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Munafa ebook

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Ebook has 761 lines and 40453 words, and 16 pages

LES CONTEMPORAINS

?tudes et portraits litt?raires

JULES LEMA?TRE

Premi?re s?rie

Th?odore de Banville Sully-Prudhomme Fran?ois Copp?e ?douard Grenier Madame Adam Madame Alphonse Daudet Ernest Renan Ferdinand Bruneti?re ?mile Zola Guy de Maupassant J.-K. Huysmans Georges Ohnet

Paris Librairie H. Lec?ne et H. Oudin 17, Rue Bonaparte, 17

J. L.

LES CONTEMPORAINS

TH?ODORE DE BANVILLE

M. Th?odore de Banville est un po?te lyrique hypnotis? par la rime, le dernier venu, le plus amus? et dans ses bons jours le plus amusant des romantiques, un clown en po?sie qui a eu dans sa vie plusieurs id?es, dont la plus persistante a ?t? de n'exprimer aucune id?e dans ses vers.

Son meilleur titre de gloire, c'est d'avoir repris, perfectionn? et baptis? <>. C'?tait, assur?ment une id?e: et l'on peut dire que toutes les autres id?es de M. de Banville d?rivent de celle-l? ou s'y rattachent.

Lui-m?me a d?fini l'ode funambulesque <>

Notons d?s maintenant que toute la po?tique de M. de Banville est implicitement contenue dans cette d?finition. Pour lui, m?me dans la po?sie s?rieuse, c'est uniquement par des arrangements de mots que <>, non par la qualit? des id?es ou des sentiments, ni m?me par le mouvement de la phrase ou par le choix des mots consid?r?s en dehors de <>. Ou, s'il repousse peut-?tre ces cons?quences extr?mes, tout au moins la rime, ses pompes et ses oeuvres, ses ?clats, ses entrelacements et ses surprises, c'est-?-dire la forme du vers dans ce qu'elle a de plus sp?cial, dans ce qui la distingue express?ment de la prose, est bien pour lui l'essentiel de la po?sie, et la po?sie m?me. Th?orie louche qui fuit et se d?robe quand on essaie de la pr?ciser. Mais, si la th?orie est obscure, la tendance est assez claire.

L'effet est donc produit d'abord par ce sentiment de disproportion et de disconvenance g?n?rale; mais il est vrai que, chez M. de Banville, il tient peut-?tre encore plus ? la forme m?me, au rythme, ? la rime, aux mots.

Il provient souvent d'hyperboles d?mesur?es :

Le mur lui-m?me semble enrhum? du cerveau. Bocage a pass? l?. L'Od?on, noir caveau, Dans ses vastes dod?ca?dres Voit verdoyer la mousse. Aux fentes des pignons Pourrissent les lichens et les grands champignons, Bien plus robustes que des c?dres...

--ou d'une mac?doine d'id?es, d'images, de noms propres ?tonn?s de se voir ensemble:

Tobolsk, la rue aux Ours qui n'a pas de Philistes, L'enfer o? pleureront les mat?rialistes, La Thrace aux vents glac?s, les monts Himala?a, L'h?tel des Haricots, Saint-Cloud, Batavia, Mourzouk o? l'on r?tit l'homme comme une dinde, Les mines de Norv?ge et les grands puits de l'Inde, Asile du serpent et du cam?l?on, L'Etna, Botany-Bay, l'Islande et l'Od?on Sont des Edens charmants et des pays de Tendre ? c?t? de l'endroit o? nous allons nous rendre...

--ou du m?lange audacieux de toutes les langues, de celle des po?tes lyriques, de celle des bourgeois, de celle des boulevardiers et de beaucoup d'autres:

Ami, n'emporte plus ton coeur dans une orgie; Ne bois que du vin rouge, et surtout lis Balzac. Il fut sup?rieur en physiologie Pour avoir bien connu le fond de notre sac...

--ou de bouffonneries aboutissant ? un vers grave et d'allure p?dantesque :

Oui, je parle ? pr?sent. Je fume des londr?s. Tout comme Bossuet et comme Gil-P?r?s, J'ai des transitions plus grosses que des c?bles, Et je dis ma pens?e au moyen des vocables...

--ou de la dignit? d'une p?riphrase d?guisant une locution triviale:

Ah! pour te voir tordu par ce rire usit? Chez les hommes qu'afflige une gibbosit?, Parle, que veux-tu? Dis-le vite!...

--ou bien enfin de tous ces artifices r?unis, sans compter ceux que j'oublie.

Mais ce qui soutient, double et triple tous ces effets comiques, c'est la rime, somptueuse, impr?vue, retentissante, fantastique.

L'autre esp?ce de rime que M. de Banville affectionne, c'est celle qui tombe sur des pr?positions, des pronoms relatifs ou des adjectifs possessifs. Cette rime est comique parce qu'elle impose au lecteur une prononciation anormale, parce qu'elle le contraint ? mettre un accent tr?s fort sur des syllabes non accentu?es et ? donner, dans la phrase m?lodique, une grande importance ? des mots qui n'en ont aucune dans la phrase grammaticale:

La seconde <> de M. de Banville, ?'a ?t? de ressusciter les anciens petits po?mes ? forme fixe, le triolet, le rondeau , le rondel, la ballade, le dizain marotique, m?me la double ballade, la villanelle, le virelai et le chant royal. Du moment qu'il ?tait n? ou qu'il s'?tait fait servant de la rime et son homme-lige, il ?tait in?vitable qu'il nous rend?t ces bagatelles compliqu?es, d'une sym?trie difficile, minutieuse et quelque peu enfantine et barbare, o? la rime est en effet reine, ma?tresse et g?n?ratrice.

Pour moi, je ne m'en plains pas; mais il est certain que ces tentatives peuvent ?tre appr?ci?es fort diversement. La rime a un charme propre et qui se suffit: on le voit par certaines chansons populaires et par ces rondes d'enfants o? il n'y a que des assonances et aucune id?e suivie. Ceux qui sentent profond?ment ce charme aimeront ces bijoux po?tiques o? un go?t raffin?, une gr?ce moderne peut se m?ler aux complications sauvages de la forme. Mais les honn?tes gens n?s prosateurs n'y comprendront jamais rien et il se trouvera m?me, je crois, des po?tes authentiques qui, tout en s'expliquant la pr?dilection de M. de Banville, ne la partageront point.

--La rime, diront-ils, est chose adorable, mais non peut-?tre en soi. Il faut que les divers arrangements de rimes vaillent ce qu'ils ont co?t?. Il faut que la rime ne soit l? que pour ajouter ? la force du sentiment ou de la pens?e, non pour les ?liminer ou, ? tout mettre au mieux, pour les susciter au hasard. Le plaisir que donnent l'entrelacement des belles consonances et la difficult? vaincue ne saurait compenser tout seul ni l'absence d'id?e ou d'?motion, ni le manque de dessein, d'ordre et d'encha?nement.

Il faut aussi que les combinaisons de rimes aient une raison d'?tre. On comprend pourquoi les rimes se croisent ou s'embrassent dans le quatrain ou le sixain; on comprend la constitution du sonnet: il y a l? des sym?tries fort simples. Mais pourquoi le rondeau a-t-il treize vers? Pourquoi le second couplet du rondeau n'en a-t-il que trois? Pourquoi, ? la fin du rondel, ne r?p?tez-vous que le premier vers du refrain? On avait r?ponse ? cela autrefois, s'il est vrai que ces petites pi?ces se chantaient: elles ?taient calqu?es sur une m?lodie, sur un air de danse. Mais, maintenant qu'on ne les chante plus, ces combinaisons nous semblent absolument arbitraires. Ce sont tours de force gratuits.

Et ces tours de force sont tels qu'on ne peut presque jamais les ex?cuter avec assez de perfection pour exciter l'applaudissement. La petite ballade a quatorze, six et cinq rimes semblables; la double ballade en a vingt-quatre, douze et sept; la grande ballade, onze, neuf, six et cinq; le chant royal, dix-huit, douze, dix et sept; le rondeau, huit et cinq; le rondel, cinq et cinq. Qu'en r?sulte-t-il? Dans la plupart des ballades il n'y a de vers <>, de vers dict?s, impos?s par une id?e ou un sentiment initial, que celui du refrain et un vers, au plus, pour chacune des autres rimes, en tout trois ou quatre vers. Les autres vers, ?tant command?s par la rime, sont ce qu'ils peuvent, se rattachent tant bien que mal ? l'id?e principale. Et ainsi la t?che, ? force d'?tre difficile, redevient facile. Ces cadres bizarres sont tellement malais?s ? remplir qu'on permet au rimeur d'y mettre n'importe quoi; et d?s lors c'est la cheville l?gitim?e, glorifi?e, triomphante. Il n'y a pas l? de quoi ?tre si fier. Prenez une ballade de M. de Banville, une ballade sonore, ? rimes ?clatantes, mais o? tous les vers, sauf deux ou trois, pourraient ?tre chang?s; prenez d'autre part une <> de Racine avec ses rimes banales, effac?es, aux sonorit?s modestes , mais o? tous les vers sont <>, o? il semble qu'on n'en pourrait enlever ni modifier un seul: m?me ? ne consid?rer les deux morceaux que comme des <>, quelle est, ? votre avis, la plus ?tonnante, la plus incroyable, la plus merveilleuse?

Mais le philistin qui parlerait ainsi prouverait simplement qu'il a du bon sens et qu'il pr?f?re ? tout la raison. Que de choses M. de Banville aurait ? r?pondre! Quand, il y a dans un morceau trop de <>, c'est donc que toute fantaisie en est absente. Ce n'est plus de la po?sie, c'est de l'?loquence, c'est ce que Buffon appelait des vers beaux comme de belle prose. Il faut en effet de l'impr?vu et du hasard dans la po?sie lyrique; il y faut de l'inutile, du surabondant, une floraison de d?tails aventureux. Et justement c'est la d?termination rigoureuse de la forme prosodique qui permet l'impr?vu des pens?es et des images: et de l? un double plaisir. Le po?te qui commence sa ballade ne sait pas trop ce qu'il y mettra: la rime, et la rime toute seule, lui sugg?rera des choses inattendues et charmantes, auxquelles il n'aurait pas song? sans elle, des choses unies par des rapports lointains et secrets, et qui s'encha?neront avec un peu du d?sordre d'un r?ve. En somme, rien de plus suggestif que ces obligations ?troites des petits po?mes difficiles: ils contraignent l'imagination ? se mettre en campagne et, tandis qu'elle cherche dans tout l'univers le pied qui peut seul chausser l'invraisemblable pantoufle de Cendrillon, elle fait, chemin faisant, de d?licieuses d?couvertes.

La rime est si bien, pour M. de Banville, <>, qu'il abolit, afin qu'elle reste toute seule sur les d?combres de l'alexandrin, les antiques et v?n?rables r?gles du rythme, et qu'il supprime le repos m?me de l'h?mistiche, si normal, si l?gitime, si n?cessaire . Et cela lui permet d'?crire avec une libert? tout olympienne:

. . . . . . . . Et je les vis, | assises Dans leur gloi | re, sur leurs tr?nes d'or | ou debout, | Reines de clart? | dans la clart?. | Mais surtout, etc...

ou bien:

ou encore:

Et il ne s'aper?oit pas qu'? moins d'une accentuation iroquoise, qui amuse dans des vers burlesques mais qui serait d?plaisante ici, la rime, ? laquelle il a tout sacrifi?, dispara?t elle-m?me par cette suppression du rythme traditionnel.

Ces anciens hommes auraient tort. La v?rit?, c'est qu'il y a au moins deux mani?res de faire les vers : une ? l'usage des po?tes dramatiques, ?l?giaques, philosophes, et, en g?n?ral, des po?tes qui analysent et qui pensent: et une autre pour les po?tes qui n'ont que des yeux, pour les lyrico-descriptifs. Et c'est celle-l? que M. de Banville a merveilleusement d?finie.

. . . . . . . . . . . . . Et, touchant Les fl?ches dont Zeus m?me adore la br?lure, Il marchait dans son sang et dans sa chevelure;

l'Amour encore, le chasseur impitoyable, demandant au po?te: <>, et le po?te r?pondant: <> ; et la rose naissant du d?sir d'Eros devant la grande Cyth?r?e endormie :

Eros la vit. Il vit ces bras que tout adore, Et ces rongeurs de braise et ces clart?s d'aurore. Il contempla Cypris endormie, ? loisir. Alors de son d?sir, faite de son d?sir, Toute pareille ? son d?sir, naquit dans l'herbe Une fleur tendre, ?mue, ineffable, superbe, Rougissante, splendide, et sous son fier dessin Flamboyante, et gardant la fra?cheur d'un beau sein;

tous ces tableaux, et bien d'autres, forment une galerie flamboyante, une galerie de M?dicis, et peut-?tre la plus haute en couleur qu'un po?te ait jamais bross?e.

Ainsi se pr?cise l'originalit? de M. de Banville. L'idol?trie de la rime implique une ?me uniquement sensible au beau ext?rieur et s'accorde exactement avec la th?orie de <>; et le plus singulier m?rite de M. de Banville est peut-?tre d'avoir, entre tous les po?tes, appliqu? cette ?troite th?orie avec une rigueur absolue.

On voit maintenant dans quel sens je disais que l'id?e la plus persistante de M. de Banville a ?t? de n'exprimer aucune id?e dans ses vers. Je voulais dire qu'il n'en a jamais exprim? que de fort simples et de celles qui rev?tent naturellement et qui appellent une forme toute concr?te; et c'est ? multiplier et ? embellir ces images, ? les traduire elles-m?mes par des arrangements harmonieux de mots brillants, qu'a tendu tout son effort. Et l'on pourrait presque dire aussi qu'il n'a jamais exprim? de sentiments, sinon le sentiment de joie, d'all?gresse, de vie divine qui r?pond ? la perception abondante et ais?e des belles lignes et des belles couleurs.

J'ai tenu bien haut dans ma main Le glaive ?clatant de la rime...

Et j'ai trouv? des mots vermeils Pour peindre la couleur des roses.

C'est fort bien dit; et c'est parce qu'il n'a jamais aspir? ? peindre autre chose qu'il a ?t? l'esclave ? la fois et le dompteur de la rime et qu'il n'a gu?re ?t? que cela. Cherchez un po?te qui ait plus purement, plus exclusivement aim? et rendu le beau plastique, qui par cons?quent ait pratiqu? <> avec plus d'intransigeance et une conscience plus farouche: vous n'en trouverez point.

D'un linceul de point d'Angleterre Que l'on recouvre sa beaut?.

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