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Munafa ebook

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Read Ebook: Dramaturgiai dolgozatok (1. kötet 1850-1863) by Gyulai P L

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Ebook has 889 lines and 103647 words, and 18 pages

Mont? sur sa dunette, et le porte-voix ? la main, il se dispose ? interroger celui qu'il suppose ?tre le capitaine du navire qui court si pr?s de lui.

Les passagers les plus alertes et les matelots les moins abattus entourent leur chef dans le plus grand silence, et ils s'appr?tent ? recueillir les mots qui vont ?tre ?chang?s dans cet entretien si int?ressant pour eux.

Tous les yeux se portent alors sur le commandant du brick, qui, toujours assis sur son d?me, para?t ? peine avoir entendu ou avoir remarqu? les mots qui viennent de lui ?tre adress?s.

Pour toute r?ponse, celui ? qui il vient de parler se contente de prendre n?gligemment un petit porte-voix en argent, sans changer de place, et de lui faire entendre ces seuls mots:

--Parlez fran?ais. Je n'aime pas l'anglais!

--A quel homme sommes-nous donc destin?s ? avoir affaire! dit tristement le capitaine anglais aux personnes qui l'environnent et qui paraissent vouloir lire sur sa physionomie chagrine les maux auxquels il faut peut-?tre se pr?parer encore.

--Mais peu importe! ajoute le capitaine; la r?signation doit peu nous co?ter maintenant, et l'avenir ne saurait nous r?server des malheurs plus terribles que ceux qui ont d?j? ?prouv? notre courage.... Cependant n'est-il pas cruel, au moment o? nous commencions ? esp?rer, de rencontrer.... C'est ?gal: soumettons-nous jusqu'au bout ? la destin?e ou plut?t ? la Providence. Ce capitaine veut que je parle fran?ais.... Parlons-lui fran?ais, pour faire acte de soumission au sort que le ciel nous envoie.

Et le vieux marin reprend son porte-voix pour crier ? son voisin:

--Oh! du brick, oh!

--Hol?! a r?pondu enfin le capitaine inconnu, mais sans changer de place.

--D'o? vient le brick? lui demande alors le capitaine anglais un peu enhardi.

--De la mer! Et vous, depuis quand avez-vous quitt? Londres?

--H?las! capitaine, depuis cent jours, avec soixante passagers et vingt-six hommes d'?quipage.

Mais comment, se disent les passagers et les marins du trois-m?ts, sait-il que nous venons de Londres?... Silence! dit le capitaine, il va encore nous parler.

Effectivement, le capitaine ?tranger a ?lev? de nouveau son porte-voix:

--Depuis quarante-et-un jours, capitaine.

--Avez-vous assez de vivres?

--Nous avons ?puis? tous ceux que nous avions.

--Et de l'eau?

--Nous en avons recueilli quelques barriques hier pendant la pluie.

--Et vos malades?

--Nous en avons perdu quelques-uns.

--Pourquoi avez-vous abandonn? le canot que vous aviez mis hier ? la mer?

--Les malheureux qui le montaient se sont massacr?s.... Mon fils commandait ce canot, qu'il croyait pouvoir conduire jusqu'? bord de votre navire.

Un moment de silence succ?da ? ces derniers mots.... Des larmes ?touffaient la voix du malheureux qui venait de les prononcer avec effort.

Le commandant du brick reprit:....

--De quoi avez-vous le plus besoin?

--D'un chirurgien, capitaine; le n?tre a succomb?.

--Je n'en ai qu'un ? bord, et je le garde.

--S'il pouvait venir pour quelques instans seulement ? notre bord, et qu'il voul?t visiter nos malades, il nous rendrait le service le plus signal? que la Providence p?t nous accorder.

--Oui, la Providence!... Quelle est la maladie qui s'est manifest?e chez vous?

--Je l'ignore; c'est une fi?vre, je crois; mais vous n'avez pas besoin d'avoir peur, elle ne se communique pas.

--Peur! reprend vivement et en souriant avec d?dain le capitaine, peur! et en r?p?tant ce dernier mot il fait un signe ? son timonnier, qui pousse la barre un peu au vent.

LE FANTOME!

--Commandant, je vous demande pardon d'avoir employ? une expression qui a paru vous d?plaire; mais je ne savais pas....

L'Anglais reprit, toujours avec la m?me alt?ration de voix:

--Mais je ne savais pas avoir l'honneur de parler au Capitaine-Noir. Je me f?licite, au surplus, d'avoir rencontr?, ? la suite de tous mes malheurs, un homme aussi renomm? par l'intr?pidit? de son caract?re que par l'humanit? de son coeur.

--Finissons-en. De quoi avez-vous le plus besoin?

--D'un chirurgien, commandant, et de quelques vivres un peu frais pour nos pauvres malades.

--Mon chirurgien ne peut passer qu'une heure ? votre bord: des vivres, vous allez en avoir.

Un geste imp?rieux du Capitaine-Noir fit sortir comme par magie de l'entrepont, o? se trouvaient rang?s en silence ses matelots et ses officiers, neuf hommes qui, paraissant avoir devin? l'intention de leur chef, s'empress?rent de placer quelques barils et beaucoup de provisions dans un canot suspendu, le long du gaillard d'arri?re, sur d'?l?gans montans en fer.

A un autre signe du Capitaine-Noir, le navire se trouva mis en panne, et les neuf hommes laiss?rent glisser, sans dire un seul mot, l'embarcation ? la mer.

A l'aspect de ce jeune et grave officier, la figure des malades s'?panouit, et une lueur d'espoir se laisse voir ? travers la douleur qui contracte leurs traits d?compos?s. Les passagers et les matelots entourent l'?tranger. C'est un dieu r?parateur qui leur apporte un baume pour leurs plaies, une consolation pour toutes leurs souffrances. Il interroge, il examine, il ordonne. On l'?coute comme un oracle; on recueille ses moindres paroles comme des arr?ts c?lestes; on devine chacun de ses gestes; on ex?cute chacun de ses ordres. La confiance rena?t ? sa voix, et l'oubli de tous les maux pass?s coule de ses l?vres dans les coeurs des malheureux qu'il ranime par la persuasion et par le besoin m?me qu'ils ont de croire ? un avenir de bonheur, apr?s toutes les angoisses qu'ils ont ?prouv?es, tous les supplices qu'ils ont subis....

Le capitaine anglais seul est inconsolable. Le m?decin a d?clar? en vain que l'?pid?mie ne pr?sentait plus de danger pour la plupart des malades, et qu'avec les soins qu'il a prescrits leur r?tablissement serait assur?, le malheureux capitaine sent trop, pour partager la joie commune, que le mal qui le d?vore est sans rem?de. Le m?decin, qui soup?onne et qui apprend le sujet de sa douleur profonde, ne peut lui offrir aucune consolation; mais il cherche du moins ? lui t?moigner une bienveillance affectueuse: c'est le seul moyen d'adoucir l'amertume des maux que rien ne peut gu?rir.

--Capitaine, lui dit-il, il ne me reste qu'un devoir ? remplir, apr?s m'?tre acquitt? ? votre bord de la mission dont mon commandant m'a charg?: c'est de vous demander le service que je pourrais encore vous rendre.

--Pour moi personnellement, monsieur, je n'ai plus rien ? r?clamer de votre humanit?. Le seul devoir qui me reste ? remplir envers mes passagers et mon ?quipage sera bient?t accompli, si Dieu veut nous permettre de nous rendre ? Buenos-Ayres. La t?che que je me suis impos?e est la seule chose qui m'attache encore ? la vie. J'ai navigu? pendant quarante ans, et un malheur inou? vient de m'apprendre que ma p?nible carri?re ?tait finie, et que l'homme ? qui la Providence a refus? ses secours, n'est plus fait pour r?pondre de l'existence de ceux qui lui confiaient leur fortune, leur famille et leur vie.... Mais puisque vous ?tes encore assez g?n?reux pour me proposer un service apr?s celui que votre capitaine a bien voulu me rendre, j'oserai vous adresser une pri?re.

--Parlez, capitaine, je suis encore ? vos ordres.

--Une femme, la plus int?ressante de toutes celles qui ont droit ? nos respects et ? nos ?gards, se meurt ? mon bord, frapp?e par l'?pid?mie, qui ? peine a ?pargn? son mari.

Ces deux ?poux, que l'attachement le plus vif semble avoir encha?n?s ? une m?me destin?e, sont riches, consid?r?s, et r?sign?s aux plus grands sacrifices. La femme, avec les secours de l'art, peut ?chapper ? la mort, et elle p?rira, j'en suis s?r, pour peu que notre travers?e se prolonge, sans que nous puissions lui offrir autre chose que des soins ordinaires et le plus souvent mal dirig?s.... Votre b?timent marche mieux que le mien; vous verrez la terre bien avant moi, sans doute, si jamais je la revois; ? votre bord, vous pouvez prodiguer ? vos malades, ? chaque heure, ? chaque instant, les secours si puissans que nous ignorons.... Si le Capitaine-Noir, cet homme si extraordinaire, que l'on dit brave et g?n?reux jusqu'au fanatisme, consentait ? recevoir ? son bord la jeune malade et son malheureux ?poux, je croirais n'avoir plus aucun voeu ? adresser au ciel dans ce monde qui va me devenir bient?t si indiff?rent.

Celui-ci, d?sesp?rant d'obtenir ce qu'il avait demand?, se pr?parait d?j? ? ?prouver un refus.

Le docteur, cependant, prit la parole apr?s quelques momens d'h?sitation.

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