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Read Ebook: Tableau historique et pittoresque de Paris depuis les Gaulois jusqu'à nos jours (Volume 1/8) by Saint Victor J B De Jacques Benjamin
Font size: Background color: Text color: Add to tbrJar First Page Next PageEbook has 8346 lines and 507435 words, and 167 pagesTABLEAU HISTORIQUE ET PITTORESQUE DE PARIS. IMPRIMERIE DE COSSON, RUE GARENCI?RE, N? 5. TABLEAU HISTORIQUE ET PITTORESQUE DE PARIS, DEPUIS LES GAULOIS JUSQU'? NOS JOURS. D?di? au Roi Par J. B. de Saint-Victor. TOME PREMIER.--PREMI?RE PARTIE. PARIS, LIBRAIRIE DE CHARLES GOSSELIN, RUE DE SEINE, N? 12. AVERTISSEMENT. Il y a plus de deux si?cles qu'on ?crit sur Paris et sur ses antiquit?s. Ce sujet a fait na?tre une foule d'ouvrages o? toutes les recherches semblent avoir ?t? ?puis?es; et cependant il restoit encore un bon livre ? faire sur cette cit? c?l?bre, un livre sinon plus savant, du moins plus utile et mieux con?u que tous ceux qui ont ?t? faits jusqu'? pr?sent. Paris peut ?tre consid?r? sous les rapports divers de ses antiquit?s religieuses, de ses institutions civiles et politiques, des r?volutions qu'il a ?prouv?es, des moeurs et des coutumes de ses habitants, des faits historiques dont il a ?t? le th??tre, des monuments des arts qu'il renferme, etc. L'ensemble de ces rapports dans ce qu'ils ont de plus curieux et de plus important peut seul constituer une description int?ressante d'une ville que tous les peuples de l'Europe, toutes les classes de la soci?t? sont avides de conno?tre; et jusqu'ici cependant aucun de ceux qui en ont ?crit l'histoire, ne l'a con?ue sur ce plan g?n?ral, n'en a m?me rempli quelques parties ? la fois d'une mani?re satisfaisante. L'un et l'autre manquoient de lumi?res et de critique. Un religieux b?n?dictin de Saint-Germain-des-Pr?s, dom Jacques du Breul, revit leur travail, consulta les titres, fit des recherches, corrigea leurs erreurs, et perfectionnant cette informe ?bauche, en fit un livre nouveau, qu'il fit paro?tre au commencement du dix-septi?me si?cle. On trouve dans cet ouvrage des renseignements pr?cieux, et qui ont ?t? d'une grande utilit? ? ceux qui ont ?crit apr?s lui: cependant, sans compter que Paris a enti?rement chang? de face depuis cette ?poque, son livre contient encore beaucoup d'erreurs, qu'il lui ?toit sans doute impossible d'?viter, parce que la mati?re ?toit trop vaste pour qu'un seul homme p?t d'abord tout d?brouiller et tout arranger. Ces premiers ouvrages donn?rent naissance ? des compilations, ? des abr?g?s plus ou moins m?diocres qui n'apprenoient rien de nouveau. Une dispute qui s'?leva quelques ann?es apr?s, entre deux savants, sur nos anciennes ?glises, sans ?claircir beaucoup la question qu'ils traitoient, r?pandit quelques nouvelles lumi?res sur les antiquit?s de Paris. Pendant ce temps, Henri Sauval, avocat au parlement, travailloit ? nous donner des connoissances plus exactes et plus ?tendues sur un sujet aussi important. Il recueillit, dans les d?p?ts publics et dans les archives particuli?res, une quantit? prodigieuse de documents et de titres sur l'?tat ancien et moderne de la ville de Paris, les lut, les d?pouilla avec une patience infatigable; mais n'eut ni le temps ni peut-?tre le talent de les mettre en ordre, de les comparer, de les v?rifier. Il en est r?sult? que son immense recueil n'est qu'un amas informe de mat?riaux confondus ensemble, et dont il est impossible d'user sans y apporter les plus grandes pr?cautions. Il est plein de r?p?titions, de d?tails fatigants, de trivialit?s, inexact dans les faits, peu judicieux dans les r?flexions; et ses erreurs sur une foule de mati?res, principalement sur l'appr?ciation des monuments, sont telles, qu'elles seroient insupportables aujourd'hui aux personnes m?me les moins ?clair?es. Nous ne parlerons point de Piganiol de la Force, le compilateur peut-?tre le plus ennuyeux, le plus d?pourvu de discernement et de go?t, parmi tous ceux qui ont entrepris de faire l'inventaire des monuments de Paris, de ses rues, et des curiosit?s dont il est rempli. Il n'est presque rien dans son livre qu'on ne trouve ailleurs plus exactement pr?sent? et plus clairement d?crit. Toutefois ici finit la liste des ?crivains qu'il nous est permis de citer. Apr?s eux viennent en foule des compilateurs sans jugement, sans go?t, d?pourvus de toute critique, qui ramassent indistinctement tout ce qu'ont recueilli leurs devanciers, et en composent des rapsodies, dont pas une ne m?rite m?me l'honneur d'?tre nomm?e. Nous ne craignons donc pas de le dire, il n'existe pas encore un seul ouvrage o? Paris soit consid?r? sous tous les rapports qui peuvent le faire bien conno?tre; o? la description de ses monuments soit accompagn?e d'une critique judicieuse sur leur v?ritable m?rite; o? les faits historiques, se liant aux peintures de moeurs, soient pr?sent?s dans cette juste mesure qui les rend curieux et attachants. On ne trouve dans aucun une marche claire et m?thodique; aucun n'a donn? un tableau complet et bien ordonn? des diverses r?volutions que cette ville c?l?bre a ?prouv?es. Ce qu'ils n'ont point fait nous avons essay? de le faire: voici donc le plan que nous nous sommes trac?, et qu'autant qu'il est en nous, nous nous sommes efforc?s de remplir. Adoptant une division depuis long-temps consacr?e, nous avons partag? en ses vingt quartiers la ville immense que nous avions ? d?crire; passant de l?, et dans un ordre ?galement consacr? ? la description particuli?re de chacun de ces quartiers, nous en avons d'abord pr?sent? le tableau topographique, puis nous avons indiqu? les accroissements qu'il a pu successivement recevoir. Viennent ensuite les institutions et les monuments, dans lesquels ce qui est religieux pr?c?de, autant qu'il est possible, ce qui n'est que civil et politique; de m?me que les origines et les antiquit?s sont discut?es et expliqu?es avant que nous traitions de ce qui touche les productions des beaux-arts et les autres objets de d?tail purement mat?riels; et ces objets, dont l'importance sans doute est beaucoup moindre, sans ?tre s?par?s de l'historique du monument ou de l'institution ? laquelle ils appartiennent, y re?oivent une place et un classement tout particulier. Par un semblable motif, tout ce qui concerne les rues, les places publiques, leurs origines et leurs ?tymologies, est rejet? ? la fin de chaque division; et l?, rang? suivant l'ordre alphab?tique, peut y ?tre ou lu ou simplement consult?. Au milieu de tant de descriptions et de r?cits divers qui se suivent ainsi , sans embarras et sans confusion, nous avons introduit, lorsqu'il nous a sembl? convenable de le faire et que l'occasion s'en est naturellement pr?sent?e, des dissertations g?n?rales sur plusieurs points les plus int?ressants de nos anciennes traditions, tels que l'origine des ?glises et des monast?res, celles des confr?ries, des corps de m?tiers, de l'universit?, des parlements, etc, etc. Ce plan a obtenu les suffrages du public; on a de m?me approuv? le parti que nous avons pris de faire une simple ?num?ration des innombrables productions des arts dont jadis ?toient orn?s les ?glises et autres monuments que nous avons d?crits, indiquant ensuite dans des notes plus ou moins ?tendues, celles qui m?ritoient d'?tre remarqu?es, soit par l'excellence de l'ex?cution, soit par quelque singularit? ou circonstance particuli?re qui pouvoit leur donner une sorte d'int?r?t. C'?toit en effet le seul moyen de ne rien oublier et cependant de ne rien confondre; d'?viter l'examen fastidieux et la critique fatigante de tant de peintures et sculptures, ou mauvaises ou du moins m?diocres, et par cons?quent au-dessous de toute critique et de tout examen; et au milieu de cet amas d'objets si peu dignes d'occuper le lecteur, de lui faire distinguer nettement et promptement ce qui devoit arr?ter sa pens?e et ses regards. Nous ne craignons pas de dire que rien n'a plus contribu? que cette disposition si simple, si facile, et que cependant aucun historien de Paris n'avoit imagin?e avant nous, ? r?pandre l'ordre et la clart? dans ce qui n'avoit ?t? jusqu'alors que d?sordre et confusion. Au reste, nous ne nous ferons point un m?rite d'avoir mieux appr?ci? ces productions des arts que nos devanciers; sur ce point tout ?toit ? faire: les plus habiles eux-m?mes n'y entendoient rien; les autres ont servilement copi? ce qui avoit ?t? ?crit avant eux; et de tous les jugements qui ont ?t? port?s sur un si grand nombre de statues, de tableaux, de monuments d'architecture, il n'en ?toit peut-?tre pas un seul qui ne f?t ? r?former. Ce n'?toit point encore assez: un ouvrage du genre de celui-ci devient, presque ? chaque page, obscur et quelquefois inintelligible, s'il n'est accompagn? de cartes, de plans, de vues perspectives qui, au milieu de tant de descriptions purement mat?rielles, font saisir aux yeux ce que la parole est souvent impuissante ? exprimer, et en sont alors l'indispensable compl?ment. Sous ce rapport, notre premi?re ?dition ne laissoit rien ? d?sirer: elle ?toit enrichie d'une collection de trois cents planches ou vignettes, qui offroient non-seulement la topographie compl?te de Paris dans tous ses d?tails, ? toutes ses ?poques et avec tous ses d?veloppements, mais encore tous ses monuments actuellement existants, tous ceux que la r?volution a d?truits, tous ceux qui n'existoient d?j? plus avant cette ?poque d?sastreuse, et dont quelques traces nous ont ?t? conserv?es, ou dans des gravures extr?mement rares, ou dans des dessins in?dits. Cette collection pr?cieuse et jusqu'? pr?sent unique en son esp?ce, ?toit jointe au texte de cette premi?re ?dition: elle accompagne la seconde dans un atlas in-4?, o? elle a ?t? arrang?e dans l'ordre le plus m?thodique, chaque planche portant un num?ro qui correspond exactement aux renvois indiqu?s dans le texte. DISCOURS PR?LIMINAIRE. On a vu de puissants monarques, conqu?rants ou l?gislateurs, ?lever tout ? coup des villes superbes, et depuis devenues fameuses, soit qu'ils fussent s?duits par les avantages que pr?sentoient les lieux pour y ?tablir le centre de leur gouvernement, soit qu'ils n'eussent d'autres vues que celle de donner un nouvel ?clat ? leur nom en l'attachant ? d'aussi grands monuments. L'antiquit? nous offre plusieurs exemples de ces prodigieuses entreprises: c'est ainsi que furent fond?es Alexandrie et Constantinople; et le commencement du si?cle dernier fut surtout m?morable par l'ex?cution hardie d'un semblable projet. Un souverain l?gislateur, sous le ciel le plus rigoureux, et au milieu d'un marais jusqu'alors impraticable, jeta les fondements d'une ville qui, dans moins de cinquante ans, s'est couverte de palais magnifiques, de monuments publics d'une grandeur toute royale, et qui d?j? rivalise en ?tendue et en beaut?, avec les villes les plus florissantes de l'Europe. Mais de tels ?v?nements sont rares, et les capitales des empires n'ont point ordinairement des commencements aussi illustres. Dans l'origine des soci?t?s, un concours de circonstances fait que telle ville, qui d'abord n'?toit ni plus puissante ni plus remarquable que celles qui l'environnoient, remporte sur ses voisins des avantages qui lui en assujettissent plusieurs; ou, par sa position, semble offrir une retraite plus s?re au premier conqu?rant qui s'?l?ve au milieu de ces petites peuplades barbares. L'?tat s'agrandit, et ses richesses s'accumulent dans cette ville; les ressorts du gouvernement se multiplient; des communications s'?tablissent avec les peuples polic?s; l'opulence fait na?tre le luxe, et le luxe appelle les arts; la population s'accro?t, les moeurs se polissent, les monuments s'?l?vent: alors la grande cit?, parvenue ? son dernier degr? de splendeur, d?cline insensiblement par ce retour in?vitable des choses d'ici-bas, et finit par des ruines apr?s avoir commenc? par des cabanes. Cependant, lorsque le g?n?ral romain vint dans les Gaules, cette capitale des Parisiens n'?toit encore qu'un amas de ch?tives cabanes renferm?es dans une ?le au milieu de la Seine. Cette ?le, connue aujourd'hui sous le nom de quartier de la Cit?, communiquoit avec la terre ferme au moyen de deux ponts de bois. Les deux rives du fleuve, maintenant couvertes d'?difices somptueux, et d'une population si nombreuse et si anim?e, n'?toient alors que d'affreuses for?ts, qu'entouroient des marais f?tides, et dont les solitudes ?toient consacr?es ? des divinit?s sanguinaires. Car les anciens Gaulois n'avoient point de temples, et ils ne commenc?rent ? en b?tir que sous la domination des Romains. Des bois obscurs et myst?rieux ?toient les sanctuaires redoutables des dieux qu'ils adoroient; et ces horribles enceintes furent souvent arros?es de sang humain par leurs druides. Les Parisiens ont ?t? c?l?bres parmi les peuples de leur nation pour leur courage et leur haine de toute domination ?trang?re; et lorsque C?sar, ma?tre d'une grande partie des Gaules, voulut subjuguer leur ville capitale, son lieutenant Labi?nus, qu'il avoit charg? de cette exp?dition, y trouva une r?sistance ? laquelle il ne s'attendoit pas: ces braves insulaires, craignant d'?tre forc?s dans leur retraite, prirent la r?solution h?ro?que de mettre le feu ? leurs habitations, et march?rent au-devant de l'ennemi, sous la conduite de Camulog?ne, vieux guerrier plein de bravoure et d'exp?rience. Le Romain, aussi courageux et plus habile, les trompa par une fausse marche, prit une position avantageuse dans la plaine qui est au-dessous de Meudon, et l? les for?a ? recevoir la bataille. La victoire y fut long-temps disput?e, et ce peuple s'y d?fendit avec une opini?tret? qui tenoit du d?sespoir; mais enfin la valeur aveugle fut forc?e de c?der au courage soutenu de la science militaire. Les Parisiens furent vaincus, le plus grand nombre y perdit la vie, et Camulog?ne justifia leur choix en p?rissant avec eux. C?sar, ma?tre de Paris, ordonna aux Gaulois de le reb?tir; et consid?rant la situation avantageuse de cette ville au milieu d'un fleuve qui s?paroit la Gaule celtique de la Belgique, situation qui pouvoit en faire un point de jonction tr?s-avantageux pour les deux provinces, s'il leur prenoit envie de se r?volter; n'ayant point oubli?, d'ailleurs, la r?sistance vigoureuse que lui avoient oppos?e ses premiers habitants, il r?solut de la faire entourer de murailles, de la fortifier, et d'y entretenir continuellement une garnison romaine. Il l'embellit en outre d'une grande quantit? d'?difices, et la remit dans un ?tat tellement florissant, que, peu de temps apr?s, elle put secouer le joug, pour entrer dans la ligue des villes qui se r?unirent au fameux Vercingetorix, dans l'espoir d'affranchir les Gaules du pouvoir de l'?tranger. C?sar, qui, depuis sa premi?re conqu?te, ne parle que cette seule fois de la ville de Paris, dit qu'elle envoya huit mille hommes ? l'assembl?e des peuples conf?d?r?s. Ce fut l?, comme on sait, le dernier effort des Gaulois pour la libert?; et la d?faite de leur innombrable arm?e sous les murs d'Alexia les assujettit sans retour aux Romains. Jusqu'au r?gne de Clovis, les rois francs, possesseurs d'une partie des Gaules qu'ils avoient envahie, n'avoient point encore ?tendu leur domination jusqu'au territoire et ? la ville de Paris: ce prince, que l'on doit consid?rer comme le v?ritable fondateur de la monarchie fran?aise, fut le premier qui s'en rendit ma?tre; et il en fit la capitale de son empire. Mais ce fut dans le palais des empereurs qu'il ?tablit sa r?sidence, et non dans l'int?rieur de la cit?, car les Francs avoient un grand m?pris pour ceux qui habitoient les villes. Ce m?pris qui tenoit ? leurs moeurs, le pr?jug? national qui les portoit ? n'honorer aucune autre profession que celle des armes, les d?vastations qu'ils commirent en p?n?trant dans le pays conquis, les guerres sanglantes que Clovis fut forc? d'entreprendre et de soutenir pour former son ?tablissement, le partage de ses conqu?tes apr?s sa mort, et les nouvelles capitales que fit na?tre cette division impolitique, toutes ces causes r?unies emp?ch?rent Paris de s'agrandir sous la premi?re race. Sous la seconde, on le voit presque abandonn?: P?pin, Charlemagne, Louis-le-D?bonnaire, Charles-le-Chauve n'y demeur?rent qu'en passant; et vers la fin de cette ?poque fatale, cette ville, assi?g?e sans cesse par les Normands, se trouva r?duite, par la d?vastation et l'incendie de ses faubourgs, ? cette enceinte entour?e d'eau, qui avoit ?t? l'habitation des premiers Gaulois. Cependant de nouveaux faubourgs s'?toient form?s hors des murs. Les guerres d?sastreuses qui survinrent avec les Anglais, ? qui leurs possessions sur le continent donnoient la facilit? de p?n?trer jusque dans le coeur du royaume, et d'en insulter ? tous moments la capitale, oblig?rent de pourvoir ? la s?ret? tant de la ville que des dehors. Les conjonctures dans lesquelles on se trouvoit ?toient si pressantes, que d'abord on se contenta de creuser autour une double enceinte de foss?s. Charles V, parvenu au tr?ne, ordonna bient?t une nouvelle cl?ture du c?t? de la ville, depuis le bord de la rivi?re o? est maintenant l'Arsenal, jusqu'au-del? du Louvre, et les derniers faubourgs furent renferm?s dans cette seconde enceinte. Ces nouveaux accroissements oblig?rent de b?tir deux autres ponts, pour la communication des quartiers. ENCEINTES DE PARIS. Dans l'origine, l'?le de la Cit? n'?toit, selon Julien, environn?e d'aucune muraille: < On croit que ce fut seulement vers le quatri?me si?cle qu'une enceinte fut ?lev?e; en 885, lors du si?ge fait par les Normands, on d?fendit cette enceinte par quelques fortifications. < Les choses ?toient en cet ?tat, lorsque Philippe-Auguste forma le projet vraiment royal de renfermer dans une nouvelle enceinte tous les bourgs, toutes les cultures ?parses autour de l'ancienne ville, et de faire ainsi de Paris une des plus grandes et des plus belles villes du monde. Cette entreprise co?ta vingt ans de travaux continuels; car non seulement on ?leva une muraille du c?t? du nord, mais encore les maisons qui, au midi, ?toient ?parses autour du petit Ch?telet, furent pour la premi?re fois environn?es d'une enceinte. Du c?t? de la rivi?re, au midi, l'autre moiti? de cette enceinte, qui commen?oit ? la porte Saint-Bernard, est ? peu pr?s trac?e par les rues des Foss?s-Saint-Bernard, des Foss?s-Saint-Victor, des Foss?s-Saint-Michel ou rue Saint-Hyacinthe, des Foss?s-M.-le-Prince, des Foss?s-Saint-Germain ou rue de la Com?die Fran?aise, et des Foss?s-de-Nesle, ? pr?sent rue Mazarine. Il y avoit sept portes dans ce circuit: la porte Saint-Bernard ou de la Tournelle; les portes Saint-Victor, Saint-Marcel et Saint-Jacques; la porte Gibard, d'Enfer ou de Saint-Michel, au haut de la rue de la Harpe; la porte de Buci, au haut de la rue Saint-Andr?-des-Arcs, vis-?-vis de la rue Contrescarpe; et la porte de Nesle, o? est ? pr?sent le coll?ge des Quatre-Nations. Dans la rue des Cordeliers, il y eut encore une porte appel?e la porte Saint-Germain; et lorsque la rue Dauphine fut b?tie, on en fit une vis-?-vis de l'autre bout de la rue Contrescarpe, et qu'on appela la porte Dauphine. Un devis extrait d'un registre de Philippe-Auguste nous apprend que la partie m?ridionale de l'enceinte avoit 1260 toises d'?tendue, et qu'elle avoit co?t? 7020 livres, monnoie du temps. La seule addition qui fut faite alors aux fortifications de Paris fut la construction d'un rempart qui commen?oit au bord de la rivi?re, au-dessous de la Bastille, et se prolongeoit jusqu'au del? de la porte Saint-Antoine. Fran?ois Ier avoit d?j? tent? plusieurs fois ce travail, lorsque les guerres qu'il avoit ? soutenir contre l'empereur lui faisoient craindre que les arm?es d'Allemagne, qui venoient jusqu'en Picardie, n'insultassent sa capitale; et il ne l'avoit point achev?. Cette fortification, plus solidement construite que les autres, subsistoit encore dans ces derniers temps. C'?toit une courtine flanqu?e de bastions, et bord?e de larges foss?s ? fond de cuve. QUARTIERS DE PARIS. Voici les vingt quartiers de Paris dans l'ordre o? les a ?tablis la d?claration du roi. TABLEAU HISTORIQUE ET PITTORESQUE DE PARIS. QUARTIER DE LA CIT?. Ce quartier comprend les ?les du Palais, de la Cit?, Saint-Louis et Louvier, depuis la pointe orientale de l'?le Louvier jusqu'? la pointe occidentale de l'?le du Palais, avec tous les ponts qui y aboutissent, y compris la cul?e du pont au Change. PARIS SOUS LES DEUX PREMI?RES RACES. Ceux qui n'ont point assez p?n?tr? dans l'histoire des modernes habitants des Gaules, s'?tonneront sans doute que la ville capitale d'un aussi grand royaume que la France, ait ?t? pendant une si longue suite de si?cles dans un tel ?tat de foiblesse et de mis?re, que, loin de prendre de l'accroissement, on la voit au contraire devenir, ? certaines ?poques, plus mis?rable encore qu'elle n'avoit ?t?. Ils ne s'?tonneront pas moins de la voir sortir tout ? coup de cette d?tresse et de cette obscurit?, s'accro?tre par des degr?s tr?s-rapides, et s'embellissant plus lentement d'abord, devenir enfin, sous un petit nombre de rois, la premi?re et la plus belle des cit?s. Ces deux diff?rents ?tats, dont le brusque passage est si remarquable, s'expliquent facilement par le changement qui se fit, au commencement de la troisi?me race, dans le gouvernement de la monarchie fran?oise, changement dont l'effet fut de faire passer cette monarchie, de l'?tat de soci?t? domestique que les vainqueurs y avoient jusqu'alors, et pour ainsi dire, exclusivement maintenu, ? l'?tat de soci?t? politique qui avoit ?t? celui des Gaules sous la domination romaine; de faire enfin triompher le gouvernement monarchique de la police f?odale, qui, ? quelques variations pr?s, avoit ?t?, sous les deux premi?res races, le droit public de l'Europe enti?re. Si l'on veut en trouver la v?ritable origine, ce n'est point ? l'invasion des Francs qu'il convient de s'arr?ter: il faut aller la chercher jusque sous les empereurs, et remonter m?me jusqu'aux temps qui ont pr?c?d? l'?tablissement du christianisme comme religion dominante de l'?tat. En effet nous trouvons dans Lampride et Vopiscus qu'Alexandre S?v?re, Aur?lien et Probus donn?rent aux ducs et aux soldats des fronti?res, des champs et des maisons dans les pays conquis sur l'ennemi. Ces terres ainsi conc?d?es ?toient ordinairement situ?es sur le bord des fleuves ou entre les montagnes qui servoient de limites; on y joignit des esclaves et les animaux n?cessaires ? l'exploitation; et la propri?t? enti?re en fut accord?e ? ceux qui les re?urent, sous la condition expresse que les h?ritiers se consacreroient comme les p?res au service militaire, et que jamais des personnes priv?es ne pourroient poss?der ces terres ni par succession ni par contrat de vente. Arr?tons-nous ici un moment; il ne peut plus y avoir d'incertitude sur l'origine des fiefs: elle est toute romaine, et les monumens qui nous attestent cette origine sont irr?cusables. Mais si, de ces documents que nous offre l'histoire, nous nous ?levons ? des consid?rations d'un autre ordre sur les causes qui amen?rent de tels changements dans l'administration des principales provinces de l'empire, il nous sera facile de reconno?tre que ces changements ?toient la suite n?cessaire et in?vitable de la situation o? se trouvoit alors le pouvoir politique; et que, dans cette situation presque d?sesp?r?e, il sut habilement saisir le seul moyen de salut qui lui rest?t et le seul en m?me temps qui p?t sauver la soci?t?. Mais les barbares succ?doient aux barbares; ils se pr?cipitoient en quelque sorte les uns sur les autres, avides d'une si riche proie; et ce syst?me de d?fense, qui long-temps arr?ta leurs continuels efforts, ne put emp?cher ce torrent de se d?border enfin de toutes parts sur ces provinces malheureuses. Ce fut au cinqui?me si?cle que se fit l'irruption la plus terrible de ces f?roces sauvages du Nord; et l'histoire nous en pr?sente le souvenir comme celui de la plus effroyable calamit? qui ait jamais d?sol? les peuples. Mais des irruptions partielles avoient pr?c?d?, et ? diverses reprises, ce d?bordement g?n?ral; et une fois entr?es sur la terre de la civilisation, ces hordes n'en sortoient que tr?s-rarement: il falloit les y ?tablir ou les exterminer. Lorsqu'elle jugea impossible de les vaincre, la politique des empereurs chercha donc ? se les attacher; et ainsi que nous l'avons d?j? dit, cr?ant pour eux des fiefs dans les pays dont ils s'?toient empar?s, et par ce moyen opposant barbares ? barbares, elle essaya de se faire des d?fenseurs nouveaux de ses plus redoutables ennemis. Ainsi s'explique ce qu'on appelle l'usurpation des maires du palais sous la premi?re race et celle des comtes de Paris sous la seconde: les deux races ?toient tomb?es dans le m?pris. Sous des princes foibles s'?toient ?lev?s des chefs guerriers devenus par leurs hautes qualit?s des objets d'estime, d'attachement et d'esp?rance pour une nation toute guerri?re: elle choisit pour la commander celui qui lui sembla le plus digne; et en rejetant de m?me qu'en rempla?ant des races d?g?n?r?es, ni la nation qui choisissoit le nouveau roi, ni les chefs qui avoient dirig? et confirm? son choix, ne pensoient avoir commis une action coupable devant Dieu et devant les hommes. Il n'est rien de plus d?raisonnable que cette disposition qui nous porte ? juger les si?cles pass?s avec les id?es et d'apr?s les lois, les coutumes et les pr?jug?s du si?cle o? nous vivons, rien qui indique davantage une profonde ignorance et les vues ?troites de l'esprit: c'est l? une des principales sources de tant d'erreurs et d'absurdit?s dont se compose la politique des sophistes de nos jours. Add to tbrJar First Page Next Page |
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