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Read Ebook: Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier (1/2) by R Camier Jeanne Fran Oise Julie Ad La De Bernard Lenormant Am Lie Cyvoct Editor
Font size: Background color: Text color: Add to tbrJar First Page Next Page Prev PageEbook has 1061 lines and 93296 words, and 22 pagesLes choses arriv?es ? ce terme, Mme R?camier ne pouvait tarder ? faire conna?tre ? son mari l'offre qui lui ?tait faite et sa r?pugnance invincible ? l'accepter. Lorsque M. R?camier vint ? son ordinaire d?ner ? Clichy, elle eut avec lui une courte conversation. Il entra sans difficult? dans les sentiments qu'elle exprimait, et lui laissa la plus enti?re libert? de les suivre. Assur?e de n'?tre pas d?savou?e par M. R?camier, elle attendit avec plus de tranquillit? le retour de Fouch?. Mme R?camier n'eut ? partir de ce moment aucun rapport de soci?t? avec Fouch?. Huit ans plus tard, en 1813, elle se retrouva ? Terracine, avec le duc d'Otrante, sur la route de Naples; je raconterai dans quelle circonstance. L'impression p?nible que cette basse n?gociation avait produite sur l'esprit de la belle Juliette ne tarda pas ? s'effacer, et elle crut que puisqu'elle consentait ? l'oublier, nul n'avait le droit d'en conserver du ressentiment. Jamais sa vie mondaine n'avait ?t? plus brillante, jamais les affaires de M. R?camier n'avaient paru plus prosp?res et n'avaient ?t? plus ?tendues; le cr?dit de sa maison ?tait immense, et il occupait sans contestation le premier rang parmi les financiers de l'?poque; pourtant cette existence si riche et si anim?e ?tait loin de faire le bonheur de celle ? laquelle on l'enviait. Les affections qui sont la v?ritable f?licit? et la vraie dignit? de la femme lui manquaient: elle n'?tait ni ?pouse ni m?re, et son coeur d?sert, avide de tendresse et de d?vouement, cherchait un aliment ? ce besoin d'aimer dans les hommages d'une admiration passionn?e dont le langage plaisait ? ses oreilles. ? propos de la sorte d'isolement dans lequel s'?tait ?coul? sa vie, M. Ballanche lui ?crivait un jour, dans le langage mystique dont il rev?tait habituellement sa pens?e: < < En l'absence d'une r?alit? ? laquelle ses principes, sa puret?, le rigide sentiment du devoir ne lui permettaient pas de s'abandonner, Mme R?camier en poursuivait le fant?me dans les passions qu'elle inspirait. L'effet ordinaire de la coquetterie chez les femmes, c'est l'aridit? du coeur, et elle donne presque toujours le droit de les supposer ?go?stes; pour Mme R?camier, il entrait dans son d?sir de plaire bien plus d'envie d'?tre aim?e que d'?tre admir?e, et la bont?, la sympathie de son coeur ?taient si sinc?res, que tous les hommes qui furent ?pris d'elle et dont elle repoussa les voeux, loin de lui garder rancune, devinrent pour elle autant d'amis inalt?rablement d?vou?s. Au reste, Mme R?camier trouvait dans la charit? des satisfactions plus r?elles, plus dignes de son ?me ?lev?e que ne pouvaient lui en fournir les dangereux succ?s de sa beaut?. Aid?e par les conseils de M. et de Mme de G?rando, si experts dans la pratique de la charit?, elle avait fond?, sur la paroisse de Saint-Sulpice, au temps de l'opulence de M. R?camier, une ?cole de jeunes filles qui devint bient?t si nombreuse que les seules ressources de la charit? priv?e ne pouvaient la soutenir. On eut recours aux souscriptions. La lettre que Mme de G?rando ?crivait ? la belle Juliette, alors ? Auxerre aupr?s Mme de Sta?l, pour lui rendre compte de l'?tat de l'?cole, ne semblera pas, je crois, d?pourvue d'int?r?t. < < < < Mathieu de Montmorency. 300 fr. Scipion P?rier. 300 Doumerc. 300 Mme Michel. 300 Nous. 300 M. de Champagny . 600 Le ministre de l'int?rieur. 300 < Sur Mme de Sta?l 300 fr. M. de Dalberg 300 Mme Clarke 300 M. Ternaux 300 < < < < Aux souscriptions de cent ?cus, Mme R?camier ajoutait des dons qu'on n'osait refuser ? sa gracieuse tyrannie. L'amiral Decr?s lui envoyait mille francs avec ce billet. < < < Un samedi de l'automne de cette m?me ann?e 1806, M. R?camier vint trouver sa jeune femme; sa figure ?tait boulevers?e, et il semblait m?connaissable. Il lui apprit que, par suite d'une s?rie de circonstances, au premier rang desquelles il pla?ait l'?tat politique et financier de l'Espagne et de ses colonies, sa puissante maison de banque ?prouvait un embarras qu'il esp?rait encore ne devoir ?tre que momentan?. Il aurait suffi que la Banque de France f?t autoris?e ? avancer un million ? la maison R?camier, avance en garantie de laquelle on donnerait de tr?s-bonnes valeurs, pour que les affaires suivissent leur cours heureux et r?gulier; mais si ce pr?t d'un million n'?tait pas autoris? par le gouvernement, le lundi suivant, quarante-huit heures apr?s le moment o? M. R?camier faisait ? sa femme l'aveu de sa situation, on serait contraint de suspendre les paiements. Dans cette terrible alternative, tout l'optimisme de M. R?camier l'avait abandonn?. Il avait compt? sur l'?nergie de sa jeune compagne et lui demanda de faire sans lui, dont l'abattement serait trop visible, le lendemain dimanche les honneurs d'un grand d?ner qu'il importait de ne pas contremander afin de ne pas donner l'alarme sur la position o? l'on se trouvait. Quant ? lui, plus mort que vif, il allait partir pour la campagne o? il resterait jusqu'? ce que la r?ponse de l'empereur f?t connue. Si elle ?tait favorable, il reviendrait; si elle ne l'?tait point, il laisserait s'?couler quelques jours et s'apaiser la premi?re explosion de la surprise et de la malveillance. Apr?s le premier ?tourdissement que ne pouvait manquer de lui causer la nouvelle qu'elle recevait, Juliette, rassemblant ses forces et envisageant ses nouveaux devoirs, chercha ? rendre un peu de courage ? M. R?camier, mais vainement. L'anxi?t? de sa situation, la pens?e de l'honneur de son nom compromis, la ruine possible de tant de personnes dont le sort d?pendait du sien, c'?taient l? des tortures que son excellente et faible nature n'?tait pas capable de surmonter; il ?tait an?anti. M. R?camier partit pour la campagne dans le paroxysme de l'inqui?tude. Le grand d?ner eut lieu, et nul, au milieu du luxe qui environnait cette belle et souriante personne, ne put deviner l'angoisse que cachait son sourire et sur quel ab?me ?tait plac?e la maison dont elle faisait les honneurs avec une si compl?te apparence de tranquillit?. Mme R?camier a souvent r?p?t? depuis qu'elle n'avait cess? pendant toute cette soir?e de se croire la proie d'un horrible r?ve, et que la souffrance morale qu'elle endura ?tait telle que les objets mat?riels eux-m?mes prenaient, aux yeux de son imagination ?branl?e, un aspect ?trange et fantastique. Le pr?t d'un million qui semblait une chose si naturelle fut durement refus?, et le lundi matin les bureaux de la maison de banque ne s'ouvrirent point aux paiements. Mme R?camier ne se dissimula point que la malveillance et le ressentiment personnel de l'empereur ? son ?gard avaient contribu? au refus du secours qui aurait sauv? la maison de son mari. Elle accepta sans plaintes, sans ostentation, avec une sereine fermet? le bouleversement de sa fortune, et montra dans cette cruelle circonstance une promptitude et une r?solution qui ne se d?mentirent dans aucune des ?preuves de sa vie. Le retentissement de cette catastrophe fut immense: un grand nombre de maisons secondaires se trouv?rent entra?n?es dans la chute de la puissante maison ? laquelle leurs op?rations ?taient li?es. M. R?camier fit ? ses cr?anciers l'abandon de tout ce qu'il poss?dait, et re?ut d'eux un t?moignage honorable de leur confiance et de leur estime: il fut mis par eux ? la t?te de la liquidation de ses affaires. Sa noble et courageuse femme fit vendre jusqu'? son dernier bijou. On se d?fit de l'argenterie, l'h?tel de la rue du Mont-Blanc fut mis en vente; et comme il pouvait ne pas se pr?senter imm?diatement un acqu?reur pour un immeuble de cette importance, Mme R?camier quitta son appartement et ne se r?serva qu'un petit salon au rez-de-chauss?e dont les fen?tres ouvraient sur le jardin. Le grand appartement fut lou? meubl? au prince Pignatelli, puis au comte Palffy, et enfin vendu le 1er septembre 1808 ? M. Mosselmann. Il faut faire honneur ? la soci?t? fran?aise en rappelant de quels hommages elle entoura une infortune si peu m?rit?e. Mme R?camier se vit l'objet de l'int?r?t et du respect universels; on assi?geait sa porte, et chacun, en s'y inscrivant, voulait s'honorer de sa sympathie pour un revers ?clatant noblement support?. Mme de Sta?l ?crivait ? Mme R?camier dans cette circonstance: Gen?ve, 17 novembre 1806. < < < Junot, duc d'Abrant?s, qui professait pour la belle Juliette une amiti? tr?s-exalt?e, vint peu de temps apr?s passer quelques jours ? Paris. T?moin de la catastrophe qui frappait une victime si inoffensive, et en m?me temps de la sympathie vive et respectueuse qu'elle excitait, il rejoignit l'empereur en Allemagne. Encore ?mu de ce qu'il avait vu et de ce qu'il ressentait lui-m?me, il en parla ? Napol?on avec d?tail; celui-ci l'interrompant d'un ton d'humeur: < Bernadotte ?tait aussi en Allemagne au moment o? ces revers de fortune atteignirent Mme R?camier; il lui ?crivait: LE MAR?CHAL BERNADOTTE ? Mme R?CAMIER. < < Add to tbrJar First Page Next Page Prev Page |
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