. J'ai les cheveux tr?s-noirs, un nez dr?le et beaucoup de dettes. J'?tudie l'allemand et l'arabe. Je connais bien l'anglais, et j'habite l'Alg?rie. J'aime beaucoup le Canada, et je loge au troisi?me ?tage. Je raffole de la chaleur, et je sais un peu parler fran?ais. ?tant en outre afflig? d'un petit talent de joueur de fl?te, je file des sons si doux, si doux,--et je ne me gonfle certainement pas les joues. Dernier d?tail, non le moins important, je me nomme Joseph, et je ne m'en r?jouis pas. Ce nom m'a suivi jusqu'? ce jour, et je me suis toujours efforc? de ne pas en avoir l'air. L?-dessus je me l?che, et vous emm?ne ? ma suite sur les hauts plateaux alg?riens. Assis au milieu de ma tente, je fais face au sud-est, et, suivant cette direction du regard, on y voit mon bidon. Je l'empoigne. LE BIDON Je voudrais conna?tre le gaillard qui a fait mon bidon. Je lui donnerais une partie de ma pension de retraite, pour le r?compenser des services que son oeuvre m'a rendus. Le bidon est un monde, et ceux qui n'ont jamais appr?ci? ses qualit?s apr?s la grande halte sont ? plaindre. Tout est dans le bidon, et le mien est fameux. L'absinthe, le vin, le marc de caf?, la cerisette y jou?rent aussi un certain r?le dans les bons moments; mais, grand Dieu! que ces bons moments furent clairsem?s! A l'instant o? j'?cris, mon bidon n'a pas du tout l'air int?ressant, et, avant de vous dire en quoi il p?che, je vous narre les d?tails de son physique. Ovale d'aspect et arrondi de flancs, mon bidon a deux entr?es: une petite et une grande. Ces entr?es font saillie en forme de goulots. Deux bouchons de li?ge emp?chent le contenu de sortir du contenant. Le fer-blanc est le m?tal de sa confection. Deux oreillettes, scell?es de chaque c?t?, re?oivent une banderole qui permet de le suspendre aux ?paules. Le bien-?tre et les ordres exigent que le bidon soit recouvert de l'?toffe de vareuse hors de service. Le mien a double couvert, et, pour ce, je veux que son contenu ait une double fra?cheur. Son physique examin?, je vous dis pourquoi il est actuellement d?nu? d'int?r?t palpitant. Plac? dans la partie sud-est de ma tente--chose que j'ai eu l'honneur de dire plus haut,--mon bidon penche du c?t? de la riante et boueuse rivi?re, et appara?t au voyageur avec une oreillette en moins et le bouchon du grand goulot perdu. L'oreillette disparut au fond d'un puits sal?, et j'ignore les d?tails de la perte du bouchon. Un arrangement sp?cial de courroies compliqu?es rempla?a l'oreillette, et au bouchon de li?ge succ?da un chiffon roul?. Ces d?tails sont navrants pour l'honneur de mon bidon; mais je ne puis les omettre sans manquer ? la v?rit?, apanage de tout voyageur honn?te. Il n'est pas impossible de comprendre que le pauvre diable, affubl? d'appareils aussi ?tranges, n'ait pas du tout le petit air fin de circonstance. Certainement qu'il serait impardonnable, s'il ne contenait pas, en ce moment, un bon litre de vin que le Juif de l?-bas vient d'y verser. Aussi, je prie ceux qui s'int?ressent ? mon bidon de glisser l?g?rement sur ses peccadilles. Faisons ensuite un petit mouvement vers le sud-est, et lan?ons nos regards sur mes godillots. Je ne les l?cherai pas avant la fin du chapitre suivant. LES GODILLOTS Alexis! ? Alexis! as-tu pu fabriquer mes 28, et vivre encore! Add to tbrJar First Page Next Page |
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