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Munafa ebook

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Read Ebook: Chercheurs de sources by Melegari Dora

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Ebook has 432 lines and 53806 words, and 9 pages

DORA MELEGARI

CHERCHEURS DE SOURCES

PARIS LIBRAIRIE FISCHBACHER SOCI?T? ANONYME 33, RUE DE SEINE, 33

Tous droits r?serv?s

OUVRAGES DE DORA MELEGARI

AMES DORMANTES 6e ?dition. 1 volume in-12 3 fr. 50 Ouvrage couronn? par l'Acad?mie fran?aise

FAISEURS DE PEINES ET FAISEURS DE JOIES 7e ?dition. 1 volume in-12 3 fr. 50

CHERCHEURS DE SOURCES 1 volume in-12 3 fr. 50

ROMANS

Expiation . Marthe de Thiennes . Les Incertitudes de Livia. Id. Dans la vieille rue. Id. La Duchesse Ghislaine. Id. Kyrie Eleison. Id. La petite Mlle Christine . Les M?res: Caterina Spadaro. Id.

AUTRES OUVRAGES

Journal intime de Benjamin Constant, et lettres ? sa famille et ? ses amis, avec une Introduction par Dora Melegari. Lettres intimes de Joseph Mazzini, avec une Introduction par Dora Melegari. La Jeune Italie et la Jeune Europe. Lettres in?dites de Joseph Mazzini ? Louis-Am?d?e Melegari, publi?es par Dora Melegari. 1 volume in-12 3 fr. 50

EN ITALIEN

Le tre capitali.--1er volume: La citt? forte. Il sonno delle anime. 2e ?dition. La Giovine Italia e la Giovine Europa, dal carteggio inedito di Giuseppe Mazzini a Luigi Amedeo Melegari. Artefici di pene ed Artefici di gioie, 2e ?dition.

EN PR?PARATION

Amis et Ennemis.

A CEUX QUI SAVENT VOIR ET N?ANMOINS ESP?RENT

PR?FACE

Apr?s une longue p?riode improductive, nous assistons, depuis quelques ann?es, ? une exub?rante floraison d'?tudes philosophiques, religieuses et mystiques; mais ces ouvrages, dont le but devrait ?tre la recherche d'une vie meilleure, plus large et plus joyeuse, s'occupent assez rarement de l'application de leurs th?ories ? la vie v?cue. Faut-il en conclure que leurs auteurs se sont complus uniquement ? des exercices intellectuels ou que la crainte secr?te de d?terminer les cons?quences de leurs principes et celles m?me des principes oppos?s, pousse ces ?crivains ? garder le silence sur le c?t? pratique des questions qu'ils d?veloppent?

Faire du spiritualisme th?orique et ne pas aborder les probl?mes moraux qui en d?coulent semble illogique: cette r?serve d?note-t-elle un manque de courage ou une incertitude de pens?e? Pourquoi tant de r?ticences et d'h?sitations? Le fait d'?tablir la n?cessit? d'une ligne de conduite conforme aux principes qu'on accepte ou qu'on professe, n'implique point que tous auront la constance de la suivre sans interruption; ne pas pr?voir les reculs et les chutes possibles indiquerait un manque de discernement, une conception erron?e de la nature humaine et une singuli?re ignorance des forces secr?tes qui la dirigent ou l'?garent. Durant certaines p?riodes de sa vie, l'homme ne peut ?tre sans cesse arm? victorieusement contre les puissances tentatrices qui le sollicitent, en lui et hors de lui. Seuls les h?ros, les sto?ques, les rois d'eux-m?mes et ceux qui ont le privil?ge de se sentir en contact avec les puissances invisibles, sont capables de pers?v?rer toujours, sans faiblir jamais, dans la recherche de la vie meilleure.

Cela n'est pas, h?las, possible ? tous; plusieurs tr?buchent et m?me tombent en route. Mais ceux qui ont eu, ne f?t-ce qu'une seule fois, la vision nette de ce que l'homme doit ?tre, se rel?vent toujours et se remettent, plus ou moins bris?s ou meurtris, ? la culture de leur jardin int?rieur. Il est, par cons?quent, indispensable de conna?tre et de d?finir ce qu'un certain ordre de croyances implique, comme ligne de conduite personnelle. Mais, je le r?p?te, les observateurs de la psych? humaine et les chercheurs de v?rit?s profondes ?vitent volontiers d'appuyer sur ce point. Ils pr?f?rent rester ? la surface intellectuelle des questions et se refusent d'aider au d?veloppement de la conscience g?n?rale; c'est pourtant la seule chose n?cessaire, puisque d'elle proc?de le sentiment de la responsabilit?, sans lequel l'?tre humain n'est qu'un atome s'agitant ?perdument dans le vide.

Lorsqu'arriv? ? la maturit? de l'?ge, l'homme qui n'a pas cultiv? sa vie int?rieure, s'aper?oit tout ? coup qu'il n'est qu'un automate perfectionn?, et essaie de descendre en lui-m?me ? la recherche de sa conscience, il doit parcourir un chemin long, fatigant, obscur, et souvent il n'arrive pas ? r?veiller l'endormie ou ? ressusciter la morte! Au contraire, si, jadis, elle a v?cu et parl? en lui, il r?ussit toujours ? la tirer de son sommeil et de son silence.

Habituer l'homme ? ?tablir un dialogue constant entre sa raison et sa conscience, lui enseigner, d?s l'enfance, ? se rendre compte de ce qu'il voit, de ce qu'il sent, de ce qu'il fait, devrait ?tre la principale pr?occupation des moralistes et des ?ducateurs. Ainsi l'humanit? serait d?barrass?e de cette conception superficielle et automatique de l'existence, qui retarde l'?volution de la plupart des ?tres.

Rendre l'homme conscient en toute chose, c'est lui donner des lettres de noblesse, c'est ?largir son horizon, c'est le consoler du bonheur, s'il ne l'a pas, c'est, s'il le poss?de, en centupler, pour lui, les jouissances.

Mais l'usine o? s'?labore la vie consciente n'est pas la m?me pour tous. Dans ces myst?rieuses profondeurs, les jets et les flamines jaillissent de fa?on diff?rente et, pour les faire surgir, chaque ?me a un ressort qu'il faut savoir toucher. Par cons?quent, d?couvrir les sources est toute la science de l'?ducation et de la vie.

Les po?tes racontent qu'Armide avait l'oreille si fine qu'elle entendait l'herbe cro?tre. Ceux qui veulent ?veiller chez l'homme le d?sir des satisfactions sup?rieures devraient faire comme la magicienne antique: appliquer leur oreille ? la terre et essayer d'y percevoir le murmure souterrain des sources cach?es.

Rome, janvier 1907-avril 1908.

CHERCHEURS DE SOURCES

CHAPITRE PREMIER

CHERCHEURS DE SOURCES

Tu frapperas le rocher et il en sortira de l'eau.

L'art de la rabdomancie est tr?s ancien, en Orient. Avec leur baguette divinatoire, les rabdomanciens d?couvraient les tr?sors et les sources cach?es. La verge de Mo?se fit jaillir l'eau du rocher, et Circ? ?tait sans doute, elle aussi, arm?e d'une baguette magique, quand elle changea en pourceaux les compagnons d'Ulysse.

Le b?ton a ?t?, de tout temps, le symbole des forces myst?rieuses. Mercure avait son caduc?e, Bacchus son thyrse, Aaron sa verge. Chez les Francs, et m?me chez les premiers Cap?tiens, les h?rauts d'armes portaient devant les chefs une baguette sacr?e, marque de leur dignit?.

Cependant, l'usage de la branche de coudrier pour la d?couverte des tr?sors et des sources ne date gu?re, en Europe, que du seizi?me si?cle. Longue de deux pieds et l?g?rement courb?e au milieu, elle devait appartenir ? la pousse de l'ann?e et avoir ?t? coup?e, le premier mercredi de la lune, entre onze heures et minuit, tandis que certains mots sp?ciaux ?taient prononc?s. Ensuite, on la b?nissait selon la formule magique, et lorsque le rabdomancien arrivait ? l'endroit o? se trouvait la source, la baguette semblait tourner entre ses mains comme sollicit?e par des forces inconnues.

On ignore, du reste, pourquoi cette vertu magique a ?t? attribu?e au coudrier. Est-ce parce qu'? son ombre les bergers de Virgile se livraient au combat du chant et qu'on en br?lait le bois, le jour des noces, pour porter bonheur aux jeunes ?poux?

Phylis aime les coudriers. Et tant qu'elle les aimera, Les coudriers l'emporteront Et sur les myrtes de V?nus Et sur les lauriers d'Apollon!

Phylis est morte depuis presque deux mille ans, et la branche de coudrier fait encore jaillir l'eau des sources. L?gende, superstition ou force physique, inconnue encore et que la science d?terminera quelque jour, peu importe! C'est le symbole qui m'int?resse; c'est lui que je voudrais d?gager et appliquer, car il renferme un enseignement profond. L'?me des hommes est semblable ? la terre; elle contient des sources cach?es qu'on ne s'occupe pas assez de faire jaillir, et qui pourraient changer en jardins fleuris, des sols inf?conds; en vignes luxuriantes, des rochers arides!

Se donner la t?che de chercher les sources serait, pour les bonnes volont?s humaines, un in?puisable et splendide champ d'activit?. Si les personnes qui croient savoir, par leur propre exp?rience, o? se trouvent la v?rit?, la lumi?re et la joie, s'armaient de la branche de coudrier pour d?couvrir les eaux courantes dans les ?mes qui les cachent, nous marcherions vraiment vers une humanit? meilleure; et ceux qui auraient aid? cette transformation, dans la mesure de leur intelligence et de leur force, pourraient mourir avec la certitude de n'avoir pas v?cu en vain.

Ce qu'il faut essayer tout d'abord, et cela d?s les premi?res ann?es de la vie, c'est de d?velopper l'imagination de l'enfant. Pour sa sensibilit?, on doit attendre, car souvent, dans de petits corps fragiles, une sensibilit? pr?matur?e nuit ? la sant? physique. L'imagination n'offre pas les m?mes dangers, et c'est l'une des sources que l'on fait jaillir le plus facilement de l'?me enfantine. Chez quelques-uns, la source est pauvre, et il faut se h?ter avant qu'elle ne se soit tarie d'elle-m?me, ou perdue sous terre en petits ruisseaux qui se dess?chent vite. L'homme d?pourvu d'imagination est une pauvre cr?ature mis?rable, m?me si elle semble riche, car l'imagination est la force et la joie de l'esprit. Le devoir des ?ducateurs est donc,--comme celui des hygi?nistes en ce qui concerne le d?veloppement du corps,--de donner tous leurs soins ? l'accroissement de cette puissance de vie, et de ne l'?touffer sous aucun pr?texte.

Dans la seconde moiti? ou le second tiers du dix-neuvi?me si?cle, apr?s le d?clin du romantisme, l'imagination a ?t?, pendant un temps, d?pr?ci?e et consid?r?e comme une facult? d?mod?e, nuisible au succ?s des int?r?ts mat?riels, et qu'il fallait, par cons?quent, ?liminer de gr? ou de force des jeunes cerveaux. Tous les p?dagogues s'y sont employ?s. Dire d'un jeune homme ou d'une jeune fille: <> ?quivalait presque ? une injure, et ceux qui poss?daient ce tr?sor le cachaient comme une tare pour ne pas devenir suspects. La signification du mot n'?tait m?me plus comprise par ses d?tracteurs. Le vulgaire avait fini par appeler imagination, non plus la charmeuse qui jette un voile d'or sur toutes choses, mais le d?faut, propre ? certains esprits, de se cr?er de fausses et chim?riques illusions, c'est-?-dire de donner au moindre incident une port?e qu'il ne poss?de point. Or cette tendance pu?rile ne doit pas ?tre class?e sous le nom d'imagination; elle indique simplement une mentalit? vaniteuse, d?s?quilibr?e et d?pourvue de discernement.

L'imagination a une bien autre envergure; ses ailes, qu'elles soient d?licates comme celles du colibri, ou puissantes comme celles de l'aigle, portent toujours sur les hauteurs. L'homme ? qui les dieux ont conf?r? ce pr?cieux don ne pourra jamais tomber tout ? fait bas. On me citera Edgar Po?, Musset, Verlaine et d'autres po?tes encore, dont la muse dut plusieurs fois se voiler le visage; mais ceux-l?, du moins, sentaient leur honte, et plusieurs d'entre eux trouv?rent des accents de terrible angoisse pour d?crire leurs chutes. D'autres, l'acc?s pass?, se reprenaient et planaient parfois ? des hauteurs vertigineuses. S'ils n'avaient pas eu d'imagination, ils auraient succomb? sans souffrance et se seraient vautr?s voluptueusement dans la boue o? ils ?taient tomb?s. Puis, ils seraient morts obscurs, dans l'abjection, sans avoir eu la vision des cimes, ni su faire vibrer les coeurs.

M?me, exception faite des po?tes, on peut affirmer que l'imagination est ? la base de toute grandeur et de tout progr?s. S'ils n'avaient pas eu d'imagination, les conqu?rants seraient rest?s sur leurs sols ?troits. Alexandre, C?sar, Napol?on ont ?t? de grands imaginatifs. C'est l'imagination qui les a aid?s ? vaincre, plus encore que leur audace, leur bravoure, leur science strat?gique. Pour les hommes d'?tat ?galement, le grand ressort des conceptions g?niales est, avant tout, l'imagination. Cavour et Bismarck en ?taient largement pourvus. Sans elle, les intrigues politiques avorteraient avant de na?tre, car, pour les concevoir et les faire aboutir, l'imagination est indispensable; sans elle, il n'y aurait plus de grands lanceurs d'affaires! Sans elle, l'Am?rique n'aurait pas ?t? d?couverte!

C'est un pr?jug? r?pandu de croire que, dans les professions dont le but unique est le gain, on n'a pas besoin de l'aide de l'imagination: on va jusqu'? affirmer qu'elle peut ?tre nuisible. Oui, peut-?tre, pour les simples instruments qui se contentent d'embo?ter le pas ? leurs pr?d?cesseurs ou ? leurs patrons, mais toutes les grandes industries, toutes les grandes entreprises sont n?es dans le cerveau d'un <>.

Un avocat d'assises qui manquerait d'imagination ne sauverait jamais une t?te!

Dans les sciences positives aussi, d'o? proc?dent les d?couvertes fameuses dont on m?ne si grand bruit? Des hypoth?ses n?es dans un cerveau imaginatif, analys?es ensuite et pass?es au crible de la m?thode exp?rimentale. Sans l'imagination, rien de tout cela n'aurait eu lieu. Archim?de devait poss?der une imagination puissante.

?videmment, seule ou insuffisamment soutenue, elle ne suffit pas, mais d?s qu'on la supprime, les conceptions g?niales deviennent impossibles; c'est pourquoi, ne pas d?velopper l'imagination des enfants ou ?touffer celle qu'ils manifestent, ?quivaut ? les appauvrir, ? appauvrir l'humanit? et ? commettre, par cons?quent, un crime social.

Je suis persuad?e que la crainte de l'imagination, qui a domin? l'opinion publique et le syst?me ?ducatif de la seconde moiti? du dernier si?cle, a priv? la science, la litt?rature et l'art de plusieurs forces vives. Lorsque celle qu'on a d?nomm?e ? tort <> et qu'il faudrait appeler <> est tr?s puissante, elle r?siste ? tous les efforts tent?s pour l'?craser, et peut-?tre m?me rebondit-elle plus ?nergiquement lorsqu'on s'efforce de la d?truire. Mais ce sont l? des cas exceptionnels; en g?n?ral, lorsque l'imagination est moyenne, on r?ussit tr?s bien ? enrayer son d?veloppement, et m?me ? persuader ? l'enfant que c'est une facult? honteuse ou, pour le moins, ridicule, dont il doit dissimuler les manifestations avec soin.

Que d'enfants, dans ce temps-l?, ont cruellement souffert du m?pris o? l'on tenait l'imagination, et des efforts que l'on exigeait d'eux pour qu'ils apprissent ? la dissimuler.

Sans ce travail d'?touffement auquel on s'est livr? sur l'enfance et la jeunesse pendant au moins un tiers de si?cle, je suis persuad?e que notre civilisation serait plus avanc?e et nos litt?ratures plus riches. Cette perte est irr?parable, et non seulement on n'a pas permis ? une g?n?ration de donner sa mesure, mais on a sevr? des vies humaines de beaucoup de joies et de plaisirs.

J'ai connu des enfants auxquels on interdisait les compositions, dans la crainte que ce genre de travail ne d?velopp?t leurs facult?s imaginatives.

Demandons-nous quels sont les meilleurs moments de nos journ?es et les heures dont notre m?moire garde l'imp?rissable souvenir? Nous citerons celles que notre imagination a ?clair?es. Qu'est l'amour lui-m?me, si l'imagination ne l'embellit pas, ne le rel?ve pas, ne le dore pas? Une fonction impos?e par le g?nie de l'esp?ce et que beaucoup d'?tres assimilent presque aux plaisirs de la table. Tandis qu'aid? par l'imagination, l'amour est la plus grande douceur des ?mes, la clart? lumineuse des vies, l'enchanteur qui change les r?alit?s grises en visions radieuses. Mais, dira-t-on, pourquoi transfigurer ainsi l'amour, puisque, fatalement il doit s'?vanouir, se changer en cendres au go?t amer? Plus et mieux l'on aime, plus on souffre, et le but de la vie est de ne pas souffrir... Erreur, lamentable erreur! Le go?t des cendres sera plus ?coeurant et amer si les sens et le coeur n'ont jamais connu les voiles d'or. Non seulement l'amour aura cess? d'exister, mais son souvenir aura perdu tout prestige et tout charme. Au contraire, ce qui a ?t?, ne f?t-ce qu'un jour seulement, ?clair? par l'imagination, continue ? illuminer l'existence, malgr? les douleurs, les abandons, les chutes...

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