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Munafa ebook

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Read Ebook: Le duel by Kouprine Alexandre Mongault Henri Translator

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Ebook has 1727 lines and 85444 words, and 35 pages

--H?! b?tises!--fit Vietkine en se renfrognant. ?coute, Bek, ta nouvelle de l'exercice du sabre sur des mannequins est r?ellement une surprise pour nous. Qu'est-ce que cela signifie? Alors il ne nous restera plus le moindre loisir? D'ailleurs on nous a apport? hier ce monstre.

Il montra le milieu du terrain d'exercices o? se dressait un mannequin en terre glaise humide, et qui avait une certaine ressemblance avec une silhouette humaine, mais ?tait d?pourvu de bras et de jambes.

--Et alors? vous avez sabr?? demanda avec curiosit? Bek-Agamalov. Romachov, vous n'avez pas essay??

--Pas encore.

Eau-de-vie.--H. M.

--Eh, bougre d'original, ne faut-il pas qu'un officier sache se servir de son sabre?

--Et pourquoi, s'il vous pla?t? Pour la guerre? Avec les armes ? tir rapide d'aujourd'hui, on ne te laissera pas approcher ? cent pas, ? quoi diable te servira ton sabre? Je ne suis pas un officier de cavalerie. En cas de besoin, je prendrai plut?t mon fusil et, avec la crosse, pan, pan, sur les caboches. C'est plus s?r.

--C'est bien, mais en temps de paix? Peut-on pr?voir ce qui peut arriver? Une ?meute, une insurrection, ou bien...

--Eh bien, quoi? A quoi me servira mon sabre? Je ne me livrerai pas ? la sale besogne de fendre les t?tes des gens! <> et l'affaire est dans le sac...

Bek-Agamalov prit un air m?content.

--Allons, tu dis toujours des sottises, Pavel Pavlytch. R?ponds s?rieusement. Tu es en promenade ou au th??tre, ou bien, par exemple, tu te trouves au restaurant et quelque p?kin t'insulte, ou m?me--prenons un cas extr?me--te donne un soufflet. Que feras-tu?

Vietkine haussa les ?paules et serra d?daigneusement les l?vres.

--Hum! en premier lieu, aucun p?kin ne me frappera, parce qu'on ne frappe que celui qui a peur d'?tre frapp?. En second lieu... que ferai-je? Je lui enverrai une balle de revolver.

--Et si tu as laiss? ton revolver chez toi? demanda Lbov.

--Hum, diable... alors j'irai le chercher... Ce n'est pas plus malin que cela. On avait un jour insult? un cornette dans un caf?-chantant; il se fit conduire chez lui en fiacre, rapporta son revolver et tua deux p?kins. Et voil? tout!...

Bek-Agamalov secoua la t?te avec d?pit.

--Je sais, j'en ai entendu parler. Toutefois, le conseil de guerre reconnut qu'il avait agi avec pr?m?ditation et le condamna. Qu'y a-t-il de bien l? dedans? Non, si quelqu'un m'insultait ou me frappait...

Il n'acheva pas la phrase, mais sa petite main qui tenait les r?nes se referma si fortement qu'elle en trembla. Lbov fut soudain secou? d'un rire ?clatant.

--Encore! dit s?v?rement Vietkine.

--Messieurs... je vous prie... ha, ha, ha! Au r?giment de M... Il y eut une histoire. Le sous-enseigne Kraouz? fit un scandale au club de la noblesse. Alors le ma?tre d'h?tel l'empoigna par la patte d'?paule qu'il arracha presque compl?tement. Aussit?t Kraouz? sortit son revolver et... pan, dans la t?te! tu? raide! sur place. Un sale petit avocat intervint et sur lui aussi... pan! Naturellement tout le monde se dispersa; Kraouz? rentra tranquillement au camp et se dirigea du c?t? du drapeau, sur le front de bandi?re. La sentinelle cria: <>--<> Il se coucha et se transper?a le bras d'un coup de revolver. Il fut acquitt? par le conseil de guerre.

--Fameux gaillard! dit Bek-Agamalov.

La conversation commen?ait ? rouler sur le th?me favori des jeunes officiers, c'est-?-dire sur les vengeances tir?es s?ance tenante, sans pr?m?ditation, meurtres qui restaient presque toujours impunis. Dans une toute petite ville, un cornette imberbe en ?tat d'ivresse s'?tait jet?, le sabre ? la main, au milieu d'un groupe d'Isra?lites qui c?l?braient la P?que. A Kiev, un sous-lieutenant d'infanterie avait, dans une salle de danse, mortellement frapp? de son sabre un ?tudiant qui l'avait heurt? du coude au buffet. Dans certaine grande ville--autre que Moscou et P?tersbourg--un officier avait tu? d'un coup de feu, <>, un civil qui, au restaurant, lui faisait remarquer que les gens bien ?lev?s n'importunaient pas les dames qu'ils n'avaient pas l'honneur de conna?tre.

Romachov, qui, jusqu'alors, avait gard? le silence, rougit soudain de confusion, rajusta sans n?cessit? ses lunettes, toussota et se m?la ? la conversation.

--Messieurs, voici ce que, de mon c?t?, je crois devoir ajouter: quand il s'agit d'un ma?tre-d'h?tel... oui... parfaitement... Mais s'il s'agit d'un civil... comment dirai-je?... Oui... allons... s'il s'agit d'un homme bien ?lev?, d'un noble... Pourquoi donc tomberais-je avec mon sabre sur un individu d?sarm?? Pourquoi ne pourrais-je pas lui demander une r?paration? Malgr? tout, nous sommes des gens cultiv?s, si je puis m'exprimer ainsi...

--H?! vous dites des absurdit?s, Romachov, interrompit Vietkine. Vous lui demanderez une r?paration, mais il vous r?pondra: <> Voil?, et vous garderez toute votre vie votre gifle.

Bek-Agamalov sourit de son large sourire rayonnant.

--Ah bah! tu es de mon avis! Je te le dis, Vietkine: apprends ? sabrer. Chez nous, au Caucase, tout le monde s'y exerce d?s l'enfance, sur des baguettes, sur des cadavres de mouton, sur de l'eau.

--Et sur les hommes? ajouta Lbov.

--Et sur les hommes, r?pondit avec calme Bek-Agamalov. Et il faut voir comme on sabre bien! D'un seul coup on fend un homme de l'?paule ? la hanche, en biais. C'est ce qui s'appelle un coup! Autrement cela ne vaut pas la peine de se salir les mains.

--Et toi, Bek, es-tu capable d'en faire autant?

Bek-Agamalov poussa un soupir de regret.

--Non, je n'en suis pas capable... je coupe un jeune agneau en deux... je me suis aussi essay? sur le cadavre d'un veau... mais un homme... ma foi, non... je ne pourrais pas. J'enverrais sa t?te voler au diable, je le sais; mais comme cela, en biais... non. Mon p?re le faisait facilement.

--Eh bien, messieurs, allons essayer, supplia Lbov dont les yeux s'enflamm?rent. Bek, mon ami, je vous en prie, allons...

Les officiers s'approch?rent du mannequin Vietkine frappa le premier. Donnant une expression de f?rocit? ? son visage bon et niais, il fit gauchement avec son sabre, un large moulinet et l'abattit de toutes ses forces sur le mannequin. En m?me temps sa gorge ?mit instinctivement le son caract?ristique--khrias!--qui ?chappe aux bouchers lorsqu'ils hachent de la viande. La lame s'enfon?a d'une quinzaine de centim?tres dans la terre glaise, et Vietkine l'en retira avec difficult?.

--Mauvais! opina Bek-Agamalov en secouant la t?te. A vous, Romachov.

Romachov tira son sabre du fourreau et, tout d?contenanc?, rajusta ses lunettes. Il ?tait de taille moyenne, maigre et, bien qu'assez vigoureux, ?tant donn? sa constitution physique, une excessive timidit? le rendait maladroit. Il n'avait jamais ?t? fort en escrime m?me pendant ses ann?es d'?cole et, depuis un an et demi qu'il servait au r?giment, il avait compl?tement oubli? cet art. En levant le sabre au-dessus de sa t?te, il porta en m?me temps, instinctivement, son bras gauche en avant.

--Le bras, lui cria Bek-Agamalov.

Mais il ?tait trop tard. L'extr?mit? de son sabre ne fit qu'effleurer le mannequin. Comme Romachov s'attendait ? une grande r?sistance, il perdit l'?quilibre et vacilla. Le tranchant du sabre, frappant sa main gauche tendue en avant, lui d?chira un lambeau de peau ? la naissance de l'index. Le sang jaillit.

--Et maintenant, regardez, ajouta-t-il. Je place mon bras gauche derri?re mon dos. Quand on donne un coup, il ne faut chercher ni ? battre, ni ? trancher l'objet, il faut agir comme si on sciait quelque chose, en retirant le sabre en arri?re... vous comprenez? Et surtout n'oubliez pas que le plat de la lame doit absolument ?tre inclin? par rapport ? la surface ? sabrer; c'est indispensable. En agissant ainsi, vous obtenez un angle plus aigu. Tenez, voyez.

Bek-Agamalov recula ? deux pas du mannequin, le visa de son regard per?ant, puis, soudain, il fit scintiller son sabre tr?s haut en l'air et, le corps tout entier pench? en avant, dans un mouvement si rapide que les yeux ?blouis avaient peine ? suivre, il ass?na un coup fulgurant. Romachov n'entendit que le sifflement aigu de l'air coup? par la lame d'acier et, au m?me instant, la moiti? sup?rieure du mannequin s'effondra lourdement sur le sol. La surface coup?e ?tait aussi lisse que si elle avait ?t? polie.

--Ah, diable! voil? un coup! s'exclama Lbov enthousiasm?. Bek, mon cher, recommence, je te prie.

--Mais oui, Bek, recommence, demanda Vietkine.

Mais Bek-Agamalov, craignant de g?ter l'effet qu'il venait de produire, remit, en souriant, son sabre au fourreau. Il respirait difficilement et, ? ce moment, avec ses yeux m?chants largement ouverts, avec son nez busqu? et ses dents d?couvertes, il ressemblait ? quelque oiseau de proie fier et rapace.

--Peut-on appeler ?a un coup de sabre?--dit-il avec un d?dain affect?. A l'?ge de soixante ans, mon p?re, au Caucase, tranchait le cou d'un cheval! Il faut s'exercer constamment, mes enfants. Chez nous, voici comment on proc?de: on place une tige d'osier dans un ?tau et on la fend d'un coup de sabre, ou bien on laisse couler d'une certaine hauteur un mince filet d'eau et on le coupe. S'il ne se produit pas d'?claboussures, c'est que le coup a ?t? bien donn?. Allons, Lbov, ? toi, maintenant.

Le sous-officier Bobylev arriva en courant, tout effray?, et dit ? Vietkine:

--Votre Noblesse... le colonel arrive!

--Ga-arde ? vous! cria d'une voix forte, tra?nante et s?v?re le capitaine Sliva, de l'autre extr?mit? du terrain.

Les officiers se s?par?rent ? la h?te et rejoignirent leurs pelotons respectifs.

Une grande cal?che massive arriva de la route sur le terrain d'exercices et s'arr?ta. Le colonel descendit p?niblement d'un c?t?, faisant incliner de son poids tout le coffre de la voiture, tandis que, de l'autre c?t?, sautait prestement ? terre l'adjudant-major du r?giment, le lieutenant F?dorovski, un ?l?gant officier de haute taille.

--Bonjour, 6e! dit le colonel d'une voix pleine et calme.

Les soldats, d'une fa?on bruyante et discordante, cri?rent des diff?rents angles de la place:

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