|
Read Ebook: Les Tourelles: Histoire des châteaux de France volume I by Gozlan L On
Font size: Background color: Text color: Add to tbrJar First Page Next Page Prev PageEbook has 945 lines and 75104 words, and 19 pagesSous la Fronde, le mar?chal d'Estr?es fit le si?ge du ch?teau de Coucy sans parvenir ? s'en rendre ma?tre, malgr? son vif d?sir de le remettre au roi. Il rentra cependant dans l'ob?issance quelques mois apr?s; Mazarin y envoya des ing?nieurs avec ordre d'en ruiner la tour et de la pulv?riser. Gr?ce ? un tremblement de terre arriv? en 1692, le ministre ?conomisa la moiti? de sa poudre. La commotion souterraine fut si violente, que les vo?tes de la plupart des appartemens s'?croul?rent; et quelles vo?tes que celles du ch?teau de Coucy! et que la grosse tour fut fendue comme une cloche de haut en bas. Mais toute fendue qu'elle est, depuis pr?s de deux si?cles, la tour de Coucy est encore debout pour un autre ministre ou pour un autre tremblement de terre. Si nous nous proposons d'apporter une soigneuse r?serve dans le nombre des monumens propres, selon nous, ? former notre mus?e, et cela de peur de surcharger une collection que rien ne nous assure devoir ?tre form?e, soit sur le plan qui concevrait Paris comme le centre voisin de tous les ch?teaux acquis ? cette collection, soit sur le plan ind?termin? qui n'aurait pas recours ? cette unit? difficile, nous ne disons pas impossible; si notre travail ainsi flottant se borne plut?t ? indiquer qu'? pr?ciser les ressources que, dans l'une ou l'autre adoption de plan, il serait loisible d'employer, nous saura-t-on gr? de mentionner les constructions f?odales du nord, fran?aises par la conqu?te seulement, dont l'Alsace est h?riss?e, depuis la plus haute jusqu'? la plus basse cr?te des Vosges? Quand la France conquit la Lorraine, la vie forte des possesseurs de ce pays f?cond et sauvage s'?tait perdue dans des luttes intestines, dans des morcellemens dont l'empire avait profit?, tant?t pour s'agrandir, tant?t pour isoler et par suite affaiblir la part de souverainet? de chaque prince feudataire. Foment?es par les ?v?ques, ces ?trangers ? tous les pays, les querelles locales n'avaient cess? de s'envenimer. Peu ? peu, toutes les ligues lorraines, autrefois si fertiles en grandes choses, furent bris?es ? coups de hache sur leurs rochers. Les plus formidables membres de ces associations, o? la noblesse de race donnait droit d'admission, mais o? la valeur personnelle seule savait maintenir, se r?fugi?rent sur des pics inaccessibles, au-dessus des nuages, partout enfin d'o? les pierres pouvaient rouler. Ortemberg et Ramstein sont plut?t des blocs de granit perc?s de trous que des demeures d'hommes. Charlemagne les a vus. Ce sont des g?ans en sentinelle ? l'entr?e du Val-de-Vill?; d?bris d'une civilisation p?trifi?e, ils sont l?, comme les fossiles rest?s apr?s le d?luge; ils font corps, ils forment ciment avec l'?ternit?. Pour Ramstein et Ortemberg, trois si?cles sont une date pu?rile, un souvenir d'hier. Leurs murs nous parlent, comme d'une bataille r?cente, du meurtre des vingt mille paysans r?volt?s en 1525, sous le duc Antoine de Lorraine, dit le bon duc. Jusqu'? la r?volution fran?aise, les chapelles annex?es autrefois ? ces deux ch?teaux ?taient pleines d'ossemens des pauvres paysans. Aujourd'hui ces os sont dispers?s dans les champs, les deux ch?teaux sont abandonn?s aux vautours, le duc est en oubli, mais la Lorraine est libre! Lorrains, baisez la poussi?re de ces os; ces paysans ?taient vos p?res, et ils vous ont faits libres. Graduellement, tous ces ch?teaux enclav?s dans la circonscription actuelle du haut et bas Rhin, Girbaden, Dreystein , Ringelstein, Hohenstein, ?taient devenus des fiefs un peu turbulens des ?v?ques de Strasbourg. Du haut de leur cath?drale, ils comptaient et surveillaient leurs bonnes tours alli?es; ils promenaient leur vue sur quarante lieues de ch?teaux forts, press?s comme des mamelons sur les montagnes, l'un regardant l'autre, celui-ci faisant retraite ? celui-l?, li?s trois par trois souvent, comme Dreystein, ou comme ces guerriers d'Ossian qui s'attachaient par le bras, afin de n'?tre pas moins braves dans l'ombre les uns que les autres; quarante lieues de ch?teaux! Enfin les bons ?v?ques planaient sur un si grand d?veloppement de murs que la science effray?e suppose que la longue cha?ne des Vosges ?tait nou?e de distance en distance, sur toute son ?tendue, par des fortifications militaires ant?rieures ? Attila. Chacun de ces ch?teaux, dont les d?bris se sont durcis en rochers, ?tait une vert?bre de cette ?pine. Ces innombrables ch?teaux forts ont ?t? rong?s par la mousse, par les pluies, par les temp?tes; l'orage leur enl?ve chaque hiver des tours ou des pans de murs de douze pieds d'?paisseur, et les roule comme des galets jusqu'au fond des vall?es. Beaucoup offrent de singuliers tableaux de ruine. Quelques-uns ont des ch?nes au sommet de leurs tours. Dans les appartemens du ch?teau de Spesbourg il a cr? des pins. D'autres, b?tis comme le ch?teau de Nideck, tout au bord d'une cascade ?cumante, apr?s avoir ?t? bris?s et d?fonc?s par les eaux, laissent depuis s'?couler le torrent par leurs portes et par leurs fen?tres. Mais, nous le r?p?tons, ces ch?teaux n'ayant de lien avec la France que par la conqu?te du sol o? ils s'appuient, leurs souvenirs sont pour nous d'un faible int?r?t national. Rien de ce qui s'y est pass? ne peut ?tre un sujet de noble regret ? ceux qui ne les ont m?me jamais entendu nommer. Aucune piti? ne les soutenant, ils tomberont, si ce n'est demain, ce sera dans mille ans; car ce qui cimente les monumens et les rend imp?rissables, ce n'est pas la chaux, ce n'est pas le fer, ce sont les croyances. Voil? l'ogive indestructible. Quelle ?poque! quelle ?poque! celle que cette tour rappelle ? notre honte et pour la gloire de cette vierge immortelle qui chassa l'Anglais. La seconde femme dont le nom a m?rit? de durer autant que les ?ternelles fondations de La Roche-Guyon, est la fille de Jean Bureau, chambellan du roi de France, veuve de Guy VI, tu? ? la bataille d'Azincourt. Tandis que Charles VI se laissait m?priser m?me au milieu de sa cour par les princes du sang, les Anglais s'emparaient du royaume par la force, par la ruse ou par la trahison. Le comte de Warwick assi?gea la fille de Jean Bureau dans le ch?teau de La Roche-Guyon; c'?tait en 1418. Somm?e de se rendre au roi Henri V, qui lui dit: < Est-ce que tout cela n'est pas de l'histoire, et de l'histoire grandement nationale, prise au coeur du pays, int?ressante pour ceux ? qui nos vieilles moeurs offrent un charme incomparable, et pour ceux qui veulent savoir par quels efforts chaque pouce du sol fran?ais a ?t? conquis, poss?d?, fertilis?, agrandi, d?fendu, r?gi, civilis?? Les ch?teaux sont les bornes militaires de la route des ?v?nemens. Une grosse tour, de profonds et larges foss?s, deux anciens b?timens autrefois li?s ? l'habitation principale, des ruines, des d?bris de chapelle, tels sont les morceaux pr?cieux de Boissy-le-Ch?tel, ch?teau fort du onzi?me si?cle. Boissy-le-Ch?tel offre quelque chose de plus remarquable encore que l'ogive de ses ouvertures, preuves incontestables de son ?ge, et que sa tour, sa chapelle et ses d?bris; c'est un propri?taire qui n'a pas sci? son ch?teau en trois traits, pour vendre le onzi?me si?cle au poids du plomb de goutti?res. Homme de go?t, il a fait relever les parties de Boissy susceptibles d'?tre r?par?es, et il a entour? d'un riant paysage ce grand a?eul de pierre. Voici une autre large assise historique ? ?tayer pour s'?lever ? l'intelligence exacte du treizi?me et du quatorzi?me si?cle. L'herbe et le sable la cachent; mais ?tez le sable et l'herbe, et le formidable ch?teau de Clisson montera dans la nue. Clisson a vu les croisades; les murailles, les tours et les fortifications sarrazines de Saint-Jean d'Acre et de Damiette ont servi de mod?le ? ses tours et ? ses murailles. L'architecture orientale, transport?e en France ? la suite des croisades, est la conqu?te la moins contest?e de ces pieuses migrations. Olivier Ier, sire de Clisson, le fit b?tir sur l'emplacement de celui qu'avaient occup? ses anc?tres; lequel n'avait ?t? que la r??dification d'un autre ch?teau fort, ?rig? dans le Bas-Empire et d?vast? par les invasions normandes entre le neuvi?me et le dixi?me si?cle. Clisson, c'est un labyrinthe dans un autre labyrinthe, dans un pays de for?ts, de rivi?res et de marais; c'est un serpent qui se replie trois ou quatre fois sur lui-m?me, et dont la t?te finit par ne plus trouver la queue. Il n'avait qu'une porte, comme l'enfer; mais des souterrains sans nombre, double enceinte de murailles, cuirasse de pierre sur cuirasse de pierre, triple foss?; apr?s un pont un autre pont, apr?s un second un troisi?me; des vo?tes sombres et des passages ?clair?s suspendus entre deux pr?cipices; et apr?s ces noirs foss?s, ces poternes b?antes, ces herses, ces ponts-levis, apr?s ce fer et ce granit, il ?treignait un duc de Bretagne incrust? au coeur de ce noyau. Confisqu? par Jean V, duc de Bretagne, le ch?teau de Clisson fut d?tach? de la famille de ce nom pour ?tre donn? soixante ans apr?s par le duc Fran?ois II ? Fran?ois d'Avaugour, son fils naturel. Il passa, par extinction de race, au prince Rohan de Soubise, puis au domaine de l'?tat en 1791, enfin ? la caisse d'amortissement, qui le vendit en 1807.--La caisse d'amortissement, c'est le minist?re de la bande noire. Chinon est en ruines! La premi?re mention historique qu'on en trouve date du si?ge que soutint ce ch?teau en 462, contre Agidius Afranius, g?n?ral romain. Chinon r?sista: jusqu'? la d?faite d'Alaric, il demeura en la possession des Visigoths; Clovis le recueillit comme un butin de la victoire. Charles-le-Simple mort, il passa ? Thibault-le-Vieux, comte de Blois et de Tours, regard? comme le v?ritable fondateur du ch?teau de Chinon par les additions consid?rables qu'il y fit. Les ruines actuelles sont celles du Chinon reb?ti par le comte de Blois; l'arch?ologie et l'histoire ?tant d'accord sur l'authenticit? de cette date de reconstruction du ch?teau, plus certaine de beaucoup que toutes les dates ant?rieures, nous avons d? nous en servir comme d'un point de d?part incontestable, et placer Chinon sous la race cap?tienne. En 1096, le pape Urbain II y rendit la libert? ? Godefroy-le-Barbu, que son fr?re Foulques-le-Rechin y retenait prisonnier depuis vingt ans; car il n'?tait de si beau ch?teau qui n'e?t sa prison, ses cha?nes de fer, ses souterrains pav?s de pointes et ses oubliettes. Ceci d?senchante l'imagination; pourtant on admettra la funeste opportunit? de ces destinations, si on n'a pas oubli?, comme je l'ai dit plus haut, que le ch?teau renfermait tout le syst?me social r?mun?rateur et p?nitentiaire. Quand il n'y avait ni maisons de d?tention, ni bagnes, il fallait bien que la justice e?t ses lieux de punition: les prisons ?taient dans les souterrains des ch?teaux. Chinon fut le tombeau d'Henri II, roi d'Angleterre, qui en avait h?rit? des comtes d'Anjou, ses anc?tres. Il y mourut de tristesse. Mourir de tristesse dans un ch?teau sur la Loire! il faut ?tre roi. < Ce bon pape ignorait que lorsqu'on broie les genoux aux hommes, ils ne marchent plus d'ordinaire. Tortur?s ? Chinon, le grand ma?tre et les commandeurs n'avaient gu?re la force d'aller ? Poitiers pour y ?tre condamn?s, et de Poitiers ? Paris pour y ?tre br?l?s. Ce bon Cl?ment V ?tait presque aussi simple que Philippe-le-Bel, qui se laissa mourir quarante jours apr?s le supplice de Jacques Molay. A quoi pensait-il donc? Il existe en France une province qu'on n'admirera jamais assez: parfum?e comme l'Italie, fleurie comme les rives du Guadalquivir, et belle en outre de sa physionomie particuli?re; toute fran?aise, ayant toujours ?t? fran?aise, contrairement ? nos provinces du nord, ab?tardies par le contact allemand, et ? nos provinces du midi, qui ont v?cu en concubinage avec les Maures, les Espagnols et tous les peuples qui en ont voulu. Cette province, pure, chaste, brave et loyale, c'est la Touraine. La France historique est l?. L'Auvergne est l'Auvergne; le Languedoc n'est que le Languedoc, mais la Touraine est la France; et le fleuve le plus national pour nous, c'est la Loire, qui arrose la Touraine. D?s lors on doit moins s'?tonner de la quantit? de monumens enferm?s dans les d?partemens qui ont pris le nom et les d?rivations du nom de la Loire. A chaque pas que l'on fait dans ce pays d'enchantement on d?couvre un tableau dont une rivi?re est la bordure, ou un ovale tranquille qui r?fl?chit dans ses profondeurs liquides un ch?teau, ses tourelles, ses bois ou ses eaux jaillissantes. Il ?tait naturel que l? o? vivait de pr?f?rence la royaut?, o? elle ?tablit si long-temps sa cour, vinssent se grouper les hautes fortunes, les distinctions de race et de m?rite, et qu'elles y ?levassent des palais grands comme elles. Que le ch?teau d'Uss? jaillirait plein de jeunesse et de fra?cheur du fond de ces t?n?bres, si nous retrouvions la chambre o? la dame aux belles cousines, ayant ? ses pieds le joli Saintr?, lui parla ainsi en plorant sur ses beaux cheveux: < Ensuite, du haut des tourelles, debout aupr?s de la dame aux belles cousines, nous poursuivrions notre jouvencel aux passes d'armes de Perpignan, o? il parut en pr?sence de toute la cour, < Qui ne conna?t la triste m?saventure amoureuse du pauvre et valeureux Saintr?, ? son retour en France, et comment il fut supplant? pendant son absence, dans le coeur de la dame aux belles cousines, par Damp Abbez? Saintr? se vengea. Il prit la dame par le toupet de son atour et haulsa la paulme pour lui donner une couple de soufflets; mais ? ce coup se retint, se contentant de percer de sa dague la langue et les deux joues de Damp Abbez . Nous ne d?ciderons pas entre tous ces t?moignages, et nous ne verrons d'historiquement vrai ? rattacher ? ce ch?teau que le s?jour de Vauban, dont la fille, nous l'avons d?j? dit plus haut, ?pousa Bernin de Valentinay, contr?leur-g?n?ral des finances. De nos jours, deux des plus remarquables ch?teaux historiques, Petit-Bourg et Maisons, appartiennent ? deux banquiers, MM. Aguado et Laffitte; et le plus remarquable de tous, le ch?teau de Mello, celui o? naquit la Jacquerie, appartient ?galement ? un banquier, M. Selli?re. Il me sera facile d'assigner quelque jour, lorsque j'aurai obtenu des relev?s plus g?n?raux, le petit nombre d'ann?es qui doit s'?couler pour que tous les ch?teaux historiques de la France soient exclusivement poss?d?s par des banquiers. Je r?p?te que cette substitution des familles d'argent aux familles de race date depuis plus de six si?cles. A six lieues de Tours, sur la grande route d'Angers, le Xe si?cle b?tit, sous les ordres de Foulques de Nerra, un ch?teau de Langeais, uniquement destin? ? couper toute communication entre Tours et les localit?s circonvoisines. Sur les ruines de ce ch?teau, Pierre de Brosse, fils d'un sergent ? masse de saint Louis, ministre et favori de Philippe-le-Hardi, en ?leva un autre du m?me nom; et c'est celui qui existe encore aujourd'hui. Ces r??difications, pour le dire en passant, ont plus souvent eu lieu pour les constructions militaires que pour les simples r?sidences seigneuriales. La raison de cette diff?rence est facile ? fournir. D'une utilit? reconnue, l'existence des ch?teaux forts se perp?tuait ? force de soins durant les guerres, et comme les guerres ?taient continuelles, ils ?taient toujours entretenus. Tel ch?teau fort a ?t? reconstruit jusqu'? six fois. Quoique les rois de France aient bien moins de combats ? livrer depuis la r?union des provinces de l'ouest ? la couronne, le royaume n'est pas encore aussi tranquille qu'il le sera dans deux si?cles, vienne Richelieu. Les ch?teaux sont soumis, mais les ch?telains, non; c'est la conqu?te, mais ce n'est pas encore la paix. Une esp?ce de compromis tacite se fait entre la f?odalit? encore mena?ante et la royaut? toute g?n?e dans sa victoire. S'il ne s'?l?ve plus autant de ces ch?teaux qui enserraient des bourgs dans leurs vastes ailes d?ploy?es, ceux qui avaient vomi la r?bellion du haut de leurs tours ne sont pas encore tomb?s. Les nouveaux qui seront b?tis pendant cette tr?ve transitoire participeront de cette double circonspection. Rien n'y manque: ni les triples foss?s, ni les ponts-levis, ni les tours; rien, si ce n'est une taille proportionn?e ? leurs pr?tentions. On dirait que la peur les a rabougris en leur laissant leurs formes offensives; petits bastions, petites oubliettes, petits foss?s. Ce sont des g?ans nains. Savigny est aujourd'hui ? l'h?riti?re d'un des plus beaux noms de l'empire, ? Mme la mar?chale Davoust, princesse d'Eckm?lh. Des ruines au milieu d'une for?t, de la solitude, de vieux ch?nes, des d?molitions abandonn?es, 1390 pour date, c'est-?-dire un souvenir de malheur pour la France, et de beaucoup de malheurs, car avec Charles VI r?gnaient le duc d'Orl?ans et le duc de Bourgogne, deux assassins tu?s l'un par le parti de l'autre; tel est Pierrefonds b?ti par le duc d'Orl?ans, fr?re de Charles VI, sur un des points ?lev?s de la for?t de Compi?gne. Les Anglais s'empar?rent de Compi?gne comme ils s'empar?rent dix fois de la France, ? la faveur des querelles des ducs avec les barons, et des comtes avec les rois. Si le go?t de Fran?ois Ier ?clate quelque part avec cette prodigalit? dont on s'?tonne, c'est assur?ment dans les ch?teaux tout pleins de ses amours, de ses intrigues, de ses magnificences, de ses chiffres et des travaux de ses artistes. Fran?ois Ier justifie sa haute renomm?e par l? bien plus encore que par ses pr?tendus encouragemens donn?s aux lettres. Trop souvent confondu avec L?on X, Fran?ois Ier fut le p?re des ch?teaux et non le p?re des lettres. On rattacherait ? ce groupe de pierres inoffensives, dont les ?chos dor?s n'?veillent que des noms de rois amoureux, de ma?tresses de rois et de ministres pacifiques, Vigny, beau ch?teau b?ti par le cardinal d'Amboise. Avant la r?volution, il appartenait au prince de Soubise, qui l'avait c?d? ? Mme de Gu?men?e. Il passa ? la famille de Rohan en 1822; il est aujourd'hui ? MM. Decher et Lef?vre, qui l'ont fait r?parer avec beaucoup de go?t. Si nous passons plus rapidement sur ces r?sidences que sur celles d'un ?ge plus ?loign?, dont il a ?t? fait mention au commencement de cet avant-propos, c'est que nous supposons le lecteur assez vers? dans notre histoire pour les appr?cier comme nous; et c'est aussi parce que leur ?tat de conservation n'imposerait pas de grands sacrifices ? l'?tat, s'il en devenait possesseur, que nous nous bornerons ? les classer, plut?t qu'? en d?tailler le m?rite incontest?. Ne suffit-il pas de nommer Chambord, Valen?ay et Chenonceaux, pour pr?senter ? l'esprit trois palais connus de tout le monde, et que toute nation s'honorerait de poss?der, quand m?me elle aurait d?j? Saint-Cloud, Fontainebleau et Versailles? Mesni?res soutient le parall?le avec Chenonceaux; m?me ordonnance, m?me grand go?t. Le propri?taire de Mesni?res, M. le marquis de Biancourt, est mort derni?rement; c'?tait un homme ?pris d'un v?ritable amour de l'art, et qui avait restaur?, pierre ? pierre, dans son vieux style et sa na?vet? premi?re, ce ch?teau, perle inestimable de la renaissance. Dans le voisinage de Chevreuse est Dampierre, ch?teau poss?d? autrefois par le cardinal de Lorraine et embelli par le duc de Luynes, dans la famille duquel il passa pour n'en plus sortir. Mansard l'a caract?ris? par la forme particuli?re de quelques additions de ma?onnerie assez estim?es. Nous n'osons renvoyer le lecteur ? notre histoire du ch?teau d'?couen, pour lui rappeler les principales sc?nes dont cette demeure des Montmorency fut le th??tre. D'ailleurs ?couen sort de notre cadre, puisqu'il fait partie des domaines royaux, ? la physionomie insaisissable et sans type, et n'a besoin, au surplus, pour ?tre ? l'abri de la d?molition, que de rester sous la protection conservatrice du jeune prince h?ritier des Cond?. Quoique aussi d?grad? et vermoulu que le cardinal Duprat, qui y finit ses jours d?test?s, le ch?teau de Nantouillet m?rite une place dans notre mus?e ? c?t? des plus gracieux monumens con?us sous le r?gne de Fran?ois Ier. Maisons-sur-Seine est ? M. Laffitte. Ce fut le surintendant des finances Ren? de Longueil qui fut charg? de sa construction; il fut achet?, je ne sais plus ? quelle ?poque, par M. Laffitte, banquier, qui l'a lou?, depuis plusieurs ann?es, ? un autre banquier, qui ne laisse voir ce ch?teau ? personne. Il y aurait une pu?rile affectation ? insister sur cette triple occupation de Maisons-sur-Seine par trois banquiers, si notre opinion que tous les ch?teaux vont t?t ou tard aux gens de finance n'?tait raffermie par le poids de cette observation m?me. CHANTILLY. Quoi qu'il en puisse ?tre, aujourd'hui que toutes ces gloires sont mortes, qu'il n'y a s?rieusement plus de cour ni de courtisans, de grand roi ? Versailles ou ? Trianon, de grand prince ? Chantilly, Chantilly n'est pas moins un lieu admirable de repos et de grandeur. On y respire une oisivet? noble, une paresse de h?ros. Les sens n'ont qu'? s'ouvrir. Tout y est paysage, lacs, gazons, solitude et parfums. Comment Le Sage a-t-il fait pour mourir au beau milieu de la for?t de Chantilly? --Monsieur aime ? relire ce nom grav? sur ce beau ch?ne? me dit-il. --C'est celui de Santeuil; j'ai plaisir ? le retrouver ici. --Je l'ai presque connu, M. Santeuil. --Vous avez presque connu M. Santeuil! Je n'ai jamais vu d'aussi vieux rentier que vous, monsieur, car vous ?tes rentier: il n'y a ? Chantilly que des rentiers et des tilleuls. --Vous ?tes ?tranger, je le vois ? votre m?prise. Mon habit devrait vous apprendre que je suis cadet. --Cadet? --Oui, pensionnaire de l'h?pital de Chantilly fond? par le grand Cond?;--sa grande ame soit en paix!--o? l'on n'entre qu'? soixante ans. Il y a trente ans que je suis cadet. C'est le titre qu'on donne aux pensionnaires. Add to tbrJar First Page Next Page Prev Page |
Terms of Use Stock Market News! © gutenberg.org.in2025 All Rights reserved.