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Munafa ebook

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Read Ebook: Vies des dames galantes by Brant Me Pierre De Bourdeille

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Ebook has 765 lines and 167383 words, and 16 pages

--Une autre dame devisant d'amour avec un gentilhomme, il luy dit, entre autres propos, que s'il estoit couch? avec elle, qu'il entreprendroit faire six postes la nuict, tant sa beaut? le feroit bien piquer. <> A quoy il ne faillit de comparoistre; mais le malheur fut pour luy qu'il fut surpris, estant dans le lict, d'une telle convulsion, refroidissement et retirement de nerf, qu'il ne put pas faire une seule poste; si bien que la dame luy dit: <> Et ainsi le renvoya, et se moqua bien apr?s de luy, l'ha?ssant plus que peste. Ce gentilhomme fust est? fort heureux s'il fust est? de la complexion du grand protenotaire Baraud, et aumosnier du roy Fran?ois, que, quand il couchoit avec les dames de la Cour, du moins il alloit ? la douzaine, et au matin il disoit encore: <> Je l'ay veu depuis, et l'appeloit-on le capitaine Baraud, gascon, et avoit laiss? la robbe, et m'en a bien cont?, ? mon advis, nom par nom. Sur ses vieux ans, cette virile et v?n?reique vigueur luy d?faillit, et estoit pauvre, encore qu'il eust tir? de bons brins que sa pi?ce luy avoit valu; mais il avoit tout brouill?, et se mit ? escouler et distiller des essences: <>

--Durant cette guerre de la ligue, un honneste gentilhomme, brave certes et vaillant, estant sorty de sa place dont il estoit gouverneur pour aller ? la guerre, au retour, ne pouvant arriver d'heur en sa garnison, il passa chez une belle et fort honneste et grande dame veufve, qui le convie de demeurer ? coucher c?ans; ce qu'il ne refusa, car il estoit las. Apr?s l'avoir bien fait souper, elle lui donne sa chambre et son lict, d'autant que toutes ses autres chambres estoient d?garnies pour l'amour de la guerre, et ses meubles serrez, car elle en avoit de beaux. Elle se retire en son cabinet, o? elle y avoit un lict d'ordinaire pour le jour. Le gentilhomme, apr?s plusieurs refus de cette chambre et ce lict, fut contraint par la pri?re de la dame de le prendre: et, s'y estant couch? et bien endormy d'un tr?s-profond sommeil, voicy la dame qui vient tout bellement se coucher aupr?s de luy sans qu'il en sentist rien ny de toute la nuict, tant il estoit las et assoupy de sommeil; et reposa jusques au lendemain matin grand jour, que la dame s'ostant pr?s de luy qui s'accommen?oit ? esveiller, luy dit: <> Le gentilhomme, maugr?ant et d?testant sa bonne fortune faillie , la voulut arrester et prier; mais rien de tout cela, et fort d?pit?e contre luy pour ne l'avoir content?e comme elle vouloit, car elle n'estoit l? venu? pour un coup, aussi qu'on dit: <> et qu'elle n'estoit l? venu? pour le nombre singulier, mais pour le plurier, que plusieurs dames en cela ayment plus que l'autre. Bien contraires ? une tr?s-belle et honneste dame que j'ay cogneu, laquelle ayant donn? assignation ? son amy de venir coucher avec elle, en un rien il fit trois bons assauts avec elle; et puis, voulant quarter et parachever et multiplier ses coups, elle luy dit, pria et commanda de se d?coucher et retirer. Luy, aussi frais que devant, luy repr?sente le combat, et promet qu'il feroit rage toute cette nuict l? avant le jour venu, et que pour si peu sa force n'estoit en rien diminu?e. Elle luy dit: <> Il y a force dames qui n'eussent eu cette consid?ration, mais ennivr?es du plaisir, puisque tenoient d?j? dans le camp leur ennemy, l'eussent fait combattre jusques au clair jour.

--Cette honneste dame que je dis de paravant celles cy, estoit de telle humeur, que quand le caprice lui prenoit, jamais elle n'avoit peur ny apprehension de son mary, encore qu'il eust bonne esp?e et fust ombrageux; et nonobstant elle y a est? si heureuse, que ny elle ny ses amants n'ont pu gui?res courir fortune de vie, pour n'avoir jamais est? surpris, pour avoir bien pos? ses gardes et bonnes sentinelles et vigilantes: en quoy pourtant ne se doivent pas fier les dames, car il n'y faut qu'une heure malheureuse, ainsi qu'il arriva il y a quelque temps ? un gentilhomme brave et vaillant, qui fut massacr?, allant voir sa ma?tresse, par la trahison et men?e d'elle mesme que le mary lui avoit fait faire: que s'il n'eust eu si bonne pr?somption de sa valeur comme il avoit, certes il eust bien pris garde ? soy et ne fust pas mort, dont ce fut grand dommage. Grand exemple, certes, pour ne se fier pas tant aux femmes amoureuses, lesquelles, pour s'eschapper de la cruelle main de leurs marys, jo?ent tel jeu qu'ils veulent, comme fit cette-cy qui eut la vie sauve, et l'amy mourut.

--Il y a d'autres marys qui tuent la dame et le serviteur tout ensemble, ainsi que j'ay o?y dire d'une tr?s-grande dame de laquelle son mary estant jaloux, non pour aucun effet qu'il y eust certes, mais par jalousie et vaine apparence d'amour, il fit mourir sa femme de poison et langueur, dont fut un tr?s-grand dommage, ayant paravant fait mourir le serviteur, qui estoit un honneste homme, disant que le sacrifice estoit plus beau et plus plaisant de tuer le taureau devant et la vache apr?s. Ce prince fut plus cruel ? l'endroit de sa femme qu'il ne fut apr?s ? l'endroit d'une de ses filles qu'il avoit mari?e avec un grand prince, mais non si grand que luy qui estoit quasi un monarque. Il eschappa ? cette folle femme de se faire engrosser ? un autre qu'? son mary, qui estoit empesch? ? quelque guerre; et puis, ayant enfant? d'un bel enfant, ne sceut ? quel sainct se vo?er, sinon ? son p?re, ? qui elle d?cela le tout par un gentilhomme en qui elle se fioit, qu'elle luy envoya. Duquel aussi-tost la creance ouye, il manda ? son mary que sur sa vie il se donnast bien garde de n'attenter sur celle de sa fille, autrement il attenteroit sur la sienne, et le rendroit le plus pauvre prince de la chrestient?, comme estoit en son pouvoir; et envoya ? sa fille une galere avec une escorte querir l'enfant et la nourrice; et l'ayant fourny d'une bonne maison et entretien, il le fit tr?s-bien nourrir et ?lever. Mais au bout de quelque temps que le p?re vint ? mourir, par cons?quent le mary la fit mourir.

--J'ay ouy dire d'un autre qui fit mourir le serviteur de sa femme devant elle, et le fit fort languir, afin qu'elle mourust martyre de voir mourir en langueur celui qu'elle avoit tant aym? et tenu entre ses bras.

--Un autre de par le monde tua sa femme en pleine Cour, luy ayant donn? l'espace de quinze ans toutes les libert?s du monde, et qu'il estoit assez inform? de sa vie, jusques ? luy remonstrer et l'admonester. Toutefois une verve luy prit , et par un matin la vint trouver dans son lict ainsi qu'elle vouloit se lever, et ayant couch? avec elle, gauss? et ryt bien ensemble, luy donna quatre ou cinq coups de dague, puis la fit achever ? un sien serviteur, et apr?s la fit mettre en liti?re, et devant tout le monde fut emport?e en sa maison pour la faire enterrer. Apr?s s'en retourna, et se pr?senta ? la Cour, comme s'il eust fait la plus belle chose du monde, et en triompha. Il eust bien fait de mesme ? ses amoureux; mais il eust eu trop d'affaires, car elle en avoit tant eu et fait, qu'elle en eust fait une petite arm?e.

--J'ay ouy parler d'un brave et vaillant capitaine pourtant, qui, ayant eu quelque soup?on de sa femme, qu'il avoit prise en tr?s-bon lieu, la vint trouver sans autre suite, et l'estrangla lui-m?me de sa main de son escharpe blanche, puis la fit enterrer le plus honorablement qu'il peut, et assista aux obseques habill? en deuil, fort triste, et le porta fort longtemps ainsi habill?: et voil? la pauvre femme bien satisfaite, et pour la bien resusciter par cette belle c?r?monie: il en fit de mesme ? une damoiselle de sa dite femme qui luy tenoit la main ? ses amours. Il ne mourut sans lign?e de cette femme, car il en eut un brave fils, des vaillants et des premiers de sa patrie, et qui, par ses valeurs et m?rites, vint ? de grands grades, pour avoir bien servy ses roys et maistres.

--J'ay ouy parler aussi d'un grand en Italie qui tua aussi sa femme, n'ayant pu atrapper son galant pour s'estre sauv? en France: mais on disoit qu'il ne la tua point tant pour le p?ch? que pour espouser une autre dame dont il estoit amoureux.

--Voyla pourquoy il fait fort dangereux d'assaillir et attaquer un c.. arm?, encore qu'il y en ait d'assaillis aussi bien et autant que des d?sarmez, voire vaincus, comme j'en s?ay un qui estoit aussi bien arm? qu'en tout le monde. Il y eut un gentilhomme, brave et vaillant certes, qui le voulut muguetter; encore ne s'en contentoit-il pas, il s'en voulut pr?valoir et publier: il ne dura gui?res qu'il ne fust aussi-tost tu? par gens appostez, sans autrement faire scandale, ny sans que la dame eu patist, qui demeura longuement pourtant en tremble et aux alertes, d'autant qu'estant grosse, et se fiant qu'apr?s ses couches, qu'elle eust voulu estre allong?es d'un si?cle, elle auroit autant; mais le mary, bon et mis?ricordieux, encore qu'il fust des meilleures esp?es du monde, luy pardonna, et n'en fut jamais autre chose, et non sans grande allarme de plusieurs autres des serviteurs qu'elle avoit eus; car l'autre paya pour tous. Aussi la dame, recognoissant le bienfait et la grace d'un tel mary, ne luy donna jamais que peu de soup?on depuis, car elle fut des assez sages et vertueuses d'alors.

--Il arriva tout autrement un de ces ans au royaume de Naples, ? donne Marie d'Avalos, l'une des belles princesses du pays, mari?e avec le prince de Venouse, laquelle s'estant enamourach?e du comte d'Andriane, l'un des beaux princes du pays aussi, et s'estans tous deux concertez ? la jo?issance , voire couchez ensemble dans le lict, les fit tous deux massacrer par gens appostez; si que le lendemain on trouva ces deux belles cr?atures et moiti?s expos?es ?tendu?s sur le pav? devant la porte de la maison, toutes mortes et froides, ? la veue de tous les passants, qui les larmoyoient et plaignoient de leur mis?rable estat. Il y eut des parents de ladite dame morte qui en furent tr?s-dolents et tr?s-estomacqu?s, jusques ? s'en vouloir ressentir par la mort et le meurtre, ainsi que la loy du pays le porte, mais d'autant qu'elle avoit est? tu?e par des marauts de valets et esclaves qui ne m?ritoient d'avoir leurs mains teintes d'un si beau et si noble sang, et sur ce seul sujet s'en vouloient ressentir et rechercher le mary, fust par justice ou autrement, et non s'il eust fait le coup luy-mesme de sa propre main; car n'en fust est? autre chose, ny recherch?.

Voyla une sotte et bizarre opinion et formalisation, dont je m'en rapporte ? nos grands discoureurs et bons jurisconsultes, pour s?avoir quel acte est plus ?norme, de tuer sa femme de sa propre main qui l'a tant aim?, ou de celle d'un maraut esclave. Il y a force raisons ? d?duire l?-dessus, dont je me passeray de les alleguer, craignant qu'elles soyent trop foibles au prix de celles de ces grands.

J'ay ouy conter que le viceroy, en s?achant la conjuration, en advertit l'amant, voire l'amante; mais telle estoit leur destin?e, qui se devoit ainsi finer par si belles amours.

Cette dame estoit fille de dom Carlo d'Avalos, second fr?re du marquis de Pescayre, auquel, si on eust fait un pareil tour en aucunes de ses amours que je s?ay, il y a long-temps qu'il fust est? mort.

--J'ay cogneu un mary, lequel, venant de dehors, et ayant est? long-temps qu'il n'avoit couch? avec sa femme, vint r?solu et bien joyeux pour le faire avec elle et s'en donner bon plaisir; mais arrivant de nuict, il entendit par le petit espion qu'elle estoit accompagn?e de son amy dans le lict: luy aussi-tost mit la main ? l'esp?e, et frappant ? la porte, et estant ouverte, vint r?solu pour la tuer; mais premi?rement cherchant le gallant qui avoit saut? par la fenestre, vint ? elle pour la tuer; mais, par cas, elle s'estoit cette fois si bien atif?e, si bien par?e pour sa coiffure de nuict, et de sa belle chemise blanche, et si bien orn?e , qu'il ne l'avoit jamais trouv?e ainsi bien accommod?e pour luy ny ? son gr?, qu'elle se jettant en chemise ? terre et ? ses genoux, luy demandant pardon par si belles et douces paroles qu'elle dit, comme de vray elle s?avoit tr?s-bien dire, que, la faisant relever, et la trouvant si belle et de bonne gr?ce, le coeur lui fl?chit, et laissant tomber son esp?e, luy, qui n'avoit fait rien il y avoit si long-temps, et qui en estoit affam? , il luy pardonna et la prit et l'embrassa, et la remit au lict, et se deshabillant soudain, se coucha avec elle, referma la porte; et la femme le contenta si bien par ses doux attraits et mignardises , qu'enfin le lendemain on les trouva meilleurs amis qu'auparavant, et jamais ne se firent tant de caresses: comme fit M?n?la?s, le pauvre cocu, lequel l'espace de dix ou douze ans menassant sa femme Heleine qu'il la tueroit s'il la tenoit jamais, et mesme luy disoit du bas de la muraille en haut; mais, Troy? prise, et elle tomb?e entre ses mains, il fut si ravy de sa beaut? qu'il luy pardonna tout, et l'ayma et caressa mieux que jamais. Tels marys furieux encor sont bons, qui de lions tournent ainsi en papillons; mais il est mal ais? ? faire une telle rencontre que celle-cy.

--Une grande, belle et jeune dame du regne du roy Fran?ois I, mari?e avec un grand seigneur de France, et d'aussi grande maison qui y soit point, se sauva bien autrement, et mieux que la precedente; car, fust ou qu'elle eust donn? quelque sujet d'amour ? son mary, ou qu'il fust surpris d'un ombrage ou d'une rage soudaine, et fust venu ? elle l'esp?e nu? ? la main pour la tuer, desesperant de tout secours humain pour s'en sauver, s'advisa soudain de se vo?er ? la glorieuse Vierge Marie, et en aller accomplir son voeu ? sa chapelle de Lorette, si elle la sauvoit, ? Sainct Jean de Mauverets, au pa?s d'Anjou. Et sitost qu'elle eut fait ce voeu mentalement, ledit seigneur tumba par terre, et luy faillit son esp?e du poing; puis tantost se releva, et, comme venant d'un songe, demanda ? sa femme ? quel sainct elle s'estoit recommand?e pour ?viter ce p?ril. Elle luy dit que c'estoit ? la Vierge Marie, en sa chapelle susdite, et avoit promis d'en visiter le saint lieu. Lors il luy dit: <> ce qu'elle fit, et y appendit un tableau contenant l'histoire, ensemble plusieurs beaux et grands voeux de cire, ? ce jadis accoustumez, qui s'y sont veus long-temps apr?s. Voyla un bon voeu, et belle escapade inopin?e. Voyez la cronique d'Anjou.

--J'ay ouy parler que le roy Fran?ois une fois voulut aller coucher avec une dame de sa Cour qu'il aymoit. Il trouva son mary l'esp?e au poing pour l'aller tuer; mais le Roy lui porta la sien ne ? la gorge, et luy commanda, sur sa vie, de ne luy faire aucun mal, et que s'il luy faisoit la moindre chose du monde, qu'il le tueroit, ou qu'il luy feroit trancher la teste; et pour ceste nuict l'envoya dehors, et prit sa place. Cette dame estoit bien heureuse d'avoir trouv? un si bon champion et protecteur de son c..; car oncques depuis le mary ne luy osa sonner mot, ains luy laissa du tout faire ? sa guise. J'ai ouy dire que non seulement cette dame, mais plusieurs autres, obtindrent pareille sauve garde du Roy. Comme plusieurs font en guerre pour sauver leurs terres et y mettent les armoiries du Roy sur leurs portes, comme font ces femmes, celles de ces grands roys, au bord et au dedans de leur c.., si bien que leurs marys ne leur osoient dire mot, qui, sans cela, les eussent passez au fil de l'esp?e.

--J'ai ouy parler d'une, laquelle estant surprise sur le fait, son mari, vieillard, luy donna une poison de laquelle elle languit plus d'un an et vint seiche comme bois; et le mary l'alloit voir souvent, et se plaisoit en cette langueur, et en rioit, et disoit qu'elle n'avoit que ce qu'il luy falloit.

--Une autre, son mary l'enferma dans une chambre et la mit au pain et ? l'eau, et bien souvent la faisoit despouiller toute nue et la fouettoit son saoul, n'ayant compassion de cette belle charnure nue, ni non plus d'?motion. Voyla le pis d'eux, car, estant d?garnis de chaleur et d?pourveus de tentation comme une statue de marbre, n'ont piti? de nulle beaut?, et passent leurs rages par de cruels martyres, au lieu qu'estans jeunes la passeroyent possible sur leur beau corps nud, comme j'ay dit cy devant. Voyla pourquoi il ne fait pas bon d'espouser de tels vieillards bizarres, car, encor que la veue leur baisse et vienne ? manquer par l'aage, si en ont ils toujours prou pour espier et voir les frasques que leurs jeunes femmes leur peuvent faire.

--Aussy j'ay ouy parler d'une grande dame qui disoit que nul samedy fut sans soleil, nulle belle femme sans amours, et nul vieillard sans ?tre jaloux; et tout procede pour la d?bolezze de ses forces. C'est pourquoy un grand prince que je s?ay disoit qu'il voudroit ressembler le lion, qui, pour vieillir, ne blanchit jamais; le singe, qui tant plus il le fait tant plus il le veut faire; le chien tant plus il vieillit son cas se grossit; et le cerf, que tant plus il est vieux tant mieux il le fait, et les biches vont plust?t ? luy qu'aux jeunes. Or, pour en parler franchement, ainsi que j'ay ouy dire ? un grand personnage, quelle raison y a-t-il, ni quelle puissance a-t-il le mary si grande, qu'il doive et puisse tuer sa femme, veu qu'il ne l'a point de Dieu, ny de sa loy, ny de son saint Evangile, sinon de la r?pudier seulement? Il ne s'y parle point de meurtre, de sang, de mort, de tourments, de poison, de prisons ni de cruautez. Ah! que nostre Seigneur J?sus-Christ nous a bien remonstr? qu'il y avoit de grands abus en ces fa?ons de faire et en ces meurtres, et qu'il ne les approuvoit gui?res, lorsqu'on luy amena cette pauvre femme accus?e d'adultere pour jeter sa sentence de punition; il leur dit en escrivant en terre de son doigt: <> ce que nul n'osa faire, se sentans atteints par telle sage et douce repr?hension. Nostre Cr?ateur nous apprenoit ? tous de n'estre si l?gers ? condamner et faire mourir les personnes, mesmes sur ce sujet, cognoissant les fragilitez de nostre nature et l'abus que plusieurs y commettent; car tel fait mourir sa femme qui est plus adultere qu'elle, et tels les font mourir bien souvent innocentes, se faschans d'elles pour en prendre d'autres nouvelles, et combien y en a-t-il! Sainct Augustin dit que l'homme adultere est aussi punissable que la femme.

--J'ay ouy parler d'un tr?s-grand prince de par le monde, qui, soub?onnant sa femme faire l'amour avec un galant cavallier, il le fit assassiner sortant un soir de son palais, et puis la dame, laquelle, un peu auparavant ? un tournoy qui se fit ? la Cour, et elle fixement arregardant son serviteur qui manioit bien son cheval, se mit ? dire: <> ce qui l'estonna, et apr?s fut empoisonn?e par quelques parfums ou autrement par la bouche.

--J'ay cogneu un seigneur de bonne maison qui fit mourir sa femme, qui estoit tr?s-belle et de bonne part et de bon lieu, en l'empoisonnant par sa nature, sans s'en ressentir, tant subtile et bien faite avoit est? icelle poison, pour espouser une grande dame qui avoit espous? un prince, dont en fut en peine, en prison et en danger sans ses amis: et le malheur voulut qu'il ne l'espousa pas, et en fut tromp? et fort scandalis?, et mal veu des hommes et des dames. J'ai veu de grands personnages blasmer grandement nos roys anciens, comme Louis Hutin et Charles le Bel, pour avoir fait mourir leurs femmes: l'une, Marguerite, fille de Robert, duc de Bourgogne; et l'autre, Blanche, fille d'Othelin, comte de Bourgogne: leur mettant ? sus leurs adulteres; et les firent mourir cruellement entre quatre murailles, au Chasteau Gaillard: et le comte de Foix en fit de mesme ? Jeanne d'Artoys. Surquoy il n'y avoit point tant de forfaits et de crimes comme ils le faisoient ? croire; mais messieurs se faschoient de leurs femmes, et leur mettoient ? sus ces belles besognes, et en espous?rent d'autres.

--Comme de frais, le roy Henry d'Angleterre fit mourir sa femme Anne de Boulan, et la d?capiter, pour en espouser une autre, ainsi qu'il estoit fort sujet au sang et au change de nouvelles femmes. Ne vaudroit-il pas mieux qu'ils les r?pudiassent selon la parole de Dieu, que les faire ainsi cruellement mourir? Mais il leur en faut de la viande fra?che ? ces messieurs, qui veulent tenir table ? part, sans y convier personne, ou avoir nouvelles et secondes femmes qui leur apportent des biens apr?s qu'ils ont mang? ceux de leurs premi?res, ou n'en ont eu assez pour les rassasier, ainsi que fit Baudo?in, second roi de Jerusalem, qui, faisant croire ? sa premi?re femme qu'elle avoit paillard?, la r?pudia pour prendre une fille du duc de Maliterne, parce qu'elle avoit une dot d'une grande somme d'argent, dont il estoit fort n?cessiteux. Cela se trouve en l'histoire de la Terre Sainte. Il leur sied bien de corriger la loy de Dieu, et en faire une nouvelle, pour faire mourir ces pauvres femmes!

--Le roy Lo?is le Jeune n'en fit pas de mesme ? l'endroit de L?onor, duchesse d'Aquitaine, qui, soup?onn?e d'adultere, possible ? faux, en son voyage de Syrie, fut r?pudi?e de luy seulement, sans vouloir user de la loy des autres, invent?e et pratiqu?e plus par autorit? que de droit et raison: dont sur ce il en acquist plus grande r?putation que les autres roys, et titre de bon, et les autres de mauvais, cruels et tyrans; aussi que dans son ame il avoit quelques remords de conscience d'ailleurs: et c'est vivre en chrestien cela, voire que les payens romains la pluspart s'en sont acquitt?s de mesme plus chrestiennement que payennement, et principalement aucuns empereurs, desquels la plus grande part ont est? sujets ? estre cocus, et leurs femmes tr?s-lubriques et fort putains: et, tels cruels qu'ils ont est?, vous en lirez force qui se sont d?faits de leurs femmes, plus par r?pudiations que par tueries de nous autres Chrestiens.

--Octavie C?sar r?pudia aussi Scribonia pour l'amour de sa paillardise sans autre chose, et ne luy fit autre mal, bien qu'elle eust raison de le faire cocu, ? cause d'une infinit? de dames qu'il entretenoit; et devant leurs marys publiquement les prenoit ? table aux festins qu'il leur faisoit, et les emmenoit en sa chambre, et, apr?s en avoir fait, les renvoyoit, les cheveux d?faits un peu et destortillez, avec les oreilles rouges: grand signe qu'elles en venoient, lequel je n'avois ouy dire propre pour descouvrir que l'on en vient; ouy bien le visage, mais non l'oreille. Aussi luy donna-t-on la r?putation d'estre fort paillard; mesmes Marc-Antoine le luy reprocha: mais il s'excusoit qu'il n'entretenoit point tant les dames pour la paillardise, que pour descouvrir plus facilement les secrets de leurs marys, desquels il se mesfioit. J'ai cogneu plusieurs grands et autres, qui en ont fait de mesme et ont recherch? les dames pour ce mesme sujet, dont s'en sont bien trouvez; j'en nommerois bien aucuns: ce qui est une bonne finesse, car il en sort double plaisir. La conjuration de Catilina fut ainsi descouverte par une dame de joye.

--Ce mesme Octavie, ? sa fille Julia, femme d'Agrippa, pour avoir est? une tr?s-grande putain, et qui luy faisoit grande honte , fut une fois en d?lib?ration de la faire mourir; mais il ne la fit que bannir, luy oster le vin et l'usage des beaux habillements, et d'user des parures, pour tr?s-grande punition, et la fr?quentation des hommes: grande punition pourtant pour les femmes de cette condition, de les priver de ces deux derniers points!

--C?sar Caligula, qui estoit un fort cruel tyran, ayant eu opinion que sa femme Livia Hostilia lui avoit d?rob? quelques coups en robe, et donn? ? son premier mary C. Piso, duquel il l'avoit ost?e par force, et ? luy encore vivant, luy faisoit quelque plaisir et gracieuset? de son gentil corps cependant qu'il estoit absent en quelque voyage, n'usa point en son endroit de sa cruaut? accoustum?e, ains la bannit de soy seulement, au bout de deux ans qu'il l'eust ost?e ? son mary Piso et espous?e. Il en fit de mesme ? Tullia Paulina, qu'il avoit ost?e ? son mary C. Memmius: il ne la fit que chasser, mais avec d?fense expresse de n'user nullement de ce mestier doux, non pas seulement ? son mary: rigueur cruelle pourtant de n'en donner ? son mary! J'ay ouy parler d'un grand prince chrestien qui fit cette d?fense ? une dame qu'il entretenoit, et ? son mary de n'y toucher, tant il estoit jaloux.

Claudius, fils de Drusus Germanicus, r?pudia tant seulement sa femme Plantia Herculalina, pour avoir est? une signal?e putain, et, qui pis est, pour avoir entendu qu'elle avoit attent? sur sa vie; et, tout cruel qu'il estoit, encor que ces deux raisons fussent assez bastantes pour la faire mourir, il se contenta du divorce. Davantage, combien de temps porta-t-il les fredaines et sales bourdelleries de Valeria Messalina, son autre femme, laquelle ne se contentoit pas de le faire avec l'un et l'autre, dissolument et indiscr?tement, mais faisoit profession d'aller aux bourdeaux s'en faire donner, comme la plus grande bagasse de la ville, jusques-l?, comme dit Juvenal, qu'ainsi que son mary estoit couch? avec elle, se d?roboit tout bellement d'aupr?s de luy le voyant bien endormy et se d?guisoit le mieux qu'elle pouvoit, et s'en alloit en plein bourdeau, et l? s'en faisoit donner si tr?s-tant, et jusques qu'elle en partoit plustost lasse que saoule et rassasi?e, et faisoit encore pis: pour mieux se satisfaire et avoir cette r?putation et contentement en soy d'estre une grande putain et bagasse, se faisoit payer, et taxoit ses coups et ses chevauch?es, comme un commissaire qui va par pays jusqu'? la derni?re maille.

--J'ay ouy parler d'une dame de par le monde, d'assez ch?re ?toffe, qui quelque temps fit cette vie, et alla ainsi aux bourdeaux d?guis?e, pour en essayer la vie et s'en faire donner; si que le guet de la ville, en faisant la ronde, l'y surprit une nuict. Il y en a d'autres qui font ces coups, que l'on s?ait bien.

--Quelquesfois on dit des choses qu'on ne pense pas dire, quelquesfois aussi sans y penser l'on dit bien la v?rit?. Voil? donc comme il fait meilleur avec les grandes et hautes femmes, quand ce ne seroit que pour la belle grace, la majest? qui est en elles; car, en ces choses, elle y est aussi requise et autant aimable qu'en d'autres actions et exercices, ny plus ny moins que le man?ge d'un beau et grand coursier du r?gne est bien cent fois plus agr?able et plaisant que d'un petit bidet, et donne bien plus de plaisir ? son escuyer; mais aussi il faut bien que cet escuyer soit bon et se tienne bien, et monstre bien plus de force et d'adresse: de mesme se faut-il porter ? l'endroit des grandes et hautes femmes; car, de cette taille, elles sont sujettes d'aller d'un air plus haut que les autres, et bien souvent font perdre l'estrier, voire l'ar?on, si l'on n'a bonne tenu?, comme j'ay ouy conter ? aucuns cavalcadours qui les ont mont?es; et lesquelles font gloire et grand mocquerie quand elles les font sauter et tomber tout ? plat: ainsi que j'en ay ouy parler d'une de cette ville, laquelle, la premi?re fois que son serviteur coucha avec elle, luy dit franchement: <> Mais la femme le gaigna. Voil? donc comme il faut bien adviser ? se gouverner avec telles femmes hardies, joyeuses, renforc?es, charnu?s et proportionn?es; et, bien que la chaleur surabondante en elles donne beaucoup de contentement, quelquesfois aussi sont-elles trop pressantes pour estre si chaleureuses. Toutesfois, comme l'on dit, de toutes tailles bons levriers: aussi y a-t-il de petites femmes nabottes qui ont le geste, la grace, la fa?on en ces choses un peu approchante des autres, ou les veulent imiter, et si sont aussi chaudes et aspres ? la cur?e, voire plus: je m'en rapporte aux maistres en ces arts. Ainsi qu'un petit cheval se remue aussi prestement qu'un grand, et, comme disoit un honneste homme, que la femme ressembloit ? plusieurs animaux, et principalement ? un singe, quand dans le lict elle ne fait que se mouvoir et remuer. J'ay fait cette digression; en me souvenant il faut retourner ? nostre premier texte.

--Et ce cruel N?ron ne fit aussi que r?pudier sa femme Octavia, fille de Claudius et Messalina, pour adult?re, et sa cruaut? s'abstint jusques-l?.

--Domitian fit encore mieux, lequel r?pudia sa femme Domitia Longina parce qu'elle estoit si amoureuse d'un certain com?dien et basteleur nomm? P?ris, et ne faisoit tout le jour que paillarder avec luy, sans tenir compagnie ? son mary; mais, au bout de peu de temps, il la reprit encore et se repentit de sa s?paration; pensez que ce basteleur luy avoit appris des tours de souplesse et de maniement dont il croyoit qu'il se trouveroit bien.

--Pertinax en fit de mesme ? sa femme Flavia Sulpitiana, non qu'il la r?pudiast ni qu'il la reprist, mais la sachant faire l'amour ? un chantre et joueur d'instruments, et s'adonner du tout ? luy, n'en fit autre compte sinon la laisser faire, et luy faire l'amour de son cost? ? une Cornificia estant sa cousine germaine; suivant en cel a l'opinion d'Eliogabale, qui disoit qu'il n'y avoit rien au monde plus beau que la conversation de ses parents et parentes. Il y en a force qui ont fait tels eschanges que je s?ay, se fondans sur ces opinions.

--Aussi l'empereur Severus non plus se soucia de l'honneur de sa femme, laquelle estoit putain publique, sans qu'il se souciast jamais de l'en corriger, disant qu'elle se nommoit Jullia, et, pour ce, qu'il la falloit excuser, d'autant que toutes celles qui portoient ce nom de toute anciennet? estoient sujettes d'estre tr?s-grandes putains et faire leurs marys cocus: ainsi que je connois beaucoup de dames portans certains noms de notre christianisme, que je ne veux dire pour la r?v?rence que je dois ? nostre saincte religion, qui sont coustumi?rement sujettes ? estre puttes et ? hausser le devant plus que d'autres portans autres noms, et n'en a-t-on veu gu?res qui s'en soient eschapp?es.

Or je n'aurois jamais fait si je voulois all?guer une infinit? d'autres grandes dames et emperieres romaines de jadis, ? l'endroict desquelles leurs marys cocus, et tr?s-cruels, n'ont us? de leurs cruautez, autoritez et privileges, encore qu'elles fussent tr?s-d?bord?es; et croy qu'il y en a peu de prudes de ce vieux temps, comme la description de leur vie le manifeste: mesmes, que l'on regarde bien leurs effigies et m?dailles antiques, on y verra tout ? plain, dans leur beau visage, la mesme lubricit? toute grav?e et peinte; et pourtant leurs marys cruels la leur pardonnoient, et ne les faisoient mourir, au moins aucuns: et qu'il faille qu'eux payens, ne connaissans Dieu, ayent est? si doux et benings ? l'endroit de leurs femmes et du genre humain, et la pluspart de nos roys, princes, seigneurs et autres chrestiens, soyent si cruels envers elles par un tel forfait!

--Encore faut-il lo?er ce brave Philippe Auguste, nostre roy de France, lequel, ayant r?pudi? sa femme Angerberge, soeur de Canut, roy de Danemarck, qui estoit sa seconde femme, sous pr?texte qu'elle estoit sa cousine en troisiesme degr? du cost? de sa premiere femme Isabel , n?antmoins ce roy, forc? par censures eccl?siastiques, quoy qu'il fust remari? d'ailleurs, la reprit, et l'emmena derri?re luy tout ? cheval, sans le sceu de l'assembl?e de Soissons faite pour cet effet, et trop s?journant pour en d?cider. Aujourd'huy aucun de nos grands n'en font de mesmes; mais la moindre punition qu'ils font ? leurs femmes, c'est les mettre en chartre perp?tuelle, au pain et ? l'eau, et l? les faire mourir, les empoisonnent, les tuent, soit de leur main ou de la justice. Et s'ils ont tant d'envie de s'en d?faire et espouser d'autres, comme cela advient souvent, que ne les r?pudient-ils, et s'en separent honnestement, sans autre mal, et demandent puissance au pape d'en espouser une autre, encor que ce qui est conjoint l'homme ne le doit s?parer? Toutesfois, nous en avons eu des exemples de frais, et du roy Charles huit et de Lo?is douze, nos roys; sur quoy j'ay ouy discourir un grand th?ologien, et c'estoit sur le feu roy d'Espagne Philippe, qui avoit espous? sa niepce, m?re du roy d'aujourd'huy, et ce par dispense, qui disoit: <> Certainement les femmes sont fort blasmables de traitter ainsi leurs marys par leur foy viol?e, que Dieu leur a tant recommand?e mais pourtant de l'autre cost?, il a bien d?fendu le meurtre, et lui est grandement odieux de quelque cost? que ce soit: et jamais guieres n'ay-je veu gens sanguinaires et meurtriers, mesmes de leurs femmes, qui n'en ayent pay? le debte, et peu de gens aimant le sang ont bien finy; car plusieurs femmes p?cheresses ont obtenu et gaign? mis?ricorde de Dieu, comme la Madelaine. Enfin, ces pauvres femmes sont cr?atures plus ressemblantes ? la Divinit? que nous autres ? cause de leur beaut?; car ce qui est beau est plus approchant de Dieu qui est tout beau, que le laid qui appartient au diable.

--Ce grand Alphonse, roy de Naples, disoit que la beaut? estoit une vraye signifiance de bonnes et douces moeurs, ainsi comme est la belle fleur d'un bon et beau fruit: comme de vray, en ma vie j'ay veu force belles femmes toutes bonnes; et, bien qu'elles fissent l'amour, ne faisoyent point de mal, ny autre qu'? songer ? ce plaisir, et y mettoyent tout leur soucy sans l'applicquer ailleurs. D'autres aussi en ay-je veu tr?s-mauvaises, pernicieuses, dangereuses, crueles et fort malicieuses, nonobstant songer ? l'amour et au mal tout ensemble. Sera t-il doncques dit qu'estant ainsi sujettes ? l'humeur vollage et ombrageuse de leurs marys, qui m?ritent plus de punition cent fois envers Dieu, qu'elles soient ainsi punies? Or de telles gens la complexion est autant fascheuse comme est la peine d'en escrire.

--J'en parle maintenant encore d'un autre, qui estoit un seigneur de Dalmatie, lequel ayant tu? le paillard de sa femme, la contraignit de coucher ordinairement avec son tronc mort, charogneux et puant; de telle sorte que la pauvre femme fut suffoqu?e de la mauvaise senteur qu'elle endura par plusieurs jours.

--La premi?re fois que je fus jamais en Italie, passant par Venise, il me fut fait un compte pour vray d'un certain chevalier albanais, lequel, ayant surpris sa femme en adult?re, tua l'amoureux, et de despit qu'il eut que sa femme ne s'estoit content?e de luy; car il estoit un gallant cavallier, et des propres pour V?nus, jusques ? entrer en jouxte dix ou douze fois pour une nuict: pour punition il fut curieux de rechercher par-tout une douzaine de bons compagnons, et fort ribauts, qui avoient la r?putation d'estre bien et grandement proportionnez de leurs membres, et fort adroits et chauds ? l'ex?cution; et les prit, les gagea, et loua pour argent, et les serra dans la chambre de sa femme, qui estoit tr?s-belle, et la leur abandonna, les priant tous d'y faire bien leur devoir, avec double paye s'ils s'en acquittoient bien: et se mirent tous apr?s elle, les uns apr?s les autres, et la men?rent de telle fa?on qu'ils la rendirent morte, avec un tr?s-grand contentement du mary; ? laquelle il luy reprocha, tendante ? la mort, que, puis qu'elle avoit tant aym? cette douce liqueur, qu'elle s'en saoulast, ? mode que dit S?miramis ? Cyrus, luy mettant sa teste dans un vase plein de sang. Voila un terrible genre de mort! Cette pauvre dame ne fust ainsi morte, si elle eust est? de la robuste complexion d'une garce qui fut au camp de C?sar en la Gaule, sur laquelle on dit que deux l?gions pass?rent par dessus en peu de temps, et au partir de l? fit la gambade, ne s'en trouvant point mal.

--J'ai ouy parler d'une dame fran?oise de ville, et damoiselle, et belle: en nos guerres civiles ayant est? forc?e, dans une ville prise d'assaut, par une infinit? de soldats, et, en estant ?chapp?e, elle demanda ? un beau p?re si elle avoit p?ch? grandement: apr?s luy avoir cont? son histoire, il lui dit que non, puisqu'elle avoit ainsi ?t? prise par force, et viol?e sans sa volont?, mais y r?pugnant du tout. Elle r?pondit: <>

--Une dame de bonne part, au massacre de la Sainct-Barth?lemy, ayant ?t? ainsi forc?e, et son mary mort, elle demanda ? un homme de s?avoir et de conscience si elle avoit offens? Dieu, et si elle n'en seroit point punie de sa rigueur, et si elle n'avoit point fait tort aux manes de son mary qui ne venoit que d'estre frais tu?. Il lui respondit que, quand elle estoit en cette besogne, si elle y avoit pris plaisir, certainement elle avoit p?ch?; mais si elle y avoit eu du d?goust, c'?toit tout un. Voila une bonne sentence!

--J'ay bien cogneu une dame qui estoit diff?rente de cette opinion, qui disoit qu'il n'y avoit si grand plaisir en cette affaire que quand elle estoit ? demy forc?e et abattue, et mesme d'un grand, d'autant que, tant plus on fait de la rebelle et de la refusante, d'autant plus on y prend d'ardeur et s'efforce-t-on: car, ayant une fois fauss? sa breche, il jouit de sa victoire plus furieusement et rudement, et d'autant plus on donne d'appetit ? sa dame, qui contrefait pour tel plaisir la demi-morte et pasm?e, comme il semble, mais c'est de l'extr?me plaisir qu'elle y prend: mesme ce disoit cette dame, que bien souvent elle donnoit de ces venues et alteres ? son mary, et faisoit de la farouche, de la bizarre et desdaigneuse, le mettant plus en rut; et, quand il venoit l?, luy et elle s'en trouvoient cent fois mieux: car, comme plusieurs ont escrit, une dame plaist plus qui fait un peu de la difficile et resiste, que quand elle se laisse sitost porter par terre. Aussi en guerre, une victoire obtenue de force est plus signal?e, plus ardente et plaisante, que par la gratuit?, et en triomphe-t-il mieux. Mais aussi ne faut que la dame fasse tant en cela la revesche ny terrible, car on la tiendroit plustost pour une putain rus?e qui voudroit faire de la prude, dont bien souvent elle seroit escandalis?e; ainsi que j'ay ouy dire ? des plus savantes et habiles en ce fait, auxquelles je m'en rapporte, ne voulant estre si pr?somptueux de leur en donner des pr?ceptes qu'elles s?avent mieux que moy. Or j'ay veu plusieurs blasmer grandement aucun de ces marys jaloux et meurtriers, d'une chose, que, si leurs femmes sont putains, eux-m?mes en sont cause. Car, comme dit saint Augustin, c'est une grande folie ? un mary de requ?rir chastet? ? sa femme, luy estant plong? au bourbier de paillardise; et en tel estat doit estre le mary qu'il veut trouver sa femme. Mesmes nous trouvons en nostre Sainte Escriture qu'il n'est pas besoin que le mary et la femme s'entr'ayment si fort; cela se veut entendre par des amours lascifs et paillards: d'autant que, mettant et occupant de tout leur coeur en ces plaisirs lubriques, y songent si fort et s'y adonnent si tr?s-tant, qu'ils en laissent l'amour qu'ils doivent ? Dieu; ainsi que moy-mesme j'ay veu beaucoup de femmes qui aymoient si tr?s-tant leurs marys, et eux elles, et en brusloient de telle ardeur, qu'elles et eux en oublioient du tout le service de Dieu, si que, le temps qu'il y falloit mettre, le mettoient et consommoient apr?s leurs paillardises. De plus, ces marys, qui pis est, apprennent ? leurs femmes, dans leur lict propre, mille lubricitez, mille paillardises, mille tours contours, fa?ons nouvelles, et leur pratiquent ces figures enormes de l'Aretin: de telle sorte que, pour un tison de feu qu'elles ont dans le corps, elles y en engendrent cent, et les rendent ainsi paillardes; si bien qu'estant de telle fa?on dress?es, elles ne se peuvent engarder qu'elles ne quittent leurs marys, et aillent trouver autres chevaliers; et, sur ce, leurs marys en desesperent, et punissent leurs pauvres femmes, en quoy ils ont grand tort: car puis qu'elles sentent leur coeur pour estre si bien dress?es, elles veulent monstrer ? d'autres ce qu'elles s?avent faire; et leurs marys voudroient qu'elles cachassent leur s?avoir, en quoy il n'y a apparence ny raison, non plus que si un bon escuyer avoit un cheval bien dress?, allant de tous ayrs, et qu'il ne voulust permettre qu'on le vist aller, ny qu'on montast dessus, mais qu'on le creust ? sa simple parole, et qu'on l'acheptast ainsi.

--J'ay ouy conter ? un honneste gentilhomme de par le monde, lequel estant devenu fort amoureux d'une belle dame, il luy fut dit par un sien amy qu'il y perdroit son temps, car elle aimoit trop son mary. Il se va adviser une fois de faire un trou qui arregardoit droit dans leur lict, si bien qu'estant couch?s ensemble il ne faillit de les espier par ce trou, d'o? il vit les plus grandes lubricitez, paillardises, postures sales, monstrueuses et ?normes, autant de la femme, voire plus que du mary, et avec des ardeurs tr?s-extr?mes; si bien que le lendemain il vint ? trouver son compagnon et luy raconter la belle vision qu'il avoit eue, et luy dit: <>

--Je cognois un autre honneste gentilhomme qui, estant bien amoureux d'une belle et honneste dame, s?achant qu'elle avoit un Aretin en figure dans son cabinet, que son mary s?avoit et l'avoit veu et permis, augura aussi-tost par l? qu'il l'attraperoit; et, sans perdre esp?rance, il la servit si bien et continua, qu'enfin il l'emporta; et cogneut en elle qu'elle y avoit appris de bonnes le?ons et pratiques, ou fust de son mary ou d'autres, niant pourtant que ny les uns ny les autres n'en avoient point est? les premiers maistres, mais la dame nature, qui en estoit meilleure maistresse que tous les arts. Si est-ce que le livre et la pratique luy avoient beaucoup servy en cela, comme elle luy confessa puis apr?s.

--Il se lit d'une grande courtisane et maquerelle insigne du temps de l'ancienne Rome, qui s'appeloit Elefantina, qui fit et composa de telles figures de l'Aretin, encore pires, auxquelles les dames grandes et princesses faisant estat de putanisme estudioient comme un tr?s-beau livre; et cette bonne dame putain cyr?niene, laquelle estoit surnomm?e aux douze Inventions, parce qu'elle avoit trouv? douze mani?res pour rendre le plaisir plus voluptueux et lubrique.

--H?liogabale gaigeoit et entretenoit, par grand argent et dons, ceux et celles qui luy inventoient et produisoient nouvelles et telles inventions pour mieux esveiller sa paillardise. J'en ay ouy parler d'autres pareils de par le monde.

--Un de ces ans le pape Sixte fit pendre ? Rome un secr?taire qui avoit est? au cardinal d'Est, et s'appeloit Capella, pour beaucoup de forfaits, mais entre autres qu'il avoit compos? un livre de ces belles figures, lesquelles estoient repr?sent?es par un grand que je ne nommeray point pour l'amour de sa robe, et par une grande, l'une des belles dames de Rome, et tous repr?sent?s au vif, et peints au naturel.

--J'ay cogneu un prince de par le monde qui fit bien mieux, car il achepta d'un orfevre une tr?s-belle coupe d'argent dor?, comme pour un chef-d'oeuvre et grand sp?ciaut?, la mieux ?labour?e, grav?e et sigill?e qu'il estoit possible de voir, o? estoient taill?es bien gentiment et subtillement au burin plusieurs figures de l'Aretin, de l'homme et de la femme; et ce au bas estage de la coupe, et au dessus et au haut plusieurs aussi de diverses mani?res de cohabitations de bestes, l? o? j'appris la premi?re fois celle du lion et de la lionne, qui est toute contraire ? celle des autres animaux, que je n'avois jamais sceu, dont je m'en rapporte ? ceux qui le s?avent sans que je le die. Cette coupe estoit l'honneur du buffet de ce prince; car, comme j'ay dit, elle estoit tr?s-belle et riche d'art, et agr?able ? voir au dedans et au dehors. Quand ce prince festinoit les dames et filles de la Cour, comme souvent il les convioit, ses sommeilliers ne failloient jamais, par son commandement, de leur bailler ? boire dedans; et celles qui ne l'avoient jamais veue, ou en beuvant ou apr?s, les unes demeuroient estonn?es et ne s?avoient que dire l?-dessus: aucunes demeuroient honteuses, et la couleur leur sautoit au visage; aucunes s'entredisoient entr'elles: <> Mais il falloit qu'elles beussent l?, ou bien qu'elles esclatassent de soif; et, pour ce, aucunes fermoient les yeux en beuvant; les autres moins vergogneuses point; qui en avoient ouy parler du mestier, tant dames que filles, se mettoyent ? rire sous bourre; les autres en crevoient tout ? trac. Les unes disoient, quand on leur demandoit qu'elles avoient ? rire et ce qu'elles avoient veu, disoient qu'elles n'avoient rien veu que des peintures, et que pour cela elles n'y lairroient ? boire une autre fois. Les autres disoient: <> Les unes disoient: <> Les autres affermoient qu'il y faisoit aussi bon boire qu'en une autre coupe, et que la soif s'y passoit aussi bien. Aux unes on faisoit la guerre pourquoy elles ne fermoient les yeux en beuvant; elles respondoient qu'elles vouloient voir ce qu'elles beuvoient, craignant que ce ne fust du vin, mais quelque m?decine ou poison. Aux autres on demandoit ? quoy elles prenoient plus de plaisir, ou ? voir ou ? boire; elles respondoient: <> Les unes disoient: <> les autres: <> les unes disoient: <> les autres: <> les unes disoient: <> les autres disoient: <> Aux unes on demandoit si elles sentoient rien qui les picquast au mitan du corps pour cela: elles respondoient que nulle de ces drolleries y avoit eu pouvoir pour les picquer: aux autres on demandoit si elles n'avoient point senty le vin chaut et qu'il les eust eschauff?es, encore que ce fust en hyver; elles respondoient qu'elles n'avoient garde, car elles avoient beu bien froid, qui les avoit bien rafraischies: aux unes on demandoit quelles images de toutes celles elles voudroient tenir en leur lict; elles respondoient qu'elles ne se pouvoient oster de l? pour les y transporter. Bref, cent mille brocards et sornettes sur ce sujet s'entre-donnoient les gentilshommes et dames ainsi ? table, comme j'ay veu que c'estoit une tr?s-plaisante gausserie, et chose ? voir et ouyr; mais surtout ? mon gr?, le plus et le meilleur estoit ? contempler ces filles innocentes, ou qui feignoient l'estre, et autres dames nouvellement venues, ? tenir leur mine froide riante du bout du nez et des l?vres, ou ? se contraindre et faire des hypocrites, comme plusieurs dames en faisoient de mesme. Et notez que, quand elles eussent deu mourir de soif, les sommelliers n'eussent os? leur donner ? boire en une autre coupe ny verre. Et, qui plus est, aucunes juroient, pour faire bon minois, qu'elles ne tourneroient jamais ? ces festins; mais elles ne laissoient pour cela ? y tourner souvent, car ce prince estoit tr?s-splendide et friand. D'autres disoient, quand on les convioit: <> et quand elles y estoient, elles y beuvoient plus que jamais. Enfin elles s'y anez?rent si bien, qu'elles ne firent plus de scrupule d'y boire; et si firent bien mieux aucunes, qu'elles se servirent de telles visions en temps et lieu, et, qui, plus est, aucunes s'en d?bauscherent pour en faire l'essay; car toute personne d'esprit veut essayer tout. Voil? les effets de cette belle coupe si bien histori?e. A quoy se faut imaginer les autres discours, les songes, les mines et les paroles que telles dames disoient et faisoient entr'elles, ? part ou en compagnie. Je pense que telle coupe estoit bien diff?rente ? celle dont parle M. de Ronsard en l'une de ses premi?res odes, d?di?e au feu Roy Henry, qui se commence ainsi:

Comme un qui prend une couppe, Seul honneur de son tr?sor, Et de son rang verse ? la trouppe Du vin qui rit dedans l'or.

Mais en cette coupe le vin ne rioit pas aux personnes, mais les personnes au vin: car les unes beuvoient en riant, et les autres beuvoient en se ravissant; les unes se compissoient en beuvant, et les autres beuvoient en se compissant; je dis d'autre chose que du pissat. Bref, cette coupe faisoit de terribles effets, tant y estoient p?n?trantes ces visions, images et perspectives: dont je me souviens qu'une fois, en une gallerie du comte de Chasteauvilain, dit le seigneur Adjacet, une troupe de dames avec leurs serviteurs estant all?s voir cette belle maison, leur veue s'addressa sur de beaux et rares tableaux qui estoient en ladite gallerie. A elles se pr?senta un tableau beau, o? estoient repr?sent?es force belles dames nues qui estoient aux bains, qui s'entre touchoient, se palpoient, se manioient et frottoient, s'entre-mesloient, se tastonnoient, et, qui plus est, se faisoient le poil tant gentiment et si proprement en monstrant tout, qu'une froide recluse ou hermite s'en fust eschauff?e et esmeue; et c'est pourquoy une grande dame, dont j'ay ouy parler et cogneue, se perdant en ce tableau, dit ? son serviteur en se tournant vers luy, comme enrag?e de cette rage d'amour: <> Et ainsi partit, et alla avec son serviteur prendre de cette bonne eau qui est si douce sans sucre, que son serviteur lui donna de sa petite burette.

Telles peintures et tableaux portent plus de nuisance ? une ame fragile qu'on ne pense; comme en estoit un l? mesme d'une V?nus toute nue, couch?e et regard?e de son fils Cupidon; l'autre d'un Mars couch? avec sa V?nus, l'autre d'une L?da couch?e avec son cygne. Tant d'autres y a-t-il, et l? et ailleurs, qui sont un peu plus modestement peints et voilez mieux que les figures de l'Aretin; mais quasi tout vient ? un, et en approchant de nostre coupe dont je viens de parler, laquelle avoit quasi quelque sympathie, par antinomie, de la coupe que trouva Renault de Montauban en ce chasteau dont parle l'Arioste, laquelle ? plein descouvroit les pauvres cocus, et cette-cy les faisoit; mais l'une portoit un peu trop de scandale aux cocus et leurs femmes infid?les, et cette-cy point. Aujourd'huy n'en est besoin de ces livres ni de ces peintures, car les marys leur en apprennent prou: et voil? que servent telles escholes de marys.

--J'ai cogneu une fameuse courtisane ? Rome, dite la Grecque, qu'un grand seigneur de France avoit l? entretenue. Au bout de quelque temps, il luy prit envie de venir voir la France, par le moyen du seigneur Bonusi, banquier de Lyon, Lucquois tr?s-riche, de laquelle il estoit amoureux; o? estant elle s'enquit fort de ce seigneur et de sa femme, et, entr'autres choses, si elle ne le faisoit point cocu, <> Et disoit bien plus, que cette dame luy devoit faire un beau pr?sent et condigne de sa peine et de son sallaire, parce que, quand son mary vint ? son eschole premi?rement, il n'y s?avoit rien, et estoit en cela le plus sot, neuf et apprentif qu'elle vist jamais; mais elle l'avoit si bien dress? et fa?onn?, que sa femme devoit s'en trouver cent fois mieux. Et de fait cette dame, la voulant voir, alla chez elle en habit dissimul?, dont la courtisane s'en douta et luy tint tous les propos que je viens de dire, et pires encore et plus d?bord?s, car elle estoit courtisane fort d?bord?e. Et voil? comment les marys se forgent les couteaux pour se couper la gorge; cela s'entend des cornes; par ainsi, abusant du saint mariage, Dieu les punit; et puis veulent avoir leurs revanches sur leurs femmes, en quoy ils sont cent fois plus punissables. Aussi ne m'estonne-je pas si ce sainct docteur disoit que le mariage estoit quasi une vraye esp?ce d'adult?re: cela vouloit-il entendre quand on en abusoit de cette sorte que je viens de dire. Aussi a-t-on deffendu le mariage ? nos prestres; car, venant de coucher avec leurs femmes, et s'estre bien souill?s avec elles, il n'y a point de propos de venir ? un sacr? autel. Car, ma foy, ainsi que j'ay ouy dire, aucuns bourdellent plus avec leurs femmes que non pas les ruffiens avec les putains des bourdeaux, qui, craignant prendre mal, ne s'acharnent et ne s'eschauffent avec elles comme les marys avec leurs femmes, qui sont nettes et ne peuvent donner mal, au moins aucunes et non pas toutes; car j'en ai bien cogneu qui leur en donnent aussi bien que leurs marys ? elles. Les marys, abusans de leurs femmes, sont fort punissables, comme j'ay ouy dire ? de grands docteurs, que les marys, ne se gouvernans avec leurs femmes modestement dans leur lict comme ils doivent, paillardent avec elles comme avec concubines; n'estant le mariage introduit que pour la n?cessit? et procr?ation, et non pour le plaisir d?sordonn? et paillardise. Ce que nous sceut tr?s-bien repr?senter l'empereur Cejonius Commodus, dit autrement Anchus Verus, lorsqu'il dit ? sa femme Domitia Calvilla, qui se plaignoit ? luy de quoy il portoit ? des putains et courtisanes et autres ce qu'? elle appartenoit en son lict, et luy ostoit ses menues et petites pratiques: <> Je n'ay point encore leu ny trouv? la response que luy fit l? dessus madame sa femme l'imp?ratrice; mais il ne faut douter que, ne se contentant de cette sentence dor?e, elle ne luy respondit de bon coeur, et par la voix de la plus part, voire de toutes les femmes mari?es: <> Il ne faut non plus douter aussi que la plus part de nos mari?s aujourd'hui, et de tout temps, qui ont de belles femmes, ne disent pas ainsi; car ils ne se marient et lient, ny ne prennent leurs femmes, sinon pour bien passer leur temps et bien paillarder en toutes fa?ons, et leur enseigner des pr?ceptes, et pour le mouvement de leur corps, et pour les d?bord?es et lascives paroles de leurs bouches, afin que leur dormante V?nus en soit mieux esveill?e et excit?e; et, apr?s les avoir bien ainsi instruites et d?bausch?es, si elles vont ailleurs, ils les punissent, les battent, les assomment, et les font mourir. Il y a aussi un peu de raison en cela, comme si quelqu'un avoit d?bausch? une pauvre fille d'entre les bras de sa m?re, et lui eust fait perdre l'honneur de sa virginit?, et puis, apr?s en avoir fait sa volont?, la battre et la contraindre ? vivre autrement, en toute chastet?: vrayment! car il en est bien temps, et bien ? propos, qui est celuy qui ne le condamne pour homme sans raison et digne d'estre chasti?? L'on en deust dire de mesme de plusieurs marys, lesquels, quand tout est dit, d?bauschent plus leurs femmes, et leur apprennent plus de pr?ceptes pour tomber en paillardise, que ne font leur propres amoureux: car ils en ont plus de temps et loisir que es amans; et venans ? discontinuer leurs exercices, elles changent de main et de maistre, ? mode d'un bon cavalcadour, qui prend plus de plaisir cent fois de monter ? cheval, qu'un qui n'y entend rien.>>Et de malheur, ce disoit cette courtisane, il n'y a nul mestier au monde qui ne soit plus coquin, ny qui d?sire tant de continue, que celuy de V?nus.>> En quoy ces marys doivent estre avertis de ne faire tels enseignements ? leurs femmes, car ils leur sont par trop pr?judiciables; ou bien, s'ils voyent leurs femmes leur jouer un faux-bon, qu'ils ne les punissent point, puisque ?'ont est? eux qui leur en ont ouvert le chemin.

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