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Munafa ebook

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Read Ebook: Les Sources by Gratry Alphonse

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Ebook has 789 lines and 54869 words, and 16 pages

Le fond de cette pri?re quotidienne, c'est l'Oraison dominicale: <>, et le reste. Cette pri?re que notre m?re, dans notre premi?re enfance, nous a fait dire sur ses genoux et en joignant elle-m?me nos mains, est celle qui a ?t? dict?e, mot pour mot, par le Christ, le ma?tre des hommes. Cette pri?re, me f?t-elle inintelligible, je veux, ? tous les titres, et vous voulez comme moi la r?p?ter, tous les jours de la vie, matin et soir, jusqu'? la mort. Du reste, lorsque votre esprit s'est ouvert et a regard? le monde et son histoire, vous avez d? comprendre le sens visiblement divin de ces paroles. Elles sont la pri?re essentielle de l'humanit? sur la terre: <> ?videmment, cela m?me est la substance de la pri?re, telle que Dieu doit n?cessairement la dicter ? tout coeur qu'il inspire.

CHAPITRE V

LA LECTURE

J'ai dit un mot de la lecture. Il en faut parler plus au long. Apr?s la pri?re et tout ce qui s'y rapporte, apr?s la m?ditation personnelle, vient la lecture comme source de lumi?re.

Comment user de la lecture pour le progr?s de la Logique vivante, le d?veloppement du Verbe en vous?

Il y a un livre qu'on appelle, entre tous les autres, le livre proprement dit, la Bible. Lisez ce livre.

Et d'abord, croyez-vous qu'il ne puisse y avoir, sur la terre, de parole de Dieu actuellement ?crite?

Il y a des penseurs qui soutiennent que tous les livres sont sacr?s, que toute pens?e est inspir?e, que toute parole est parole de Dieu. Car, disent-ils, s'il est vrai, comme le croient les chr?tiens, que l'homme n'est raisonnable, qu'il ne pense et ne parle que par une participation actuelle ? la lumi?re de Dieu, ou plut?t si, comme nous le soutenons, disent-ils, l'homme est Dieu m?me pensant, comment expliquez-vous que l'homme puisse parler quelque chose qui ne soit pas parole de Dieu?

J'esp?re que vous n'adh?rez pas ? tout ce panth?isme. Mais du moins, si l'on vous enseigne qu'il y a, dans la m?moire des hommes et dans la tradition, des paroles pures et vraiment inspir?es de Dieu, je suis certain que vous n'avez aucune solide raison de le nier.

Voici que, depuis plus de trois mille ans, une grande partie du genre humain, la plus vivante, la partie civilisatrice du monde, qui forme le courant principal de l'histoire universelle, et qu'anime l'?glise catholique, voici dis-je, que ce c?t? lumineux de l'humanit?, par des motifs consid?rables, qu'il vous est facile de conna?tre, tient comme ?tant tout pur, comme certainement saint et divinement inspir?, ce texte ?crit qu'on nomme la Bible. Pourquoi ne le pas croire, si vous croyez en Dieu? Pourquoi ne pas croire d'avance que la bont? du P?re a su parfois inspirer ses enfants?

Vous lirez donc la Bible.

Du reste, comment comprendre qu'un homme, quel qu'il soit, croyant ou autre, ne m?dite pas, avant toute autre chose, les paroles du Christ? Comment comprendre que l'?vangile ne soit pas toujours, pour tout homme de coeur et tout homme qui pense, le premier des livres?

Vous donc, qui voulez ?tre disciple de Dieu et qui avez en vous le sens divin, vous lirez chaque jour l'?vangile. Et quand vous en aurez quelque usage et que vous y lirez ceci: <> quand vous aurez, en effet, entrevu l'insondable lumi?re du texte et pressenti les forces lib?ratrices que sa pratique vous donnerait, vous verrez bien qu'apr?s la pratique m?me de l'?vangile et la pri?re, la m?ditation des paroles du Christ doit ?tre la grande source philosophique, l'aliment principal du d?veloppement du Verbe en vous.

Quand vous commencerez ? comprendre, et ? vous douter enfin de cet ?vangile ?ternel, incarn? dans cet ?vangile historique que vous voyez, vous direz avec Orig?ne: <> Et vous ajouterez avec son commentateur, Thomassin: <>

<> dit Orig?ne, <> Et Thomassin ajoute: <>

Voici comment vous lirez.

Lisez le texte ou la Vulgate. D'ordinaire, mettez une heure ? lire un ou deux chapitres. Quelquefois, une lecture suivie de l'un des quatre ?vangiles est d'un grand fruit. Dans ce cas, il faut lire tant?t dans une langue, tant?t dans une autre, fran?ais, allemand, anglais, etc. Dans tous les cas, efforcez-vous de vous appliquer ? vous-m?me tout ce que vous lisez. Priez Dieu ardemment de vous faire entrer dans le fond du sens. Efforcez-vous, et ceci est tr?s important, de trouver dans les discours du Christ, qui d'ordinaire semblent passer brusquement d'un objet ? un autre, l'unit? puissante et vivante qui les caract?rise. A mes yeux, une des plus fortes preuves intrins?ques de la divinit? de ces discours, c'est leur saisissante unit? jointe ? leur ?tonnante vari?t?. Quand on est parvenu au fond du sens, on aper?oit une sorte de lumi?re ?ternelle, immense et simple, dans laquelle vivent et se touchent tous les objets de la cr?ation, les plus divers, les plus lointains, comme en Dieu m?me. Si jamais il vous est donn?, une seule fois, de voir les mots ?vang?liques que J?sus-Christ lui-m?me compare ? des grains de bl?, s'il vous est donn? de voir ces germes ?clater et s'ouvrir, d?velopper leurs tiges, leur beaut?, leurs parfums, leurs tr?sors, vous n'oublierez pas ce spectacle. Et quand vous vous serez nourri de leur substance, qui est ? la fois vigne et froment, et plus encore, ou plut?t qui est je ne sais quelle substance universelle impliquant tout, vous comprendrez pourquoi, le Christ ayant prononc? sur le monde ce peu de mots que nous recueillons en dix pages, ces quelques mots ont produit dans l'histoire, je ne dis pas la plus grande, je dis la seule r?volution morale, religieuse et intellectuelle qu'ait vue le genre humain.

Vous voyez, vous qui voulez avoir Dieu pour ma?tre, que je ne cesse de vous dire une seule chose: ?coutez Dieu dans le silence, dans la m?ditation, dans la pri?re, dans le travail de la pri?re ?crite, dans la lecture. Comme lecture, je ne vous ai encore parl? que d'un seul livre, l'?vangile. Mais la lecture du livre divin exclura-t-elle les livres humains? Br?lerons-nous tout pour l'?vangile comme on a tout br?l? pour le Coran? Non: le livre divin n'exclut pas plus les livres humains que l'amour de Dieu n'exclut l'amour des hommes. L'amour de Dieu donne l'amour des hommes; de m?me on puise dans l'?vangile l'intelligence des pens?es des hommes: on y puise l'esprit philosophique et scientifique le plus profond; et, il faut dire avec saint Thomas: <> Un esprit ?largi par l'?vangile, voit dans les livres humains des ?tendues, des profondeurs, que l'homme souvent n'y a pas mises, mais qu'il a rencontr?es et laiss?es au milieu de son oeuvre, ? son insu. D'ordinaire, notre ?troite pens?e ne voit, dans le livre ou la pens?e d'autrui, que ce que les mots et le style expriment ? la rigueur. Loin de pr?ter aux autres, nous leur ?tons. Nous leur faisons toujours, dans notre entendement parcimonieux et inhospitalier, un lit de Procuste. Mais l'esprit dilat? par l'Esprit du Christ a cet incomparable don des langues, qui comprend les langages divers des diff?rentes natures d'esprit. Il a cette bienveillance intellectuelle qui transfigure les accidents de la parole: remonte de la parole ? son sens dans l'esprit, et de ce sens lui-m?me, tel qu'il est dans l'esprit de nos fr?res, ? l'?ternelle id?e qui est en Dieu, et qui porte et inspire ce sens. En sorte que, parfois, cette clairvoyante charit? de l'esprit voit les choses m?me ? travers une pens?e mal con?ue et plus mal exprim?e, et elle se sert de ces d?bris pour reconstruire la v?rit?, comme la science reconstruit un ?tre, qui fut vivant, avec un d?bris de ses os.

On sait qu'il n'y avait pas de livre si d?testable dont Leibniz ne tir?t quelque fruit.

Faites de m?me ou plut?t faites mieux. Puisqu'il est permis de choisir, ne lisez que les excellents. Il faut peu lire, disait Malebranche. Il ne faut lire qu'un livre, disait un autre, voulant faire comprendre par l? la puissance toujours consid?rable de l'unit?. Mais que serait-ce si vous saviez trouver l'unit? des esprits du premier ordre, et si vous pouviez fr?quenter comme une seule soci?t?, par voie de comparaison continuelle, Platon et Aristote, saint Augustin et saint Thomas d'Aquin, Descartes, Bossuet et F?nelon, Malebranche et Leibniz! Ce sont l?, je crois, les principaux g?nies du premier ordre. Puissiez-vous parvenir ? en voir l'unit?! Puissiez-vous parvenir ? comprendre dans quel sens g?n?ral et commun Dieu inspire les grands hommes, et ce qu'il veut de l'esprit humain! Puissiez-vous clairement comprendre, dans Aristote et dans Platon la grandeur de l'esprit de l'homme et ses bornes, et dans les autres, l'immensit? qu'ajoute ? la raison humaine la lumi?re r?v?l?e de Dieu!

CHAPITRE VI

Mais, disions-nous, qu'est-ce que Dieu veut de l'esprit humain? Grande question, que je n'aborde pas ici tout enti?re. Je poursuis ces conseils pratiques. Il est vrai qu'ils nous m?nent ? consid?rer un c?t?, fort important pour nous, de cette question.

Je vous ai dit que, quand un homme se donne vraiment ? Dieu et devient son disciple, Dieu le pousse ? une oeuvre, le salut du si?cle o? il vit. Dieu lui montre le monde malade, couch? dans les t?n?bres et la souffrance; il lui donne le regard du Christ pour en sonder les plaies, et quelque chose du coeur du Christ pour les sentir: puis il lui dit, au fond du coeur: <>

Quand l'homme comprend et se d?cide ? devenir un ouvrier, un de ces <> qui fortifient leurs fr?res, et que Dieu suscite quelquefois pour sauver un si?cle ou un peuple, alors Dieu lui inspire, par la compassion et l'amour, l'intelligence, ou instinctive ou d?velopp?e, de l'oeuvre ? entreprendre.

Zach., I, 20, 21. Et ostendit mihi Dominus quatuor fabros... ut dejiciant cornua gentium.

Or, aujourd'hui, quelle est la plaie et quelle est l'oeuvre?

Il n'est pas n?cessaire d'?tre proph?te pour le savoir, J?sus-Christ dit aux hommes dans l'?vangile: <>

Vous donc qui voulez devenir ouvrier parmi les hommes, rendez-vous attentif aux signes des temps qui s'aper?oivent.

Mais d'abord, qu'attendez-vous de la marche de l'humanit? sur la terre? Vers quel avenir va le monde? Comment finira-t-il?

Pour moi, je crois que le monde est libre et finira comme il voudra. Le monde finira comme un saint, comme un sage, ou comme un m?chant: peut-?tre comme une de ces ?mes insignifiantes et inutiles que Dieu seul peut juger. Tout est possible. L'humanit? est libre. Il n'y a pas d'article de foi sur ce point. La seule chose qu'en ait dite le Christ, si toutefois j'entends bien ses paroles, est une question qu'il a pos?e sans la r?soudre. <> Il semble que, sur ce sujet, le doute est la v?rit? m?me.

Or, je ne sais si vous sentez ceci comme je le sens, mais ce doute m'?lectrise. Le doute ?nerve d'ordinaire; ici il vivifie, il transporte. Oui, il se peut que sur la face de cette terre, comme fruit de tant de larmes et de luttes, le bien l'emporte enfin, que le r?gne de Dieu arrive, et que sa volont? soit faite en la terre, comme au ciel. Il se peut que l'histoire finisse par une moisson. Et il se peut aussi que tout finisse par la st?rilit?, comme la vie du figuier maudit; que, comme on voit des hommes, ?puis?s de d?bauche et perdus de folie, mourir avant le temps, le monde aussi vienne ? mourir avant le temps, ?puis? de d?bauche et perdu de folie. Il se peut que la justice et la v?rit? soient vaincues, et rentrent dans le sein de Dieu en maudissant la terre qui aura refus? de donner son fruit. Or, vous savez qu'aujourd'hui, parmi nous, bien des esprits d?courag?s soutiennent qu'il en sera certainement ainsi. D'autres, ?trangement confiants, d?clarent qu'il en sera, sans aucun doute, tout autrement, et que le bien doit triompher sur terre. Moi, je l'ignore, et je ne sais qu'une seule chose, c'est que l'humanit? est libre et que l'homme finira comme il voudra. Je sais que vous, moi, chacun de nous, nous pouvons ajouter nos mouvements et notre poids au mouvement de d?cadence qui nous emporte vers l'ab?me, ou bien, au nom de Dieu, et en union avec le Christ, travailler ? sauver le monde, et ? redresser, en ce moment m?me, la direction du si?cle et de l'histoire, si elle est fausse.

Mais, je vous le demande maintenant, et ceci est la plaie du si?cle, qu'est-ce qui nous manque ? tous pour cette oeuvre?

Il nous manque la foi.

Si vous aviez de la foi, seulement comme un grain de s?nev?, a dit le Christ, vous transporteriez les montagnes, et rien ne vous serait impossible. Or, qui est-ce qui croit maintenant que rien n'est impossible? Qui est-ce qui croit qu'on peut transporter les montagnes, qu'on peut gu?rir les peuples, faire pr?dominer la justice dans le monde, et, dans l'esprit humain, la v?rit?? O? sont-ils, ces croyants?

La foi manque dans ceux qu'il faut sauver, et l'on ne peut pas les saisir; et la foi manque dans ceux qui veulent ou croient vouloir sauver les autres, et ils n'ont pas la force d'entra?ner ceux qu'ils auraient saisis.

Quand le Fils de l'Homme reviendra, pensez-vous qu'il trouve encore de la foi sur la terre?

Je le vois, nous sommes sous le coup de cette question. Voil? la plaie.

<> Voil? donc la pri?re qu'il faut faire, et l'oeuvre ? laquelle il faut nous attacher.

Mais comment?

Il y a deux mani?res. L'une, plus haute que la philosophie, ne nous regarde pas ici. Je l'indiquerai cependant. L'autre pr?cis?ment est l'oeuvre de la philosophie, et r?pond ? la question pos?e plus haut: Qu'est-ce que Dieu veut de l'esprit humain?

Le plus puissant moyen de retrouver la foi est celui qu'a employ? saint Vincent de Paul. On lit, dans la vie de cet homme h?ro?que, un fait trop peu connu. Un jour, ?mu de compassion par l'?tat d'un malheureux pr?tre, docteur en th?ologie, qui perdait sa foi parce qu'il avait cess? d'?tudier la grande science, saint Vincent de Paul pria Dieu de lui rendre la vivacit? de sa foi, s'offrant de se soumettre lui-m?me, s'il le fallait, au fardeau que ce pauvre fr?re ne pouvait pas porter. Il fut exauc? ? l'heure m?me, et ce grand saint resta, pendant quatre ans, comme priv? de cette foi qui cependant ?tait sa vie. Savez-vous comment il sortit de cette ?preuve? Il en sortit en devenant saint Vincent de Paul, c'est-?-dire tout ce que signifie ce nom. C'est cette ?preuve, inexplicable en apparence, qui a fait saint Vincent de Paul, c'est-?-dire l'esprit de foi, d'amour, de compassion incarn? dans une vie tout enti?re. C'est en se donnant ? la compassion sans r?serve que ce grand coeur a retrouv? la possession paisible de sa foi. <>

Abelly, t. II, p. 298.

Voil? l'exemple. Que notre si?cle en fasse autant, et se donne, pour l'amour de Dieu, au service des pauvres. Il n'y aura bient?t plus de lutte contre la foi.

Tel est le grand et le premier moyen de ramener la foi sur la terre pour la sauver. Voici le second.

Le premier est ce que Dieu veut du coeur humain. Le second est ce que Dieu veut de l'esprit humain. Ceci regarde la Logique. Donnez-moi toute votre attention.

Quelle est depuis trois si?cles, en France, et plus ou moins dans toute l'Europe, et par cons?quent dans le monde, la marche de l'esprit humain sous le rapport de la foi? Je vois un grand si?cle de foi, le dix-septi?me; je vois un si?cle d'incr?dulit?, le dix-huiti?me; je vois un si?cle de lutte entre la foi et l'incr?dulit?, c'est le n?tre. Qu'est-ce qui l'emportera? C'est l?, dis-je, ce qui d?pend de nous.

Qu'?tait le dix-septi?me si?cle? Un docteur en th?ologie, d'abord; et en outre, sous le rapport intellectuel, le point le plus lumineux de l'histoire. Le dix-septi?me si?cle, lui seul, est le p?re des sciences, le cr?ateur de cette grande science moderne dont nous sommes si fiers aujourd'hui. On a, depuis, perfectionn?, d?duit et appliqu?; mais il a tout cr??, et, si l'on ose ainsi parler, tout dans l'ordre scientifique, a ?t? fait par lui, et rien de ce qui a ?t? fait jusqu'? pr?sent n'a ?t? fait sans lui. Il y a eu l? comme une inspiration du Verbe pour l'av?nement des sciences. Ce si?cle, du reste, ?tait le plus pr?cis, le plus complet des si?cles th?ologiques; le plus grand sans comparaison des si?cles philosophiques, et le plus grand des si?cles litt?raires.

Mais apr?s cet immense ?lan, l'esprit humain, semblable ? ce docteur qui avait cess? d'?tudier, cessa aussi de travailler, non la physique, non les math?matiques, mais la th?ologie et la philosophie, la science de Dieu et celle de l'homme.

Et alors la foi se perdit.

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