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Munafa ebook

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Read Ebook: Salassa maailmalta: Romaani by Flygare Carl N Emilie Alpi Eero Translator

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Ebook has 927 lines and 34657 words, and 19 pages

--D'abord il pr?tend se ressentir du bien et du mal qu'on fait aux autres hommes, qu'il appelle na?vement ses fr?res; et puis il conna?t lui, ceux ? qui tu as fait du mal, et il te punit ? sa mani?re.

--Mais de quel droit?

--Voyons, Jacques, entre nous, ne parlons pas de droit: il avait le pouvoir de te faire judiciairement couper la t?te. Qu'en serait-il r?sult?? Tes deux seuls parents sont morts, l'?tat profitait de ta fortune au d?triment de ceux que tu avais d?pouill?s. Au contraire, en mettant ta vie au prix de ta fortune, Morel le lapidaire, le p?re de Louise, que tu as d?shonor?e, se trouve, lui et sa famille, d?sormais ? l'abri du besoin. Mme de Fermont, la soeur de M. de Renneville pr?tendu suicid?, retrouve ses cent mille ?cus; Germain, que tu avais faussement accus? de vol, est r?habilit? et mis en possession d'une place honorable et assur?e, ? la t?te de la Banque des travailleurs sans ouvrage, qu'on te force de fonder pour r?parer et expier les outrages que tu as commis contre la soci?t?. Entre sc?l?rats on peut s'avouer cela; mais franchement, au point de vue de celui qui nous tient entre ses serres, la soci?t? n'aurait rien gagn? ? ta mort, elle gagne beaucoup ? ta vie.

--Et c'est cela qui cause ma rage... et ce n'est pas l? ma seule torture!...

--Le prince le sait bien. Maintenant que va-t-il d?cider de nous? Je l'ignore. Il nous a promis la vie sauve si nous ex?cutions aveugl?ment ses ordres, il tiendra sa promesse. Mais s'il ne croit pas nos crimes suffisamment expi?s, il saura bien faire que la mort soit mille fois pr?f?rable ? la vie qu'il nous laisse. Tu ne le connais pas. Quand il se croit autoris? ? ?tre inexorable, il n'est pas de bourreau plus f?roce. Il faut qu'il ait le diable ? ses ordres pour avoir d?couvert ce que j'?tais all? faire en Normandie. Du reste, il a plus d'un d?mon ? son service, car cette Cecily, que la foudre ?crase!...

--Encore une fois, tais-toi, pas ce nom, pas ce nom!

--Si, si, que la foudre ?crase celle qui porte ce nom! c'est elle qui a tout perdu. Notre t?te serait en s?ret? sur nos ?paules sans ton imb?cile amour pour cette cr?ature.

Au lieu de s'emporter, Jacques Ferrand r?pondit avec un profond abattement:

--La connais-tu, cette femme? Dis? l'as-tu jamais vue?

--Jamais. On la dit belle, je le sais.

--Belle! r?pondit le notaire en haussant les ?paules. Tiens, ajouta-t-il avec une sorte d'amertume d?sesp?r?e, tais-toi, ne parle pas de ce que tu ignores. Ne m'accuse pas. Ce que j'ai fait, tu l'aurais fait ? ma place.

--Moi! mettre ma vie ? la merci d'une femme!

--De celle-l?, oui, et je le ferais de nouveau, si j'avais ? esp?rer ce qu'un moment j'ai esp?r?.

--Par l'enfer!... il est encore sous le charme, s'?cria Polidori stup?fait.

--?coute, reprit le notaire d'une voix calme, basse, et pour ainsi dire accentu?e ?? et l? par les ?lans de d?sespoir incurable, ?coute, tu sais si j'aime l'or? Tu sais ce que j'ai brav? pour en acqu?rir? Compter dans ma pens?e les sommes que je poss?dais, les voir se doubler par mon avarice, endurer toutes les privations et me savoir ma?tre d'un tr?sor, c'?tait ma joie, mon bonheur. Oui, poss?der, non pour d?penser, non pour jouir, mais pour th?sauriser, c'?tait ma vie... Il y a un mois, si l'on m'e?t dit: <>, j'aurais livr? ma t?te.

--Mais ? quoi bon poss?der, quand on va mourir?

--Demande-moi donc alors: <> Moi, millionnaire, menais-je la vie d'un millionnaire? Non, je vivais comme un pauvre. J'aimais donc ? poss?der... pour poss?der.

--Mais, encore une fois, ? quoi bon poss?der si l'on meurt?

--? mourir en poss?dant! oui, ? jouir jusqu'au dernier moment de la jouissance qui vous a fait tout braver, privations, infamie, ?chafaud; oui, ? dire encore, la t?te sur le billot: <> Oh! vois-tu, la mort est douce, compar?e aux tourments que l'on endure en se voyant, de son vivant, d?poss?d? comme je le suis, d?poss?d? de ce qu'on a amass? au prix de tant de peine, de tant de dangers! Oh! se dire ? chaque heure, ? chaque minute du jour: <> C'est atroce! c'est mourir, non pas chaque jour, mais c'est mourir ? chaque minute du jour. Oui, ? cette horrible agonie qui doit durer des ann?es peut-?tre, j'aurais pr?f?r? mille fois la mort rapide et s?re qui vous atteint avant qu'une parcelle de votre tr?sor vous ait ?t? enlev?e; encore une fois, au moins je serais mort en disant: <>

Polidori regarda son complice avec un profond ?tonnement.

--Je ne te comprends plus. Alors pourquoi as-tu ob?i aux ordres de celui qui n'a qu'? dire un mot pour que ta t?te tombe? Pourquoi as-tu pr?f?r? la vie sans ton tr?sor, si cette vie te semble si horrible?

--C'est que, vois-tu, ajouta le notaire d'une voix de plus en plus basse, mourir, c'est ne plus penser, mourir, c'est le n?ant. Et Cecily?

--Et tu esp?res? s'?cria Polidori stup?fait.

--Je n'esp?re pas, je poss?de.

--Quoi?

--Le souvenir.

--Mais tu ne dois jamais la revoir, mais elle a livr? ta t?te.

--Mais je l'aime toujours, et plus fr?n?tiquement que jamais, moi! s'?cria Jacques Ferrand avec une explosion de larmes, de sanglots, qui contrast?rent avec le calme morne de ses derni?res paroles. Oui, reprit-il dans une effrayante exaltation, je l'aime toujours, et je ne veux pas mourir, afin de pouvoir me plonger et me replonger encore avec un atroce plaisir dans cette fournaise o? je me consume ? petit feu. Car tu ne sais pas, cette nuit, cette nuit o? je l'ai vue si belle, si passionn?e, si enivrante, cette nuit est toujours pr?sente ? mon souvenir. Ce tableau d'une volupt? terrible est l?, toujours l?, devant mes yeux. Qu'ils soient ouverts ou ferm?s par un assoupissement f?brile ou par une insomnie ardente, je vois toujours son regard noir et enflamm? qui fait bouillir la moelle de mes os. Je sens toujours son souffle sur mon front. J'entends toujours sa voix.

--Mais ce sont l? d'?pouvantables tourments!

--?pouvantables! oui, ?pouvantables! Mais la mort! mais le n?ant! mais perdre pour toujours ce souvenir aussi vivant que la r?alit?, mais renoncer ? ces souvenirs qui me d?chirent, me d?vorent et m'embrasent! Non! non! non! Vivre! vivre! pauvre, m?pris?, fl?tri, vivre au bagne, mais vivre pour que la pens?e me reste, puisque cette cr?ature infernale a toute ma pens?e, est toute ma pens?e!

--Jacques, dit Polidori d'un ton grave qui contrasta avec son am?re ironie habituelle, j'ai vu bien des souffrances; mais jamais tortures n'approch?rent des tiennes. Celui qui nous tient en sa puissance ne pouvait ?tre plus impitoyable. Il t'a condamn? ? vivre, ou plut?t ? attendre la mort dans des angoisses terribles, car cet aveu m'explique les sympt?mes alarmants qui chaque jour se d?veloppent en toi, et dont je cherchais en vain la cause.

--Mais ces sympt?mes n'ont rien de grave! c'est de l'?puisement, c'est la r?action de mes chagrins!... Je ne suis pas en danger, n'est-ce pas?...

--Non, non, mais ta position est grave, il ne faut pas l'empirer; il est certaines pens?es qu'il faudra chasser. Sans cela, tu courrais de grands dangers.

--Je ferai ce que tu voudras, pourvu que je vive, car je ne veux pas mourir. Oh! les pr?tres parlent de damn?s! jamais ils n'ont imagin? pour eux un supplice ?gal au mien. Tortur? par la passion et la cupidit?, j'ai deux plaies vives au lieu d'une, et je les sens ?galement toutes deux. La perte de ma fortune m'est affreuse, mais la mort me serait plus affreuse encore. J'ai voulu vivre, ma vie peut n'?tre qu'une torture sans fin, sans issue, et je n'ose appeler la mort, car la mort an?antit mon funeste bonheur, ce mirage de ma pens?e, o? m'appara?t incessamment Cecily.

--Tu as du moins la consolation, dit Polidori en reprenant son sang-froid ordinaire, de songer au bien que tu as fait pour expier tes crimes...

--Oui, raille, tu as raison, retourne-moi sur des charbons ardents. Tu sais bien, mis?rable, que je hais l'humanit?; tu sais bien que ces expiations que l'on m'impose, et dans lesquelles des esprits faibles trouveraient quelques consolations, ne m'inspirent, ? moi, que haine et fureur contre ceux qui m'y obligent et contre ceux qui en profitent. Tonnerre et meurtre! Songer que pendant que je tra?nerai une vie ?pouvantable, n'existant que pour jouir de souffrances qui effrayeraient les plus intr?pides, ces hommes que j'ex?cre verront, gr?ce aux biens dont on m'a d?pouill?, leur mis?re s'all?ger... que cette veuve et sa fille remercieront Dieu de la fortune que je leur rends... que ce Morel et sa fille vivront dans l'aisance... que ce Germain aura un avenir honorable et assur?! Et ce pr?tre! ce pr?tre qui me b?nissait, quand mon coeur nageait dans le fiel et dans le sang, je l'aurais poignard?! Oh! c'en est trop! Non! non! s'?cria-t-il en appuyant sur son front ses deux mains crisp?es, ma t?te ?clate, ? la fin, mes id?es se troublent. Je ne r?sisterai pas ? de tels acc?s de rage impuissante, ? ces tortures toujours renaissantes. Et tout cela pour toi! Cecily, Cecily! Le sais-tu, au moins, que je souffre autant, le sais-tu, Cecily, d?mon sorti de l'enfer?

Et Jacques Ferrand, ?puis? par cette effroyable exaltation, retomba haletant sur son si?ge, et se tordit les bras en poussant des rugissements sourds et inarticul?s.

Cet acc?s de rage convulsive et d?sesp?r?e n'?tonna pas Polidori.

Poss?dant une exp?rience m?dicale consomm?e, il reconnut facilement que chez Jacques Ferrand la rage de se voir d?poss?d? de sa fortune, jointe ? sa passion ou plut?t ? sa fr?n?sie pour Cecily, avait allum? chez ce mis?rable une fi?vre d?vorante.

Ce n'?tait pas tout... dans l'acc?s auquel Jacques Ferrand ?tait alors en proie, Polidori remarquait avec inqui?tude certains pronostics d'une des plus effrayantes maladies qui aient jamais ?pouvant? l'humanit?, et dont Paulus et Ar?t?e, aussi grands observateurs que grands moralistes, ont si admirablement trac? le foudroyant tableau.

Tout ? coup on frappa pr?cipitamment ? la porte du cabinet.

--Jacques, dit Polidori au notaire, Jacques, remets-toi... voici quelqu'un...

Le notaire ne l'entendit pas. ? demi couch? sur son bureau, il se tordait dans des spasmes convulsifs.

Polidori alla ouvrir la porte, il vit le ma?tre-clerc de l'?tude qui, p?le et la figure boulevers?e, s'?cria:

--Il faut que je parle ? l'instant ? M. Ferrand!

--Silence... il est dans ce moment tr?s-souffrant... il ne peut vous entendre, dit Polidori ? voix basse, et, sortant du cabinet du notaire, il en ferma la porte.

--Ah! monsieur, s'?cria le ma?tre-clerc, vous, le meilleur ami de M. Ferrand, venez ? son secours; il n'y a pas un moment ? perdre.

--Que voulez-vous dire?

--D'apr?s les ordres de M. Ferrand, j'?tais all? dire ? Mme la comtesse Mac-Gregor qu'il ne pouvait se rendre chez elle aujourd'hui, ainsi qu'elle le d?sirait...

--Eh bien?

--Cette dame, qui para?t maintenant hors de danger, m'a fait entrer dans sa chambre. Elle s'est ?cri?e d'un ton mena?ant: <>

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