Read Ebook: La cocarde rouge by Weyman Stanley John Varlet Th O Translator
Font size: Background color: Text color: Add to tbrJar First Page Next Page Prev PageEbook has 2829 lines and 108287 words, and 57 pages--Oh! si fait, avec votre permission; c'est certain, dit l'autre. Et d'ailleurs tout un chacun s'accorde... Mais ? ce moment Gargouf m'aper?ut, me salua, et je n'entendis rien d'autre. Une minute plus tard, cependant, je d?couvris un de mes gens ? moi, Buton le forgeron, au milieu d'un groupe de m?contents. Il me regarda, tout piteux d'?tre pris sur le fait; et je m'arr?tai pour lui administrer une bonne semonce, et veillai ? ce qu'il pr?t le chemin du retour avant de gagner mon g?te. Les Saint-Alais avaient leur h?tel particulier ? Cahors, et comme le marquis m'en avait pr?venu, ils recevaient ce soir-l?. La majeure partie de la compagnie, en effet, se retrouva chez eux apr?s le repas. J'arrivai moi-m?me un peu tard, dans le but d'?viter tout entretien priv? avec le marquis. Je trouvai les salons d?j? pleins et brillamment illumin?s, l'escalier encombr? de valets; et des fen?tres s'?chappaient les accords m?lodieux d'un clavecin. Mme de Saint-Alais avait su attirer chez elle la meilleure soci?t? de la province; et elle la recevait peut-?tre avec moins de somptuosit? que certaines, mais avec tant d'aisance, de go?t et de savoir-vivre, que je cherche en vain une autre maison de ce temps-l? comparable ? la sienne. Elle aimait en g?n?ral ? voir affluer dans ses appartements des h?tes aimables, dont les attitudes gracieuses donnaient ? un salon cet air d'?l?gance et ce charme qui caract?risaient la toilette de l'?poque: soies et dentelles, poudre et diamants, jupes ? paniers et talons rouges. Mais en cette occasion le nombre et l'?clat de l'assistance me frapp?rent d?s le seuil. Ce n'?tait pas l? une soir?e ordinaire; et au bout de quelques pas je devinai qu'il s'agissait d'une r?union politique plut?t que mondaine. Tous ceux, ou presque, qui devaient figurer ? l'Assembl?e, le lendemain, ?taient ici. A vrai dire, cependant que je me frayais un chemin ? travers la foule ?tincelante, j'ou?s bien peu de propos s?rieux, si peu m?me que je m'?tonnai que l'on p?t discuter les m?rites respectifs de l'op?ra italien et de l'op?ra fran?ais, de Bianchi et de Gr?try, et autres futilit?s, ? l'heure o? tant de choses ?taient en suspens; mais je n'eus aucun doute sur les intentions de la marquise: en r?unissant chez elle tout l'esprit et la beaut? de la province, elle visait plus haut qu'? un simple divertissement. Sa pr?tention, je l'avoue, ?tait justifi?e. Du moins l'on ne pouvait se m?ler ? la foule emplissant les salons, affronter tous ces yeux vifs et ces langues spirituelles, respirer l'air charg? de parfums et de musique, sans tomber sous le charme... sans oublier. Tout ? l'entr?e, M. de Gontaut, l'un des plus anciens amis de mon p?re, causait avec les deux Harincourt. Il m'accueillit d'un sourire malicieux et me d?signa discr?tement le fond de la pi?ce. --Avancez, monsieur, fit-il. Le salon tout au bout. Ah! mon ami, que je voudrais encore ?tre jeune! --Vous y gagneriez moins que je n'y perdrais, monsieur le baron, lui r?pondis-je par politesse, en le d?passant. Plus loin, il me fallut r?pondre ? deux ou trois dames, qui m'adressaient avec malignit? des compliments du m?me genre; apr?s quoi je tombai sur Louis. Il m'?treignit la main, et nous rest?mes quelques minutes ensemble. La foule nous pressait; tout voisin de lui, un sot rieur p?rorait sur le Contrat social. Mais ? sentir la main de Louis dans la mienne, ? regarder ses yeux, il me parut qu'un souffle des for?ts envahissait la pi?ce et balayait les lourds parfums. Cependant son air ?tait soucieux. Il me demanda si j'avais vu Victor. --Hier, r?pondis-je, comprenant tr?s bien et son intention et ce qui clochait. Pas aujourd'hui. --Ni Denise? --Non. Je n'ai pas eu l'honneur de la voir. --En ce cas, viens, reprit-il. Ma m?re t'attendait plus t?t. Quelle impression t'a faite Victor? --L'impression qu'il est parti Victor, et revenu grand personnage! r?pliquai-je en souriant. Louis eut un l?ger rire, et haussa les sourcils avec un air de douleur comique. --C'est ce que je craignais, fit-il. Il ne m'a gu?re paru bien satisfait de toi. Mais nous devons tous en passer par ses volont?s, n'est-ce pas? En attendant, viens. Ma m?re est avec Denise dans le salon tout au bout. Ce disant il me fraya le chemin. Mais il nous fallait d'abord traverser le salon de jeu, et la foule ?tait si dense ? l'autre porte que nous ne p?mes tout de suite la d?passer, et tout en distribuant sourires et courbettes, j'eus le temps d'?prouver une l?g?re appr?hension. Nous arriv?mes enfin ? nous faufiler et ? entrer dans une pi?ce plus petite o? il y avait seulement Mme la marquise,--causant debout au milieu du parquet avec l'abb? Mesnil,--deux ou trois dames et Denise de Saint-Alais. Cette derni?re ?tait plac?e sur un canap? aupr?s de l'une des dames; et il va de soi que mes yeux all?rent tout d'abord ? elle. Elle ?tait v?tue de blanc, et je fus singuli?rement frapp? de la voir si menue et enfantine. Tr?s jolie, du teint le plus pur et d'un galbe parfait, elle semblait emprunter un air extravagant de dignit? d?plac?e ? sa toilette c?r?monieuse, ? l'?norme ?difice de cheveux poudr?s qui surmontait son front, et au roide brocart de sa jupe. Avec cela elle ?tait tr?s petite. J'eus le loisir de remarquer ce d?tail, qui me d?sappointa quelque peu, et de me figurer que model?e sur de plus grandes proportions, elle e?t ?t? souverainement belle. Mais la dame sa voisine, en m'apercevant, lui dit quelques mots, et l'enfant--elle n'?tait gu?re plus--leva vers moi son visage soudain empourpr?. Ses yeux rencontr?rent les miens--Dieu merci! elle avait les yeux de Louis--et elle les rabaissa aussit?t, dans une extr?me confusion. Je m'approchai de la marquise pour lui rendre mes devoirs, et baisai la main qu'elle me tendit sans interrompre tout de suite sa conversation. --Mais quelle force! lui disait l'abb?, dont la r?putation ?tait plus ou moins celle d'un philosophe. Sans limites! Sans lacunes! Mal employ?e, madame... --Aussi, le roi est trop bon, r?pondit la marquise, en souriant. --Quand il est bien conseill?, d'accord. Toutefois, le d?ficit? La marquise haussa les ?paules. --Il faut de l'argent ? Sa Majest?, dit-elle. --Soit... Mais o? le prendre? demanda l'abb?, avec un geste qui valait une r?ponse. --Le roi a ?t? trop bon d?s le d?but, r?pliqua Mme de Saint-Alais, non sans une nuance de reproche. Il devait les forcer ? enregistrer les ?dits. N?anmoins le Parlement a toujours c?d?, et il c?dera encore. Pr?sent?s au Parlement le 19 novembre 1787, et destin?s ? permettre le grand emprunt propos? par Brienne. --Le Parlement, oui, r?pliqua l'abb?, avec un sourire de suffisance. Mais ce n'est plus du Parlement qu'il s'agit, et les ?tats g?n?raux... --Les ?tats g?n?raux passent, d?clara noblement la marquise. Le roi reste! --Mais s'il se produit des troubles? --Il ne s'en produira pas, trancha-t-elle sur le m?me ton solennel. Sa Majest? saura les emp?cher. Puis ayant dit encore quelques mots ? l'abb?, elle le cong?dia et revint ? moi. Elle me donna sur l'?paule un l?ger coup d'?ventail. --Oh! le m?chant! fit-elle, avec un regard o? la douceur s'alliait ? un peu de s?v?rit?. Je ne sais comment vous qualifier! Oui, apr?s ce que Victor m'a racont? hier, je me demandais presque s'il fallait vous attendre ou non ce soir. ?tes-vous bien s?r que ce soit ici votre place? --Je m'en porte garant pour mon coeur, madame, r?pliquai-je, en y portant la main. Ses yeux clign?rent avec bienveillance. --En ce cas, dit-elle, portez-le o? il se doit, monsieur. Et avec un grand air de c?r?monie, elle alla me pr?senter ? sa fille: --Denise, voici M. le vicomte de Saux, le fils de mon vieil et excellent ami, Monsieur le vicomte... ma fille. Vous voudrez bien, j'esp?re, l'entretenir, cependant que je rejoins l'abb?. Il est probable que Mlle Denise avait pass? la soir?e dans les affres de la timidit?, ? attendre ce moment, car elle me fit une r?v?rence jusqu'? terre, et puis demeura muette et confuse. Elle oubliait m?me de s'asseoir, et je provoquai de nouveau sa rougeur en l'y invitant. Lorsqu'elle m'eut ob?i, je pris place ? c?t? d'elle, le chapeau ? la main. Mais tandis que je cherchais un compliment convenable, et que je m'effor?ais de d?couvrir en quoi elle ressemblait ? l'enfant de treize ans sauvage et h?l?e que j'avais connue quatre ans plus t?t, la timidit? m'envahit moi aussi. --Vous ?tes revenue la semaine derni?re, mademoiselle? dis-je enfin. --Oui, monsieur, r?pondit-elle, les yeux baiss?s, dans un soupir. --Cela doit vous faire un grand changement? --Oui, monsieur. Silence. Puis je hasardai: --Assur?ment les soeurs ?taient tr?s bonnes envers vous? --Oui, monsieur. --Cependant, vous n'?tiez pas f?ch?e de les quitter? --Non, monsieur. Mais alors la signification de ce qu'elle venait de dire en dernier lieu la frappa, ou bien elle per?ut la banalit? de ses r?ponses, car tout ? coup elle leva vivement les yeux sur moi. Elle ?tait pourpre, et je la devinai sur le point de fondre en larmes. Tout effray?, je me penchai un peu plus vers elle. --Mademoiselle, me h?tai-je de dire, je vous en prie, n'ayez pas peur de moi. Quoi qu'il arrive, vous n'aurez jamais ? me redouter. Je vous supplie de me regarder comme un ami... comme l'ami de votre fr?re. Louis est mon... Add to tbrJar First Page Next Page Prev Page |
Terms of Use Stock Market News! © gutenberg.org.in2024 All Rights reserved.