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Munafa ebook

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Read Ebook: Mémoires de Mme la Comtesse de Genlis by Genlis St Phanie F Licit Comtesse De Carette Madame Editor

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Ebook has 424 lines and 79684 words, and 9 pages

Je connus l? tout l'avantage d'avoir pour mentor une personne qui a un v?ritable d?sir de faire valoir celle qu'elle m?ne dans le monde. J'eus beaucoup de succ?s, non pas seulement pour la harpe, le chant et les proverbes, mais on loua mon esprit, ma conversation . Quand je voulais le soir, suivant ma coutume, me retirer ? onze heures, on me retenait de force; on relevait avec ?loge ce que je disais, on en citait des traits le lendemain, et le plus souvent ces pr?tendus bons mots n'en valaient pas la peine. Je devais tous ces succ?s ? madame de Puisieux, et ? M. le duc d'Orl?ans, qui ne tarissait pas sur les r?cits de mes gentillesses. On eut peine ? nous laisser partir au bout de douze jours. J'avais beaucoup parl? de ma tante ? M. le duc d'Orl?ans, en nous promenant ? Villers-Cotterets. Une lettre qui lui apprit qu'elle reviendrait sous trois semaines, le r?chauffa pour elle et il reprit sa passion, de peur d'?tre boud?. En quittant Villers-Cotterets nous all?mes ? Sillery.

Nous retourn?mes ? Paris dans les derniers jours d'octobre. Ma tante ?tait de retour de Bar?ges: les eaux l'avaient gu?rie. Ma tante me parla avec autant de confiance que son caract?re lui permettait d'en avoir. M. le duc d'Orl?ans lui offrait de l'?pouser secr?tement; ma tante lui montra une d?licatesse dont je fus la dupe quelque temps, mais qui n'?tait au fond qu'une combinaison et un calcul d'ambition. Elle d?clara avec emphase ? M. le duc d'Orl?ans qu'elle ne l'?pouserait qu'avec le consentement du prince son fils, le duc de Chartres. M. le duc d'Orl?ans aimait son fils autant qu'un homme d'une faiblesse excessive peut aimer. Il lui confia sur-le-champ son secret, en lui vantant extr?mement la grandeur d'?me de madame de Montesson. Il n'?tait encore question que d'un mariage tr?s secret. M. le duc de Chartres n'aimait pas madame de Montesson. Elle avait avec lui, pour lui plaire, des acc?s de gaiet?, des rires ?clatants et des mani?res enfantines et caressantes qu'il appelait des mi?vreries ridicules. Ce prince avait le d?faut de prendre dans une v?ritable aversion, non ce qui m?ritait l'indignation et le m?pris, mais ce qui manquait de gr?ce, de go?t; et ce qui lui paraissait ridicule. Il r?pondit avec respect, mais froidement, ? M. le duc d'Orl?ans, qu'un fils n'avait point de consentement ? donner ? un p?re. Ma tante se d?cida ? lui parler; elle lui fit une sc?ne de tendresse qui embarrassa beaucoup M. le duc de Chartres; et comme elle persistait toujours ? lui demander son consentement, M. le duc de Chartres lui r?pondit qu'il le donnerait de bon coeur, s'il ?tait s?r que la r?solution de son p?re f?t v?ritablement in?branlable, ce que le temps seul pouvait lui prouver. Ma tante s'?cria qu'elle d?sirait aussi une longue ?preuve et proposa deux ans. M. le duc de Chartres approuva de tr?s bonne gr?ce et se retira en lui disant qu'il la priait de lui faire conna?tre par ?crit la d?cision de M. le duc d'Orl?ans.

Madame de Montesson affecta d'?tre parfaitement contente de M. le duc de Chartres; elle confia ? plusieurs personnes qu'il consentait ? son mariage avec M. le duc d'Orl?ans, mais elle ne parla point de la condition impos?e. Quand tout ceci fut bien arrang?, elle ne perdit pas de temps pour faire une nouvelle d?claration ? M. le duc d'Orl?ans; lui annon?a qu'elle ne l'?pouserait qu'avec le consentement par ?crit du roi. En ceci ma tante eut raison, un mariage clandestin est v?ritablement honteux quand ce n'est pas l'amour qui le forme.

Monsieur le dauphin venait de se marier, on parlait du mariage de Monsieur, et M. de Puisieux demanda au roi pour moi la promesse d'une place de dame aupr?s de la future Madame. Le roi le promit, le mar?chal d'?tr?e en remercia publiquement le roi, et j'en re?us des compliments. Madame de Montesson prit ce pr?texte pour se faire pr?senter ? la cour, o? elle n'avait jamais ?t?, quoique sa naissance lui en donn?t le droit. J'allai ? la pr?sentation de ma tante, et je m'amusai beaucoup ce jour-l?, parce que c'?tait justement celui de la pr?sentation de madame du Barri. Nous la rencontr?mes partout, elle ?tait mise magnifiquement et de bon go?t. Au jour sa figure ?tait pass?e et des taches de rousseur g?taient son teint. Son maintien ?tait d'une effronterie r?voltante: ses traits n'?taient pas beaux, mais elle avait des cheveux blonds d'une couleur charmante, de jolies dents et une physionomie agr?able. Elle avait beaucoup d'?clat ? la lumi?re. Le soir au jeu nous arriv?mes quelques minutes avant elle. Quand elle entra toutes les femmes qui ?taient contre la porte se jet?rent les unes contre les autres du c?t? oppos?, pour ne pas se trouver assises pr?s d'elle; de sorte qu'il y eut entre elle et la derni?re femme du cercle l'intervalle de quatre ou cinq pliants vides. Elle vit avec le plus grand sang-froid ce mouvement si marqu?; rien n'alt?ra son imperturbable effronterie.

Mais revenons ? ma tante et ? M. le duc d'Orl?ans; ce dernier ne voyait rien de press? dans la d?marche qu'il devait faire aupr?s du roi; mais ma tante lui dit qu'il fallait toujours avoir ce consentement dans son portefeuille. Au moment de faire la d?marche, M. le duc d'Orl?ans assura que le roi recevrait mal cette demande, et qu'il ferait un refus positif. Madame de Montesson soutint le contraire. Le roi refusa d'abord et fort s?chement; M. le duc d'Orl?ans insista avec tant de chaleur, qu'enfin, apr?s un long t?te-?-t?te, il obtint le consentement par ?crit, sous la condition que ma tante ne changerait point de nom, ne s'attribuerait aucune esp?ce de pr?rogative de princesse du sang, ne d?clarerait point son mariage, et ne para?trait jamais ? la cour.

M. le duc d'Orl?ans revint tout triomphant ? Paris; nous l'attendions avec une extr?me impatience. Enfin, il arriva; sa physionomie annon?ait un ?clatant succ?s; ma tante avait elle-m?me propos? les conditions, cependant je vis qu'elle en ?tait choqu?e.

Ma tante fut r?veuse et pr?occup?e toute cette journ?e.

M. le duc d'Orl?ans prit l'humeur de madame de Montesson pour de la sensibilit? et rien ne troubla sa satisfaction.

M. le duc de Chartres avait d?clar? qu'il ne mettrait jamais les pieds chez madame de Montesson; n?anmoins il y retourna, il y soupa deux ou trois fois dans l'hiver, ce qui a continu? tous les ans. Cette conduite ?tait indulgente et convenable; mais elle ne satisfit nullement ma tante. Elle aigrit de plus en plus son p?re contre lui. Les plus funestes pr?ventions prises contre ce malheureux prince ont ?t? donn?es par elle.

Bient?t apr?s, le mariage de M. le duc de Chartres avec la fille du duc de Penthi?vre fut d?cid?.

Madame de Montesson, par un motif particulier qui ne se rapportait qu'? elle, d?sirait extr?mement que j'entrasse au Palais-Royal, et elle n'avait nul besoin d'employer son cr?dit pour cela; M. le duc d'Orl?ans le d?sirait personnellement; je lui plaisais, et il pensait que je ne serais pas tout ? fait inutile ? l'agr?ment des longs voyages de Villers-Cotterets. D'ailleurs, j'avais beaucoup de droit pour pr?tendre ? une place aupr?s de madame la duchesse de Chartres; la r?putation de l?g?ret? et de galanterie de M. le duc de Chartres avait donn? ? M. le duc de Penthi?vre le plus grand ?loignement pour cette alliance. M. de Puisieux, avec beaucoup de z?le et de pers?v?rance, parvint ? le d?cider. M. le duc d'Orl?ans reconnaissait hautement lui devoir cette obligation. Ma tante me dit qu'il ne tiendrait qu'? moi d'avoir une place de dame au Palais-Royal si je la demandais.

Je trouvais la duchesse de Chartres charmante de figure et de caract?re, car on n'a jamais vu de jeune princesse plus naturellement obligeante et d'une bont? plus parfaite. Je confiai ? madame de Puisieux, ? qui je n'en avais jamais parl?, tout ce qu'on m'avait dit ? ce sujet; je lui d?taillai tous les avantages de cette place quand on avait des enfants: des r?giments dont les princes disposaient, et qui ?taient toujours donn?s aux enfants ou aux gendres des dames; leurs propres places qu'elles pouvaient c?der ? leurs filles ou ? leurs brus, la protection des princes, etc. Madame de Puisieux m'?couta attentivement; elle fut combattue par deux id?es: l'une, de notre s?paration, et l'autre des succ?s brillants qu'elle se figurait que je devais avoir dans une cour c?l?bre par sa magnificence, son bon go?t et son ?clat. Quoiqu'elle e?t ?t? jadis la plus charmante personne de la cour, par son esprit et par sa rare beaut?, je suis bien s?re qu'elle n'avait jamais eu pour elle la vanit? qu'elle avait pour moi; elle y sacrifia, dans cette occasion, son bonheur et le mien!

Je pourrais dire que je ne fus d?termin?e que par l'int?r?t de mes enfants, que cette r?solution me co?ta et qu'elle fut un sacrifice maternel: il est certain que je comptais pour beaucoup les avantages brillants que j'en pouvais retirer pour l'?tablissement de mes enfants, mais quand je n'aurais point eu d'enfants, j'aurais d?sir? cette place.

J'avais pour madame de Puisieux une affection v?ritablement filiale. Malgr? la peine extr?me qu'elle ?prouvait ? se s?parer de moi, elle engagea M. de Genlis ? faire la d?marche n?cessaire pour cette place, qui ?tait de la demander ? M. le duc d'Orl?ans. M. de Genlis ne s'en souciait pas, et il d?clara qu'il ne consentirait ? me laisser entrer au Palais-Royal, que s'il y ?tait attach? lui-m?me. Il demanda et obtint la place de capitaine des gardes de M. le duc de Chartres; c'?tait une des premi?res places de la maison; elle valait six mille francs; j'eus en m?me temps celle de dame, qui en valait quatre. Au fond de l'?me, j'?tais charm?e d'entrer dans cette cour brillante, dont le bon air et l'?l?gance m'avaient s?duite; je portais au Palais-Royal une r?putation irr?prochable, et j'allais commencer une nouvelle carri?re. J'y voyais confus?ment beaucoup d'?cueils et de dangers; mais j'y voyais de l'?clat..., et je me laissais entra?ner par la vanit?, par la curiosit? et par la pr?somption. Enfin le jour o? je devais entrer au Palais-Royal arriva.

Comme mon logement n'?tait point encore pr?t, je logeai d'abord dans ce qu'on appelait les petits appartements de M. le R?gent. Ils avaient encore les m?mes d?corations; tous les panneaux et l'alc?ve de la chambre ? coucher ?taient en glaces, avec des baguettes dor?es; ils ?taient au bout de la grande galerie, au premier, et ils avaient un petit escalier d?rob? et une petite porte qui donnait sur la rue de Richelieu: ce fut par l? que j'y entrai. En tournant dans cette rue, mon cocher, voulant couper un fiacre, passa sur une borne. La secousse fut tr?s violente; je crus que nous versions et que nous allions ?tre fracass?s, et je m'?criai:--Grand Dieu! quel pr?sage! mais j'en fus quitte pour la peur. J'entrai dans cet appartement, que je n'avais jamais vu, avec une tristesse et un serrement de coeur inexprimables. Je m'assis dans la chambre, et toutes ces glaces, toute cette magnificence de boudoir me d?plurent ? l'exc?s.

La soci?t? du Palais-Royal ?tait alors la plus brillante et la plus spirituelle de Paris.

Il y avait en femmes madame de Blot, dame d'honneur de la princesse. Elle n'?tait plus jeune, mais elle avait encore une grande ?l?gance par sa jolie taille et sa mani?re de se mettre. Il y avait en elle deux personnes fort diff?rentes: quand elle se trouvait dans l'int?rieur d'une petite soci?t?, et sans pr?tentions, elle ?tait gaie, rieuse, naturelle et fort aimable; quand elle voulait para?tre et briller, elle devenait affect?e, elle dissertait au lieu de causer, elle soutenait des th?ses fort ennuyeuses sur la sensibilit? et l'?l?vation des sentiments. Si l'avarice pouvait laisser quelque grandeur dans le caract?re, madame de Blot aurait pens? noblement; mais j'ai connu peu de personnes plus int?ress?es et plus ambitieuses; enfin, elle attachait la plus grande importance aux mani?res, au bon ton et ? la politesse. Mes autres compagnes ?taient madame la vicomtesse de Clermont-Gallerande, auparavant comtesse des Choisi, remari?e nouvellement en secondes noces. Elle avait fort mal v?cu avec son premier mari, tu? ? la bataille de Minden; elle ?tait, ? sa mort, fort jeune et fort belle; elle n'avait point de fortune; M. de Clermont, chambellan de M. le duc d'Orl?ans, l'?pousa par amour, malgr? ses parents, et surtout parce que M. le duc d'Orl?ans le voulait. Madame des Choisi ?tait belle encore, mais peu agr?able et surtout trop grasse. Je n'ai jamais connu de femme plus humoriste et plus capricieuse. Quoiqu'elle e?t peu d'esprit, elle avait quelquefois des saillies originales et plaisantes; il y avait en elle du naturel, de la singularit?, quelque chose de piquant; elle contait quelquefois tr?s agr?ablement. Elle fut mari?e tr?s jeune ? M. des Choisi, qui ?tait beaucoup plus ?g? qu'elle, et dont l'ext?rieur, dit-on, avait quelque chose de repoussant et de r?barbatif; madame des Choisi contait de lui, et d'une mani?re tr?s plaisante, plusieurs anecdotes, entre autres celle-ci: mari?e depuis dix-huit mois, elle entrait dans sa seizi?me ann?e lorsque M. des Choisi, qui venait d'acheter une terre ? cinquante lieues de Paris, voulut y aller passer huit mois et y emmener sa femme avec lui; madame des Choisi qui n'avait jamais quitt? le Palais-Royal, fut au d?sespoir d'aller se confiner dans un vieux ch?teau; elle regarda ce voyage comme l'acte du plus barbare et du plus intol?rable despotisme; mont?e en voiture, elle essuya ses pleurs et n'osa plus se plaindre, car M. des Choisi, disait-elle, avec son mouchoir cramoisi nou? autour de sa t?te , avait une figure si terrible et lui lan?ait des regards si foudroyants, que l'effroi qu'il lui inspirait lui fit presque oublier ses douleurs. Au milieu de la premi?re journ?e on passa dans une ville dont M. des Choisi, qui ?tait curieux, voulut aller voir les monuments; il proposa ? sa femme de le suivre. Elle r?pondit qu'elle ?tait d?j? si fatigu?e, qu'elle n'avait besoin que d'un peu de repos: il la d?posa ? l'auberge de la poste. Lorsqu'elle fut seule dans une chambre, elle se livra, sans contrainte, ? toute l'imp?tuosit? de son chagrin; un demi-quart d'heure apr?s l'h?tesse survint pour lui offrir quelques rafra?chissements, et elle fut ?trangement surprise, en voyant cette jeune dame g?missante et baign?e de larmes; elle l'interrogea; et madame des Choisi imagina de lui faire croire qu'elle ?tait enlev?e par un vilain Turc, qui la conduisait dans son s?rail ? Constantinople. L'h?tesse fut ?galement ?pouvant?e et touch?e de ce r?cit:--Cela ne m'?tonne pas! s'?cria-t-elle; ce Turc ne se g?ne pas; car il n'a m?me pas quitt? son turban, qui nous ? paru si singulier. Elle proposa de s'adresser aux magistrats, et de faire arr?ter ce m?chant Turc; madame des Choisi s'y opposa, en disant qu'elle ?tait r?sign?e ? son sort. L'h?tesse insista; madame des Choisi, afin de se d?barrasser d'elle, lui demanda un quart d'heure pour faire ses r?flexions, assurant que le Turc ne reviendrait que dans trois heures. L'h?tesse alla r?pandre l'alarme dans toute la maison; et les servantes et les valets jur?rent qu'ils ne souffriraient pas que le Turc emmen?t la jeune dame pour en faire une <>. M. des Choisi revint quelques instants apr?s; on lui d?clara nettement qu'il n'enl?verait pas la jeune personne, que l'h?tesse et toute sa maison la prenaient sous leur protection, et qu'il pouvait retourner tout seul en Turquie. M. des Choisi appela ses deux domestiques; et, comme le tumulte rendait toute explication impossible, on se disposait ? combattre, lorsque madame des Choisi, qui avait entendu tout le bruit, parut inopin?ment, en conjurant l'h?tesse et les domestiques de mettre bas les armes. On ob?it d'autant plus promptement, que le couteau de chasse tir? de M. des Choisi, son air intr?pide, et celui de ses deux domestiques avaient d?j? fort ?branl? le courage des assaillants.

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