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Munafa ebook

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Read Ebook: Les endormies by Boisnard Magali

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Ebook has 2005 lines and 67829 words, and 41 pages

Elle r?p?te cela et quelqu'un survient, un familier de la maison qui r?pond:

--Vous dites bien, ? Noura, et cet Islam je veux aussi le relever; car c'est un malade qui peut gu?rir.

--Comment? interrogea l'Amie.

--En ouvrant des ?coles pour une instruction islamique ? laquelle s'adapteront nos sciences modernes. Le mouvement nationaliste en Egypte rallume le flambeau du Caire. Nous approuvons sa flamme. Nous arracherons le malade ? sa l?thargie; il y est rest? trop longtemps et l'erreur est venue,--je r?p?te un mot de Mismer,--l'erreur est venue de ce que l'immobilit? apparente de l'Islamisme a ?t? prise pour de l'impuissance. Mes ?coles seront aussi f?minines que masculines. On y prouvera entre autres choses l'absurdit? de croire que Mahomet s?questra les femmes. Il leur devait beaucoup: il t?moigna sa reconnaissance en ?largissant et en prot?geant leur sort. Il fut un civilisateur pour tout le peuple et un sauveur pour ces g?n?rations de petites filles que les ant?-islamiques enterraient vivantes. Mes professeurs auront pour mission de tuer les pr?jug?s, de provoquer des ?mules de Saf?a, la po?tesse, qui chantait ses strophes ? Cordoue, de Lobna, docte en science, de Fatma, la bibliophile, de M?riem, ma?tresse d'?rudition, d'Euldj?a et d'Oum-Hani, les combattantes. Ils enseigneront la v?rit? du Koran. Pour qu'une soci?t? subsiste, il faut que les femmes soient de moiti? dans l'action g?n?rale. Nous rappellerons aux Musulmanes contemporaines les actes de leurs a?eules lettr?es, diplomates, savantes ou guerri?res. Nous susciterons en elles l'ambition d'un retour des temps c?l?bres!

Ma?tre de l'heure.

--C'est vouloir beaucoup, trop peut-?tre. Cependant, j'aime votre foi en la bont? de votre effort.

--Noura est une volont? qui s'aggrave d'ent?tement, dit l'Amie. C'est une forte. Il est possible qu'elle atteigne son but.

La jeune fille souriait, le front haut, illumin? de certitude.

--Je veux d?s aujourd'hui entrevoir celles que je dois initier. Mon amie, vous avez promis d'?tre mon premier guide. Allons.

Elle coiffait ses lourds cheveux d'un chapeau de style s?v?re et simple.

Et l'Amie proposait au Mahdi:

--Voulez-vous nous accompagner jusqu'au seuil des portes d?fendues?

Ils traversaient l'atrium mauresque au velarium blanc. Dans une salle claire, des fillettes indig?nes s'appliquaient ? perp?tuer la tradition des brodeuses de jadis. Elles saluaient leur ma?tresse, la <>, qui leur apprenait l'art de retrouver le jeu des broderies sur l'?tamine et la soie. Les doigts s'escrimaient au dessin fantasque et r?gulier, des doigts courts et fins, aux ongles bomb?s.

La M?lema soupira:

--En v?rit?, Noura, je ne souhaite pas que ces petites cr?atures, jolies comme des statuettes pa?ennes, deviennent jamais des ressemblances de nos gravures de mode illustr?e.

--Elles pourront devenir des ressemblances d'une autre forme de la femme moderne.

--La femme moderne! Un essai de m?langes et de combinaisons.

--Le r?sultat est proche de la perfection. C'est une force et une beaut? dont la force peut ?tre la beaut?, mais dont la seule beaut? n'est pas la force.

Ils avaient franchi la porte de vieux bois, clout? de bronze et descendaient des degr?s ensoleill?s sur quoi penchait l'ombre d'un laurier-rose. La jeune fille reprit:

--Le temps est loin o?, perdues dans les plis des robes maternelles, nous n'avions d'autre int?r?t dans la vie que l'attente passive ou doucement inqui?te du n?cessaire mari. Aujourd'hui, nous sommes libres de penser et d'agir selon notre individualit? respective. Je ne vous parle pas de celles qui s'acharnent ? de ridicules revendications ou s'insurgent contre des choses qui sont la raison d'exister et les conditions d'harmonie de l'Univers. Telle que je l'approuve, la vraie femme ne doit pas, sous un vain pr?texte d'ind?pendance, se d?tourner de son devoir d'?pouse et de m?re. Mais, au lieu d'attendre passivement l'heure de ce devoir, elle doit mettre ses ann?es libres au service d'une id?e, agir, lutter, le visage tourn? vers le lendemain. Et c'est d'elle que pourront na?tre des hommes et des femmes, non des pantins et des poup?es.

L'Amie souriait.

--Voil? bien l'emballement et la volont? de la jeunesse qui croit ? la perfection possible!

--Toute r?alisation est une diminution du r?ve. Tout accomplissement est la mort du plus beau d?sir... Moi aussi j'ai voulu une oeuvre; elle n'est pas selon mon vouloir. Je ne peux donner ? mes ?l?ves qu'un pr?servatif contre une mis?re ?ventuelle, un secours contre l'oisivet? p?rilleuse de plus tard. Enfant, puissiez-vous accomplir davantage.

Noura pronon?a ardemment:

--Je veux me donner toute ? cette t?che de provoquer un ?veil au foyer arabe, par l'enfant, la jeune fille, la femme. Vieil Islam, tes petites filles feront acte d'annonciatrices en leur exemple efficace, tes petites filles que j'instruirai dans la ferveur de mes ?lans et de mes enthousiasmes.

Et ce fut la voix persuasive de celui qui marchait pr?s d'elle:

--Vos ?lans, vos enthousiasmes, c'est l'esprit int?rieur, l'intelligence de la vie qui vous prend sur sa grande aile et qui vous porte sur la montagne pour vous montrer les royaumes de la terre. Et vous ?tes riche et enivr?e de ce spectacle, ?lue par votre don, capable de go?ter le sel de toutes les joies et de toutes les larmes.

Les hauts quartiers de la vieille cit? maure, espagnole et turque.

Des ruelles impr?vues, d?clives ou remontantes, inimagin?es en la cit? neuve et franque. Ruelles ?quivoques, aux murs bleus, souill?s, aux pav?s in?gaux qui font penser au lit d'un torrent dess?ch?, aux portes basses, closes ou invitantes, fleuries de prostitu?es andalouses ou musulmanes.

Au creux des profondes impasses, les murs sont l?preux et nus, trou?s d'un soupirail louche, sinistre pour les yeux ?trangers. Des corniches mi-ruin?es, des saillies de pierre et de bois pourri nourrissent la v?g?tation rachitique d'une herbe triste.

Quand un peu de soleil t?tonne jusqu'aux pav?s visqueux, les choses s'effarent de cette intrusion dans l'humide et naus?abonde p?nombre.

La ma?da est une petite table ronde et basse, la derbouka un tambourin en forme d'amphore.

Dans le fond sombre d'une cellule, la face ivoirine d'un taleb ?merge, s'absorbe sur des feuillets ?pais, manuscrits ? l'ancre brune, altern?e d'encre verte, jaune et rouge; les commentaires du Koran trac?s par le fin calame de roseau d'un lettr? de la Mekke.

Lettr?.

Et ce sont encore les ?choppes o? les Marocains et les Soudanais d?coupent et brodent l'odorant <>, pour les harnais des ?talons de guerre et de fantasia, les bottes rouges des chefs, les coussins o? se pla?t le repos des femmes.

Cuir rouge et souple.

Des ?nes montent et descendent charg?s de sacs de c?r?ales ou de couffins d?bordants de l?gumes. Des porteurs d'eau, la cruche de cuivre ? l'?paule, font retentir l'anneau de fer des portes. Le froc suintant d'un marchand d'huile, effleure les passants. Des Musulmanes circulent pour des achats et des visites, avec un visage uniforme, le visage du voile d'?paisse mousseline blanche qu'?claire le regard anonyme, provocateur ou langoureux des yeux ombr?s. Le cliquetis des anneaux d'argent se m?le au craquement de chaussures neuves dont le vernis luit.

Et des hommes, assis sur les larges bancs des caf?s, ou errant en qu?te d'aventures, invectivent des enfants qui se bousculent avec des chiens rageurs, des chats en fuite...

Noura et son amie s'arr?t?rent devant une porte basse. Leur compagnon les quittait.

Sur les deux femmes, une cordelette tir?e par un poids de pierre referma la porte entr'ouverte.

Des escaliers sinuaient dans l'ombre. Sous le rectangle d'une meurtri?re, dans un trou lugubre comme un in-pace, on distinguait une cr?ature accroupie, roulant dans un plat noir une farine grise.

--Une abandonn?e, expliqua la M?lema. Sa cellule est trop ?troite pour qu'elle puisse compl?tement s'y ?tendre.

Les escaliers gravis, elles furent dans une chambre lumineuse. Deux veuves l'habitaient. Anciennes ?l?ves de l'Amie, elles vivaient en brodant des carr?s d'?tamine, sans valeur grande et qui plaisaient aux touristes Anglais et Teutons.

Elles accueillirent Noura d'une amabilit? ? fleur de l?vre, peu communicative, ? peine curieuse. Cependant elles aim?rent l'entendre parler leur langue et la questionn?rent sur son pays, l?g?rement, sans envie de le mieux conna?tre, satisfaites de leur horizon blanc et bleu sur la ville et la mer, ? travers la fen?tre taill?e en ogive.

Elles trouvaient Noura tr?s belle ? cause de ses yeux gris sous les cheveux sombres.

--N'est-elle pas mari?e? disaient-elles. Et pourquoi? Les jours apr?s les jours prennent doucement sa beaut?. Elle les laisse voler des joies ? celui qu'elle aimera.

Noura devait entendre souvent exprimer cette pens?e; car, en Islam d'Afrique il n'est qu'un devoir f?minin, l'amour, et celle qui le n?glige ou s'en d?tourne est coupable ou folle.

Les femmes s'entretenaient avec la M?lema; mais on sentait dans leur causerie une sorte de retenue qui provenait de la pr?sence de Noura. Leurs paroles ?taient lentes et douces d'affectueuses m?taphores.

--Elles vous aiment, remarquait la jeune fille.

--Autant qu'elles peuvent aimer et il y a longtemps qu'elles me consid?rent comme ?tant presque des leurs.

--Vous avez fait beaucoup pour elles.

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