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Munafa ebook

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Read Ebook: Sous d'humbles toits by Bachelin Henri

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Ebook has 767 lines and 45431 words, and 16 pages

Aujourd'hui me voici de retour. Mais je ne t'ai pas vu m'attendant, comme les autres ann?es, ? la barri?re de la petite gare. Tu regardais si j'?tais sur la plate-forme du wagon. Lorsque tu m'avais aper?u, tes yeux clignotaient un peu. Nous nous en allions par la route de l'?tang du Goulot. Des gens, que nous croisions, te disaient:

--Eh bien, vous voil? heureux que votre fils soit revenu?

Tu te contentais de rire en hochant la t?te. Tu voulais m?me porter ma valise, mais la derni?re fois elle aurait ?t? trop lourde pour toi qui t'?tais habitu? cependant aux fardeaux.

Je suis arriv? ? la maison: tu n'y ?tais pas non plus. Je savais que tu n'y serais pas; mais j'ai ?t? ?mu, plus que je ne pourrais dire, de ne pas t'y trouver. Ce n'est plus celle o? j'avais l'habitude de te voir, la maison aux deux grandes pi?ces carr?es o? tu ?tais heureux comme un roi dans son palais. C'en est une autre, plus petite, o? tu n'as v?cu que deux mois. Elle aurait fait plus que te suffire pendant des ann?es, car tu ?tais content de l'avoir.

Oui: c'?tait <>. Mais, maintenant que tu n'y es plus, la petite maison s'est tout-?-coup agrandie. Ton fauteuil est encore au coin de la chemin?e, mais il tend les bras vers l'?ternit?.

Pour te voir il faut aujourd'hui aller plus loin que la gare, plus loin que la maison. Il faut suivre le sentier qui, entre des haies et des murs de jardins, monte au cimeti?re. J'ai d? attendre que la nuit f?t venue, puisqu'il faut d'abord s'occuper de soi et des vivants, tout en pensant aux autres, je veux dire: ? toi, et ? ceux parmi lesquels tu es descendu. Les portes du cimeti?re ?taient ferm?es, mais j'ai l'habitude d'escalader son mur bas. J'ai march? entre les tombes.

Un clair de lune admirable s'?tendait sur le cimeti?re, sur la ville, sur les bois, sur les montagnes et sur la plaine; un de ces clairs de lune comme on en voit en septembre, par les ?t?s chauds, qui font croire que les champs moissonn?s ? ras de terre sont couverts de neige.

C'?tait une de ces nuits o? la pens?e ne peut que s'?parpiller en r?ves. Il suffisait d'?couter un grillon dans une touffe d'herbe, un chien aboyer, au lointain, ? l'entr?e d'une cour de ferme.

Comme il ?tait enfoui dans le pass?, le jour de d?cembre o? les talons de ceux qui te portaient enfon?aient dans la terre d?tremp?e par les pluies d'hiver, o? le vent emmenait jusqu'aux villages les plus recul?s du canton le glas que sonnaient pour toi ces cloches que tant de fois tu avais sonn?es!

Alors je t'ai retrouv?. Comme les tiens quand tu m'apercevais sur la plate-forme du wagon, mes yeux se sont mis ? clignoter.

Un grand ?crivain a dit d'un de ses ma?tres, dans le ch?teau natal duquel il avait pass? toute une nuit sans dormir:

--J'ai pens? ? cet homme qui a commenc? l?, et qui a rempli un demi-si?cle du tapage de sa douleur. J'ai pens? ? toi dont la vie commen?a et finit dans ce pays, dont la tombe m?me, ? cette heure, ne se distingue que pour moi parmi les autres. J'ai pens? ? toi qui n'as point demand? que l'on t'ensevel?t dans le roc, la t?te tourn?e vers un Oc?an que tu ne connaissais pas, et qui reposes ici, la t?te tourn?e vers la grande croix de fer, et vers l'?glise.

Je n'avais rien, en ce moment, d'un de ces jeunes hommes romantiques qui, parmi les ombres ou sous le clair de lune, se drapent dans le manteau mouvant de leur m?lancolie. Mes pieds ?taient comme tellement enracin?s,--pour quelques minutes et sans doute pour toujours,--dans cette terre dont tu fais maintenant partie, que je n'?prouvais le besoin ni de m'agenouiller ni m?me de me d?couvrir. Je ne te faisais pas une visite de c?r?monie: j'?tais ici chez moi.

Je pourrais dire qu'absorb? dans une muette douleur je restai longtemps yeux baiss?s, comme quelqu'un qui songe. Mais non. Je n'ai pas regard? que ta tombe.

Je les ai toutes vues, soud?es d'en dessous les unes aux autres, et, de dessus, toutes ?galement visit?es par la lune. J'ai revu celle de ton p?re et de ta m?re, que je n'ai connus que courb?s par la vieillesse, lorsque j'?tais encore petit: ils t'ont pr?c?d? l?, comme tu m'y pr?c?des. Je les ai revus un instant dans leur maison couverte de chaume; ils avaient une grande cour o? l'herbe poussait abondante, et un jardin dans lequel, bien des ?t?s avant celui-ci, on avait tu? deux serpents qui sifflaient. Je les ai revus vieillis, mais s'accrochant ? la vie comme des naufrag?s se cramponnent au bateau.

J'ai revu les tombes de tous ceux qu'ensemble nous avons enterr?s quand nous ?tions, toi sacristain, moi enfant de choeur. Trente ann?es de suite, tu as conduit les morts ? leur supr?me demeure. Tu disais famili?rement:

--Quand on est couch? l?-haut, on est bien tranquille.

Tu t'?tais habitu? ? regarder la mort en face. Mais peut-?tre, malgr? tout, crierait-on d'?pouvante si on la voyait, si on la sentait au moment pr?cis o? elle se dresse, o? elle vous frappe.

Je n'ai pas vu que les tombes: j'ai aper?u quelques maisons de la ville dont les humbles toits de paille, d'ardoises ou de tuiles sous le clair de lune ne se diff?renciaient plus. J'ai song? ? toi qui ne passeras plus devant elles, qui n'y entreras plus jamais comme autrefois lorsqu'il fallait porter aux mourants l'extr?me-onction. Le pr?tre disait:

Ceux-ci, je devine qu'ils sont assis sur leurs seuils, ? prendre le frais: la journ?e a ?t? tr?s chaude. Maintenant encore on ?touffe. Du moins ici je respire avec peine: pourtant le cimeti?re est expos? ? tous les vents.

Je regarde plus loin encore devant moi. C'est toute la plaine que je vois, cette plaine que tu as tant de fois regard?e, soit que d?s l'aurore tu fusses au travail, soit que la nuit te trouv?t b?chant, piochant.

Le matin tu marchais dans la ros?e. Les alouettes chantaient au milieu des airs, et beaucoup d'oiseaux sur les haies. Tu rentrais manger la soupe en disant:

--J'ai entendu des oiseaux, des oiseaux!... C'en ?tait un vrai concert.

Ce sont les seuls concerts que tu aies jamais entendus. Ce sont peut-?tre les plus beaux, dans la fra?cheur et la pure lumi?re des matins d'?t?.

Le soir tu marchais sur la terre chaude. Des chauves-souris passaient. Tu savais que, lorsqu'on entend la cloche de Magny sonner l'Angelus, c'est signe de pluie pour le lendemain. A ton tour tu allais sonner l'Angelus, et tu rentrais te coucher. Tu n'?tais pas de ceux qui, bouleversant leur vie, mettent la charrue avant les boeufs. Tu savais que le jour est fait pour le travail et la nuit pour le sommeil. Tu n'ignorais pas qu'il est de bon ton, ? Paris, de se coucher ? cinq heures du matin, et que seuls ceux qui ont ainsi pass? leur jeunesse connaissent ce qu'ils appellent la vie.

Je regarde la plaine avec ses bois confus, avec ses villages qu'il faut avoir vus bien des fois pour les reconna?tre. Ceci qui luit, sous la lune, est-ce l'?tang de Vaurins, un des toits d'ardoises de Marn?? Je sais que c'est l'?tang. Les fermes, les villages, je les devine tous, ceux de la plaine, ceux des bois, avec leurs chaumi?res ? fen?tres sans rideaux et leurs granges dont les aires sont plus propres que les carreaux des chaumi?res, avec leurs ruelles sales et leurs champs soigneusement entretenus; je les devine tous, dispers?s autour de la ville, et tous rayonnent pour moi, ce soir, myst?rieusement vers le cimeti?re. Tu y allais, pendant les deux semaines d'apr?s P?ques, marchant ? cinq pas en avant du vicaire en surplis qui portait le bon Dieu aux vieux et aux vieilles sans forces pour venir faire leurs p?ques ? l'?glise. C'?taient, de toute l'ann?e, tes seules promenades. Je me garderai d'exalter l'indiff?rence, autant que de m?priser l'enthousiasme de voir et le d?sir d'apprendre. Mais je ne puis m'emp?cher d'aimer ta certitude. Tu devais penser que si loin que tu ailles, si avant que tu descendes, tu n'?puiserais le monde ni dans son ?tendue, ni dans sa profondeur; qu'il est beau d'essayer de se r?pandre en tous sens, mais qu'il vaut mieux conna?tre la mesure de ses forces pour les appliquer ? une t?che appropri?e; qu'il faut, pour atteindre un but, ne le placer ni trop loin ni trop haut; que, si partir est bon pour les uns, rester est meilleur pour les autres. Ceux-ci pour se trouver doivent aller se chercher tr?s loin, comme s'ils ne pouvaient sentir leur ?me que souffrante et s'?panouir qu'en se contractant. Ceux-l? ne se connaissent qu'en restant en contact avec la terre natale: si la vie les en arrache, ils en gardent pourtant l'image ineffa?able. Si, comme elle l'a fait pour toi, elle les y ram?ne pour toujours, vers la trentaine, rien ne peut plus les ?branler. C'est ainsi que l'on voit dans les petites villes et dans les villages des existences solidement assises que ne troublent ni les cris de f?te, ni les clameurs r?volutionnaires des grandes villes. Ces r?flexions, je ne pr?tends pas que tu te les sois toutes formul?es de cette mani?re, mais je sais que tu les portais en toi-m?me.

Pour voir l'?glise je n'ai pas besoin de me retourner: je sens derri?re moi sa pr?sence. Je n'ai m?me pas besoin que la lune, rebroussant chemin par miracle, allonge par del? ta tombe l'ombre aigu? du clocher. Je la vois avec ses piliers, ses vitraux et ses chapelles; je la vois si pleine d'ombre et de silence que le craquement d'un confessionnal, la mince clart? de la veilleuse devant le tabernacle font penser ? quelque surnaturel visiteur dont ce bruit et cette lumi?re d?nonceraient la pr?sence. Si j'?tais aujourd'hui, ? neuf heures du soir, par m?garde enferm? dans l'?glise, je ne jure point que je n'aurais pas peur. Sans doute, pour d?jouer les attaques, m'adosserais-je au mur, face aux t?n?bres et au silence; mais, de ne voir et de n'entendre venir personne, ma nuit se passerait ? trembler dans l'attente.

C'est la nuit que le voile du Temple se d?chire. On aper?oit les ?toiles innombrables, et l'on songe ? toutes celles qu'on ne voit pas. La nuit, dans les campagnes, est l'heure de Dieu pour tous ceux qui ne s'endorment jamais qu'en pensant ? leur salut et se r?veillent en sursaut, avant le chant du coq, comme si les grandes vagues de l'infini venaient battre contre les volets clos de leur maison.

Je n'ai pas besoin de me retourner pour voir l'?glise. Je sais qu'elle est l?. Ses fondations descendent dans la terre plus bas encore que tu n'y es descendu. Si son ombre ne s'?tend pas vers moi, la lune la projette sur une partie de la ville, sur beaucoup de toits qui n'en ont pas conscience.

On dirait qu'elle a jailli vers le ciel comme un grand cri d'une ?me en d?tresse; mais elle demeure attach?e ? la terre par de puissantes racines qui sont de granit, de chaux et de ciment. Ni le vent ni les portes de l'enfer ne pr?vaudront contre elle. Elle s'?l?ve si haut qu'on la voit de tr?s loin. Elle est le lieu o? se r?unissent beaucoup de femmes qui ?prouvent le besoin de prier, et quelques hommes, surtout ces messieurs de la fabrique, dont la place est marqu?e au Banc-d'OEuvre. Tu n'avais qu'une chaise dans le choeur, pr?s de la cr?dence de marbre sur laquelle on voyait les burettes avec le manuterge, le b?nitier avec son goupillon. Cette chaise te suffisait: tu n'avais pas besoin, pour prier, d'?tre agenouill? sur du velours.

Mais il me semble t'entendre me dire comme autrefois, les soirs o? j'arrivais:

--Il est tard. Tu dois ?tre fatigu? de ton voyage. Couche-toi donc. D'ici quinze jours, nous avons le temps de causer.

Je ne suis pas fatigu?, mais tu as raison.

J'arrivais de Paris. Tu t'inqui?tais que je n'y fusse pas trop malheureux. Ils ne connaissent point ce sentiment, ceux qui envoient dans la grande ville leurs fils arm?s de toutes pi?ces pour la lutte et d?cid?s ? jouer des coudes au milieu de la cohue. Tu ne r?vais pour moi qu'une vie semblable ? la tienne, et tu ne tenais gu?re ? ce que j'?crive, comme tu disais, <>.

J'escalade de nouveau, en sens inverse, le mur du cimeti?re. Il fait toujours le m?me clair de lune: toute la terre en est ennoblie, jusqu'? ce sentier o? je marche et que tant de fois tu as suivi: j'en compterais tous les brins d'herbe. Mais je vois aussi les maisons, les rochers et les bois comme fondus ensemble dans un doux apaisement. Oui: nous avons le temps de causer. Il n'y a m?me plus besoin que nous soyons, comme autrefois, assis ? la m?me table. Je te vois, je t'?coute mieux maintenant. Ta mort, comme ce clair de lune fait de la terre, m'illumine ta vie tout enti?re.

Tu n'aimais ni la m?disance, ni la calomnie, ni le mensonge, mais tu m?disais de toi, tu te calomniais, tu te mentais ? toi-m?me.

Tu ?tais riche de m?rites, et tu t'en disais pauvre. Tu ?tais fort, et tu t'estimais faible.

Tu priais sans cesse, et tu trouvais que tu ne priais jamais assez.

Tu ne tenais pas ? te reposer, mais tu te reposais le dimanche en travaillant pour Dieu. Tu ne doutais pas qu'il ne d?t te tenir ses promesses, mais tu doutais que tu eusses assez fait pour en ?tre digne.

Te priver des f?tes des hommes? Il ne t'en co?tait pas, mais tu ne manquais pas de sanctifier les f?tes religieuses.

Tu ne tenais pas ? conna?tre les joies de la terre, mais tu voulais avoir la joie de te sentir en r?gle avec le ciel.

Tu aimais le ramage des oiseaux, mais comme saint Fran?ois d'Assise de la confr?rie duquel tu faisais partie: parce qu'ils chantent les louanges de Dieu.

Tu faisais fi des joies ext?rieures, mais tu recherchais celles qui viennent de l'?me.

Ta vie, regard?e du dehors, peut para?tre grise: vue du dedans, elle est claire, brillante, pareille, dans sa s?r?nit?, ? ce solide rocher de granit couronn? de bruy?re rose, mais sur lequel se brise l'inutile et voluptueux clair de lune.

CEUX QUI RESTENT

D?s les premi?res rafales de septembre, lorsque le vent pousse par paquets la pluie contre les portes et, comme elles joignent mal d'en bas, jusque dans les maisons, les volets se ferment au cr?puscule, les premiers feux s'allument, les lampes luisent. Alors ils commencent ? clouer aux fen?tres, qu'ils n'ouvriront plus gu?re, des bourrelets de laine; ils posent des nattes de paille dans la cabane des poules pour qu'elles aient moins froid.

D?s les premiers flocons de neige, ils se retranchent derri?re les murs ?pais et se serrent autour des po?les sur lesquels l'eau bout. Quand il leur faut sortir, ils s'emmitouflent de capuchons, de cache-nez, de manteaux et marchent avec pr?caution sur le verglas. Ils couvrent les pommes de terre, les choux et les carottes dans la cave, ? cause des gel?es; ils passent une grande partie de leur temps ? fendre des b?ches, ? scier le bois de moule.

D?s que le premier perce-neige se montre, les portes s'ouvrent; les visages sont ?clair?s du dedans par un soleil plus beau que celui qui brille dans le ciel. Alors ils ?coutent carillonner les cloches de P?ques, et les merles siffler dans les bois. Ils se dispersent le dimanche sur les routes, les autres jours dans les jardins o? les pommiers fleurissent, dans les champs o? vont pousser les petits pois.

D?s les premiers souffles chauds, une langueur envahit les maisons et se refl?te dans les yeux des jeunes filles; les rues sont d?sertes; les poules se perchent ? l'ombre sur les branches des tilleuls. Alors ils appr?cient la fra?cheur de l'eau de source; ils attendent six heures du soir pour aller couper du tr?fle, et onze heures--c'est bien tard, mais il fait si bon dehors!--pour se coucher.

Quelquefois le jeudi, au march?, je tournais avec ma m?re autour des femmes des villages; les unes voulaient vendre leur beurre des prix fous: vingt-quatre sous la livre, pensez donc, madame! les autres ?taient dispos?es ? le c?der pour vingt, m?me pour dix-neuf sous, mais c'?tait du beurre qui ne valait rien, qu'on n'aurait pas pu faire fondre pour le garder. La vie des m?nag?res n'est pas exempte de soucis. Ceux qui ne font que traverser ces rues tranquilles o? l'herbe pousse sans qu'on la contrarie, les voient sur le pas de leurs portes occup?es ? <>; ils les voient--ou les devinent,--derri?re leurs fen?tres, cousant, reprisant, tricotant, mais si peu press?es de besogne qu'elles ont le temps d'?carter leurs rideaux pour regarder qui passe. Ils ne savent point quels tracas elles ont. Ce sont les prix du beurre, du caf?, de la viande qui montent sur le march?, ? l'?picerie, ? la boucherie. C'est de la toile qu'il s'agit de ne pas payer trop cher pour une chemise, pour une demi-douzaine de mouchoirs. Ce sont les petits pois qui n'ont pas l'air de venir comme il faut. C'est la pluie qui ne cesse pas de tomber: je suis oblig?e, en plein mois de juin, d'allumer du feu pour faire s?cher mon linge. Et encore, hier, je ne l'ai pli? dans l'armoire qu'? moiti? sec. C'est la vie de chaque jour qu'il faut surveiller du matin au soir, minute par minute, pour que l'argent ne s'en aille pas o? il ne doit pas aller.

J'appris que des gens ?taient en pourparlers pour louer la maison qui touchait ? la n?tre. Ce n'est pas tout-?-fait exact, puisqu'elles ?taient s?par?es par une ?troite ruelle o?, gamins, nous entrions avec peine, en effa?ant les ?paules. Elle ?tait jonch?e de tuiles cass?es, de d?bris de bo?tes en fer blanc. Quand j'arrivais au fond, je sentais des bouff?es d'air humide qui, par un soupirail, venaient de notre cave creus?e dans le roc, et je voyais pendre des herbes folles qui jaillissaient d'un jardin dont le sol ?tait presque au niveau des toits des deux maisons. J'allais jusque l? comme en un pays plein de p?rils et fr?quent? par des b?tes redoutables, telles que grosses araign?es, rats ?normes, serpents peut-?tre, et avec la crainte de ne plus pouvoir sortir: que j'eusse tout ? coup grossi, que les murs--sait-on jamais?--se fussent rapproch?s. Quand je tournais la t?te vers l'entr?e je ne voyais plus qu'une ?troite bande verticale de lumi?re, mais qui s'?largissait--heureusement!--? mesure que je revenais sur mes pas. Je me h?tais, pour ?chapper aux b?tes, aux bouff?es d'air humide, pour revoir la lumi?re et sentir l'air doux.

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