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Munafa ebook

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Read Ebook: A bord de la Junon by Lemay Gaston

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Ebook has 907 lines and 81620 words, and 19 pages

--Oui, il y a un peu d'encombrement. On arrangera cela apr?s le d?part. Rassurez-vous, vous serez en mer demain ? midi.

--Vous en ?tes s?r?

--Parfaitement s?r.

--Tr?s bien. Mais, dites-moi, si ce n'est trop indiscret, pourquoi ce mat?riel n'est-il pas embarqu? depuis plusieurs jours?

--Je vous expliquerai cela plus tard... Je n'ai pas une minute. Excusez-moi si je vous quitte si brusquement... Ah! ? propos, nous d?nons ? six heures. Vous avez encore une heure ? vous.

--Nous d?nons... o? cela? ici?

--Sans doute.

--Mais les assiettes ne sont pas encore embarqu?es!

--Elles le seront. Mille excuses. A tout ? l'heure.

A six heures... et quelques minutes, le d?ner ?tait servi. Nous p?mes constater avec satisfaction que le cuisinier m?ritait notre estime. C'est l? un point fort important ? bord d'un navire; je me suis laiss? raconter maintes fois par des officiers de marine que <>. Voil? un ?cueil qui me para?t ?vit?, et si ce n'est le plus dangereux, c'?tait peut-?tre celui qu'on avait le plus de chance de rencontrer.

J'eus, pendant le repas, l'explication de cet indescriptible d?sordre qui me paraissait compromettre les bonnes conditions du d?part.

Voici ce qui s'?tait pass?:

Bon nombre de mes compagnons, r?unis ? Marseille depuis une huitaine, impatients de partir et fatigu?s d'attendre, parlaient de se d?sister. L'exp?dition ?tait compromise.

Quelques mots sur notre nouveau logis. C'est un steamer ? h?lice de construction anglaise, un peu lourd de formes, point jeune mais solide, et capable assur?ment de remplir la rude mission qu'on lui a impos?e. Il mesure 76 m?tres de long sur 9 de large et jauge 750 tonnes. Install? primitivement plut?t pour le transport des marchandises que pour celui des voyageurs, le nombre de cabines ?tait insuffisant; aussi a-t-il fallu en construire de nouvelles ? notre intention.

En somme, c'est un bon navire.

Apr?s d?ner, comme il nous restait quelques heures de libert?, j'en profitai pour me mettre ? la recherche d'un de nos compagnons de route qui n'avait pas paru ? bord. C'?tait M. de R..., un ?tranger, mais grand ami de la France et grand voyageur, fort riche, d'?ge respectable et parfait gentleman. Je le trouvai ? son h?tel, tranquillement install? devant un excellent menu.

--Ma foi! non. Vous ?tes venu pour moi, vous ?tes bien aimable... Asseyez-vous, je vous en prie. Un verre de champagne?...

--Vous renoncez au voyage?

--Oh! pas du tout; mais j'ai r?fl?chi. Ce n'est pas la peine de me mettre en route maintenant. Qu'allez-vous voir pour commencer? Gibraltar, Tanger, Mad?re. J'ai vu tout ?a. Je vous rejoindrai ? Rio... ou ? Buenos-Ayres.

--Mais, ? ce compte-l?, vous avez vu aussi, je crois, le Br?sil et la Plata?

--Oui, c'est vrai. Moi, voyez-vous, dans ce voyage, il n'y a gu?re que les ?les Fiji qui m'int?ressent v?ritablement. Vous n'y ?tes pas all??

Je regardai M. de R...; il ?tait s?rieux.

--Non! je ne suis pas all? aux ?les Fiji.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Me voici dans cette cabine o? j'ai ?t? conduit il y a quelques heures. Il faisait alors grand jour; j'?tais entour? de gens qui sont maintenant paisiblement chez eux et qui demain, ? pareille heure, y seront encore; je n'avais que quelques pas ? faire pour fouler le sol de mon cher pays; je voyais des rues, des maisons, des passants; je vivais de la vie de tout le monde.

Comme tout cela est chang?. La nuit est profonde, l'agitation a cess? comme par enchantement. Pas de bruit. L'?quipage fatigu? se repose, et le silence absolu n'est troubl? que par le petit clapotement de l'eau le long de la muraille du navire. Par mon hublot ouvert, je ne vois que quelques lumi?res diss?min?es et de grandes ombres derri?re ces lumi?res. Demain, ? pareille heure, je ne verrai m?me pas cela. D?cid?ment, le dernier lien est rompu...

Permettez-moi, lecteur, en attendant que le sommeil me gagne, de me pr?senter ? vous. Puisqu'il vous a plu d'ouvrir ce livre, sachez quel compagnon vous emm?ne avec lui dans sa promenade ? travers le monde.

J'esp?re ne pas avoir justifi? ces s?v?res pr?visions; cependant l'Europe, l'Asie et l'Afrique n'ont pas encore assouvi mon humeur vagabonde.

Il y a ? peine trois ans, j'ai accompagn? Largeau ? Ghadam?s; avec deux autres vaillants compagnons, Say et Faucheux, nous avons explor? cette oasis du grand d?sert, riche entrep?t des produits du Soudan, et nous en sommes revenus par hasard la vie sauve, nous estimant heureux de rapporter quelques renseignements utiles pour l'avenir de notre plus belle colonie.

Le sort nous a bien dispers?s depuis. Largeau s'est bris? ? la peine et est rentr? en France; Say ?tudie toujours la question commerciale aux confins du d?sert, et Faucheux, comme colon explorateur, est aujourd'hui ? Sumatra.

Puis de l'Atlas, je suis pass? au del? des Balkans, en Serbie, o? j'ai assist? ? tous les d?tails du prologue de la guerre aujourd'hui termin?e, pr?sent ? toutes les affaires, avec Leschanine ? Za?tchar, avec Horvatowitch ? Kniaj?watz, avec Tcherna?eff sous Aleksinatz. Enfin ma derni?re p?r?grination s'est accomplie en Arm?nie, o? pendant de longs mois, sous Kars, j'ai suivi les mouvements de l'arm?e turque d'Asie.

Quelle diff?rence entre ces voyages et celui que je vais entreprendre! Il me semble que celui-ci est la r?compense des fatigues de mes excursions pass?es. Je n'ai plus cette fois qu'? me laisser conduire; point de soucis, pas de transbordements: je vais voir le monde entier tout ? mon aise.

Y a-t-il des dangers? Je ne les pr?vois gu?re. Le bateau est solide et bien command?, l'?quipage, m'a-t-on dit, est excellent, et mes compagnons paraissent fort aimables. Cependant bien des gens ont fait le tour du monde, chacun le peut faire aujourd'hui, les pays que je vais visiter ont ?t? cent fois d?crits, et je me demande si ces notes, forc?ment incompl?tes, auront quelque int?r?t pour d'autres que pour moi. Vous seul, lecteur, pourrez le dire; mais puisque je me suis promis de vous raconter ce que j'aurai vu et appris, laissez-moi vous faire cette humble et sinc?re profession de foi:

Je n'ai point de pr?tention ? la science, n'?tant ni g?ographe, ni botaniste, ni g?ologue, ni astronome, ni m?me astrologue, ni rien enfin qui puisse me permettre de pr?tendre ? un titre scientifique quelconque. Je vous dirai mes impressions et mes opinions, je n'augmenterai ni ne diminuerai rien des unes ni des autres; je n'aurai ni complaisances ni s?v?rit?s; je me tromperai peut-?tre, mais je vous promets de ne pas vous tromper.

Je sais que nous devons voir le monde assez vite, mais je sais aussi que nous serons bien plac?s pour le voir, nous puiserons dans l'exp?rience des plus exp?riment?s; n'est-ce pas le meilleur moyen pour savoir ce qui est et supposer ce qui sera?

En mer, 2 ao?t.

Nos regards sont rest?s longtemps fix?s sur la ville, puis sur les montagnes; enfin, le mince ruban qui bordait l'horizon s'est effac?, la terre a disparu.

Nous sommes maintenant entre le ciel et l'eau. France, au revoir!

On a travaill? activement ? r?parer le d?sordre de la veille, et je me suis aper?u que c'?tait chose plus facile que je ne le pensais tout d'abord. Chacun de nous, dans sa cabine, proc?de ? une premi?re installation. H?tons-nous, car la mer peut devenir mauvaise, et sans doute il nous faudra payer notre tribut ? ce dieu prudent qui pr?vient les navigateurs novices que tout n'est pas rose dans le m?tier de marin.

A la tomb?e de la nuit, un violent orage a pass? sur nous. Les ?clairs se succ?daient sans interruption. Les voiles go?lettes ?tablies pour diminuer les mouvements de roulis ont d? ?tre serr?es, non sans peine; une pluie battante a contraint de fermer les panneaux. Nos estomacs commencent ? faiblir, des catastrophes sont imminentes. Nous nous r?fugions dans nos cabines en proie ? de vives ?motions.

Tristes ?preuves qui nous ont fait oublier en un moment et patrie et famille! Notre ma?tre coq, un d?missionnaire du Splendide hotel, s'il vous pla?t, est compl?tement navr?, et nous le sommes encore plus que lui. Que d'excellentes choses il nous avait servies et dont nous n'avons pas pu profiter!

La dunette, o? nous nous sommes r?fugi?s apr?s le grain, ?tendus sur de longs fauteuils en osier, inertes et comme an?antis, ressemble ? s'y m?prendre ? une ambulance, avec cette complication que notre jeune docteur est ?galement gisant. Quelle meilleure excuse peut-il nous donner! Impuissant ? nous gu?rir, il veut au moins partager nos maux. Quel m?morable exemple offert ? tous ses confr?res!

Terre! Ce sont les ?les Bal?ares. Voici la grande ?le Majorque, puis Ivi?a, l?-bas, dans la brume, Minorque, Formentera et Cabrera sont invisibles. Peu nous importe. Un peu moins de tangage et pas du tout de Bal?ares ferait bien mieux notre affaire.

La nuit s'est bien pass?e. La mer s'est radoucie, et nous voil? redevenus parfaitement dispos. Nous n'avons pas, d'ailleurs, ralenti notre marche. Vers deux heures du matin, on a reconnu la terre d'Espagne et constat?, para?t-il, une fois de plus, l'existence d'un courant tr?s variable, mais souvent tr?s fort, portant ? l'ouest, aux environs des caps Saint-Martin et Saint-Antoine.

A huit heures, on est venu nous pr?venir que la messe serait dite ? neuf heures. Nous y sommes tous all?s; les uns par conviction, les autres... peut-?tre par curiosit?.

A l'heure dite, le commandant, accompagn? des officiers non de service, prit place au premier rang, en invitant l'un de nous, M. R. de L..., ? se mettre ? sa droite. Bient?t M. l'abb? Mac, aum?nier de l'exp?dition, parut et l'office commen?a. On n'entendit plus alors d'autre bruit que celui des mots sacr?s prononc?s ? demi-voix et le battement r?gulier de l'h?lice, dont chaque coup mettait plus de distance entre nous et les n?tres.

Pour ma part, tout en m'abandonnant quelque peu ? un sentiment de r?verie qui me ramenait aupr?s des miens, j'?prouvais, je l'avoue, un ind?finissable plaisir ? suivre le sillage du navire et ? me sentir entra?n? d'un mouvement doux, mais rapide, vers ces pays nouveaux o? j'avais tant h?te d'aborder.

Le vent de bout a un peu retard? notre marche. Nous avons maintenant en vue la terre d'Afrique; ? tribord, nous suivons d'assez pr?s la c?te d'Espagne, o? viennent s'affaisser brusquement les sierras. Une forte houle de l'avant nous annonce la lutte entre la M?diterran?e refoul?e et l'Atlantique qui verse ses mar?es chez sa faible rivale. Voici encore Malaga. Puis les terres se resserrent, les deux continents semblent se rejoindre. Le temps est devenu magnifique, le ciel est toujours bleu et le soleil ? son coucher jette encore quelques rayons d'or ? l'entr?e du d?troit. A gauche, sur la c?te d'Afrique, c'est Ceuta, place jadis forte et toujours occup?e par les Espagnols, qui en ont fait un p?nitencier; ? droite, c'est la pointe d'Europe, figur?e par un ?norme rocher au sommet duquel flotte le drapeau dominateur de l'Angleterre.

GIBRALTAR

La citadelle.--Une consigne s?v?re.--L'aventure de la petite Johnston.--La clef de la M?diterran?e.--Physionomie de la ville.--Les cavernes.--Point de vue.

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